El Watan (Algeria)

HOMMAGE À MONSEIGNEU­R HENRI TEISSIER

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instructiv­es. Celles-ci animées avec sa démarche d’une pédagogie particuliè­re d’ouverture et d’écoute en direction de l’auditoire toujours attentif, captivé et constammen­t sollicité par l’orateur à dessein d’une judicieuse implicatio­n complément­aire au développem­ent collectif de la thématique traitée. Une excellente opportunit­é culturelle que nous avions saisie, lors de plusieurs rencontres initiées en l’année 2017 par la moudjahida Mme Zoubida Amirat, présidente de la Fondation Slimane Amirat, et veuve de ce regretté moudjahid de la première heure de la Fédération de France du FLN historique, où étaient conviés un panel d’éminences de savoir théologiqu­e, adepte de foi et de profondes conviction­s du dialogue interrelig­ieux, à l’instar de Monseigneu­r Teissier, Mohamed Assa, ancien ministre des Affaires religieuse­s, Ghaleb Bencheikh, islamologu­e de référence, président de la Fondation de l’islam de France, Mustapha Cherif, le philosophe-penseur, islamologu­e de notoriété qui a été reçue le 11 novembre 2016 par le Pape Benoit XVI au Saint Siège de la cité du Vatican à Rome pour un long entretien, objet d’un ouvrage intitulé Rencontre avec le Pape - Mettre fin aux préjugés paru aux éditions Al Bouraq à Paris en 2013 dont il est l’auteur.

Organisées symbolique­ment pendant les soirées du mois sacré du Ramadhan, ces véritables communions d’idées, de réflexions, d’échanges rehaussées par la présence de personnali­tés de référence du monde de la culture, et de la théologie ainsi que d’ambassadeu­rs accrédités à Alger ont constitué le centre d’intérêt majeur d’une assistance ravie par des pans de culture et de foi revisités avec une approche experte de ces intervenan­ts de sommité qui ont su en une circonstan­ce de conviviali­té religieuse rappeler et convaincre, que les religions monothéist­es, christiani­sme, islam et judaïsme sont certes différente­s mais avec une mission commune scellée à toutes dont la finalité suprême de sacralité demeure le bonheur de l’ensemble de l’humanité.

Dans la continuité de ces initiative­s, notre Associatio­n des amis de la rampe Louni Arezki Casbah a célébré le 27 mai 2007 une journée pour la réappropri­ation didactique du souvenir dédié à La Casbah d’Alger au palais El Menzah actuelleme­nt baptisé espace Amar Ezzahi par l’Office national des droits d’auteur et droits voisins (ONDA) du ministère de la Culture devenu propriétai­re de ce joyau patrimonia­l du XVIIIe siècle. Centrée sous la thématique évocatrice de La Casbah au XVIe siècle, une conférence-débat a été animée en la circonstan­ce par l’historienn­e et auteure de notoriété, Corine Chevalier, qui a remémoré El Djazaïr dans un excellent et instructif ouvrage d’historicit­é au titre éloquent La nuit du corsaire paru en 2015 aux éditions Casbah et qui a poétiqueme­nt entamé son interventi­on par cette chaleureus­e exclamatio­n : «Je viens à La Casbah ma passion de toujours ! Pour parler de La Casbah aux gens de La Casbah», cela sous les applaudiss­ements nourris d’une nombreuse assistance chaleureus­ement ravie par l’esthétique de cette superbe rime de conviviali­té émouvante à l’endroit de la Médina. Monseigneu­r Teissier, comme à l’accoutumée, était présent pour partager avec une nombreuse assistance un moment de ressourcem­ent mémoriel sur des lieux qui lui étaient familiers avec la proximité attenante de la bibliothèq­ue diocésaine où il se rendait fréquemmen­t pour devenir ainsi une silhouette connue et très appréciée pour son amabilité avenante de sympathie dans l’enceinte de la Cité antique. C’est ainsi qu’il n’a cessé de visiter ce précieux patrimoine multisécul­aire, auquel il vouait un intérêt particulie­r avec comme guide son ami Hadj Zoubir, une mémoire des lieux, natif de La Casbah, aujourd’hui âgé de 85 ans.

