Comme un air de vacances à l’APN...
●● A une année et demie de la fin de cette 8e législature, la Chambre basse du Parlement, dont la composante actuelle est qualifiée «d’illégitime», de «produit de la fraude» et de «l’argent sale», est quasiment vide.
Un air de vacances à l’Assemblée populaire nationale (APN) ! Les députés ont massivement déserté l’hémicycle Zighout Youcef. Il semblerait que l’annonce des élections législatives anticipées pèse sur les parlementaires qui savent, désormais, qu’ils n’iront, fort probablement, pas au bout de leur mandat entamé en 2017. A une année et demie de la fin de cette 8e législature, la Chambre basse du Parlement, dont la composante actuelle est qualifiée «d’illégitime», de «produit de la fraude» et de «l’argent sale», est quasiment vide. C’est ce que nous avons vérifié à l’occasion de notre virée hier à l’APN. Les travées de l’Assemblée sont affreusement vides et sombres et les salles de conférences sont désertes. Seuls quelques députés, présidents des commissions et une partie des fonctionnaires de l’administration continuent à entretenir un semblant de fonctionnement de cette institution législative.
Une institution abandonnée déjà par une partie de ses membres, en l’occurrence des élus de certains partis de l’opposition qui ont choisi de démissionner ou de geler leurs activités. Un service minimum est assuré par les équipes administratives, réduites elles aussi en raison de la situation sanitaire. Le flou autour de la situation politique et les intentions du pouvoir pèse aussi sur la qualité du travail des députés, notamment ceux de la majorité, qui ne signent leurs présences que pour avaliser la panoplie de textes législatifs soumis par l’Exécutif. Et sans vrai débat, même si ces projets de loi ont un impact considérable sur l’avenir des Algériens.
Les représentants des différents partis siégeant dans cette Assemblée n’ont actuellement à l’esprit que des questions existentielles… pour eux, bien sûr. Y aura-t-il un remaniement ministériel ? La dissolution de l’Assemblée est-elle concrètement au menu du pouvoir ? Y aura-t-il des élections législatives anticipées ? Le nouveau projet portant révision du régime électoral sera-til soumis aux partis politiques et à la société pour enrichissement ? Ce sont autant de questions qui les taraudent pour le moment.
Les parlementaires et même les fonctionnaires rencontrés dans les couloirs de l’APN ou au niveau des locaux de leurs groupes se demandent si réellement la dissolution de l’Assemblée est à l’ordre du jour. «On en parle depuis plusieurs mois. Mais deux mois après l’adoption du projet de révision de la Constitution, il n’en est rien. Concrètement, est-ce que le Président va dissoudre cette Assemblée ?» s’interroge un député du Mouvement pour la société et la paix (MSP). A cette interrogation, aucun élu n’était en mesure de répondre. Mais ils sont tous en état d’alerte ! Lakhdar Benkhalef du FJD, occupé à rédiger une question écrite à l’adresse du ministre des Affaires étrangères, se dit persuadé que cette législature ne prendra fin qu’avec les élections législatives qui seront programmées, selon lui, vers la fin juin prochain !
Le député rappelle, à ce sujet, le contenu de l’article 129 de la Constitution qui stipule que «le président de la République peut décider de la dissolution de l’Assemblée populaire nationale ou d’élections législatives anticipées, après consultations du président de l’APN, du président du Conseil de la nation et du Premier ministre». Dans ce cas, il est précisé que cette dissolution n’est rendue possible que «si les agissements de la majorité sont en contradiction avec la Constitution
et les lois de la République». Mais dans la pratique, personne ne pourrait s’opposer à la volonté du président de la République, s’il venait à décider de dissoudre l’APN.
Mais depuis l’avènement du hirak, un certain 22 février 2019, des voix se sont élevées, réclamant la dissolution du Parlement. Des hommes politiques, des leaders de partis et des observateurs ont revendiqué haut et fort la tenue d’élections législatives anticipées. Aujourd’hui, rien n’est sûr ! Les députés sont dans l’expectative. Ils attendent tous le rapport de la commission Laraba sur le projet de révision du régime électoral et s’interrogent sur les raisons de ce retard. «Le projet devait être finalisé et rendu public à la fin de l’année 2020. Ce retard est-il dû à un désaccord sur le mode du scrutin ? Ou sur le timing ?», se demande un élu FLN qui, lui, s’oppose à la dissolution de l’Assemblée. Pour lui, il est illogique de faire partir des députés de l’APN pour conforter ceux qui les accusent de corruption et de fraude. «La dissolution de l’APN est une erreur», tranche son collègue du RND qui veut à tout prix finir son mandat ! Concernant le code électoral, les députés pensent que le projet atterrira à l’APN vers le 15 ou le 20 janvier, et ce, après son adoption par le gouvernement et le Conseil de ministres. «Je pense que le projet sera soumis uniquement à un débat en plénière. Une fois cette opération achevée, le Président convoquera le corps électoral vers la fin février et les élections auront lieu fin juin», croit savoir Lakhdar Benkhalef. Les députés pensent qu’un remaniement ministériel est imminent au regard des notes négatives distribuées, selon eux, par M. Tebboune à certains ministres lors du dernier Conseil.