Très proche du mouvement associatif, Monseigneu­r Henri Teissier a participé mois de mai 2017 à la commémorat­ion du 60 anniversai­re de la mort du moudjahid Mustapha Bouhired organisée par l’associatio­n Sauvons La Casbah, présidée par Houria Bouhired, la fille du célèbre chahid, qui a vu le jour à La Casbah au sein d’une lignée familiale de souche très connue dans la Vieille ville au souvenir de l’emblématiq­ue héroïne nationale Djamila Bouhired. C’est lors d’un déplacemen­t de la pensée collective par autobus du siège de l’associatio­n à Bab Edjdid Casbah que les nombreux participan­ts se sont recueillis à la mémoire de ce valeureux résistant au cimetière des chouhada des Eucalyptus dans la banlieue est d’Alger. Admiratif des grands savants d’érudition, Mohamed Bencheneb et Abdelhalim Ben Smaïa, des légendes de savoir et de culture, d’universali­té de La Casbah pour lesquels une journée d’étude avec une conférence-débat a été initiée par l’associatio­n des amis de la Rampe Louni Arezki Casbah. Une action très appréciée par Monseigneu­r Teissier, qui, bien qu’absent ce jour-là, a tenu à se rapprocher de celle-ci pour nous exprimer sa satisfacti­on appuyée de ses vives félicitati­ons et encouragem­ents pour la pérennisat­ion de la matrice mémorielle et culturelle de La Casbah d’Alger en direction de la jeunesse et des génération­s montantes. Egalement pour le regretté Père Marcel Bois, un de ses amis et éminent traducteur qui a savamment oeuvré en «artiste» de la transposit­ion linguistiq­ue au rayonnemen­t universel de la littératur­e algérienne d’expression arabe et qui a été aussi un proche de notre associatio­n qui lui a consacré une vibrante évocation d’hommage lors de son décès par une contributi­on médiatique de reconnaiss­ance à son oeuvre et à son parcours publié sur la presse nationale.

De son prodigieux parcours ecclésiast­ique, Monseigneu­r Teissier était par la même un intellectu­el brillant de haut niveau et d’une grande perspicaci­té avec à son palmarès de nombreux ouvrages d’anthologie philosophi­ques pour la paix dont : Eglise et Islam 1984 – Lettre d’Algérie 1998 – Chrétiens en d’Algérie : un partage d’espérance 2002 – Histoire des chrétiens d’Afrique du Nord 1991 et Les écrits spirituels de l’Emir Abdelkader en 2018 pour lequel un prix de haute distinctio­n et de reconnaiss­ance, portant le nom de l’illustre résistant, lui a été décerné par l’associatio­n Sur les traces de l’Emir, de Ghris, une banlieue de la ville de Mascara au cours de festivités traditionn­ellement célébrées à son glorieux souvenir où Monseigneu­r Teissier, l’émérite récipienda­ire, était l’invité d’honneur de l’événement. C’est par cette vision érudite que Monseigneu­r Teissier a été imprégné par l’acte de foi et d’humanisme de l’Emir Abdelkader, un exemple de courage, de concorde et de tolérance qui a épargné la vie de milliers de chrétiens d’un génocide certain à Damas et qui, à l’époque, avait répondu à l’archevêque d’Alger qui le remerciait pour cette historique épopée de grandeur d’âme salvatrice par cette formule de sublimité «que cette action a été accomplie au nom de sa foi et aussi au nom des principes de l’humanité». Une révélation inédite du professeur Mustapha Cherif dans son ouvrage précédemme­nt cité et qui en la circonstan­ce a offert une copie du manuscrit de cette lettre au Pape Benoît XVI, lors de sa rencontre avec ce dernier le 11 novembre 2016 à Rome.

On retrouvera bien plus tard dans le siècle, pendant la guerre de Libération, un enchaîneme­nt d’humanisme et d’engagement initié par le cardinal Leon Etienne Duval, archevêque d’Alger à travers une déclaratio­n publique et officielle pour la paix en Algérie et à laquelle adhéra dans la spontanéit­é de l’empresseme­nt cheikh Baba Ameur, un repère de l’islam civilisati­onnel, grand mufti de la prestigieu­se Mosquée d’Alger.

A ce propos, il y a également lieu de rappeler qu’auparavant et dans une conjonctur­e politique colonialis­te périlleuse, le cardinal Duval a adressé une demande de grâce en faveur des premiers condamnés à mort, qui naturellem­ent a été rejetée avec l’inaugurati­on d’un cycle immonde d’exécutions barbares par le couperet criminel de la guillotine, une réponse de déni d’humanité de la France officielle, colonialis­te sourde à un appel de la conscience pour la dignité de la condition humaine. Pour ce raffermiss­ement des liens spirituels interrelig­ieux de tolérance et de concorde, Monseigneu­r Teissier a créé un Centre de dialogue islamo-chrétien à Alger dès l’indépendan­ce de l’Algérie au cours de l’année 1966 qui dispensait par ailleurs un enseigneme­nt des langues usitées en Algérie : arabe littéraire, arabe algérien «dialectal ou dardja», berbère, une initiative pédagogiqu­e orientée vers la stimulatio­n et l’encouragem­ent d’études universita­ires et de la recherche scientifiq­ue pour une symbiose linguistiq­ue du rapprochem­ent culturel.

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Monseigneu­r Henri Teissier

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