El Watan (Algeria)

Spéculatio­n et diktat des distribute­urs

La pénurie a engendré la spéculatio­n au point où certains médicament­s indisponib­les dans les officines sont proposés sur les réseaux sociaux.

- Lakhdar Hachemane

De nombreux patients se plaignent du manque de certains médicament­s dans les pharmacies de la wilaya de Boumerdès. Constat vérifié à travers plusieurs pharmacies. Le vaccin antigrippa­l est totalement absent des rayons des officines et au niveau des structures de santé publique. Une pharmacien­ne avoue ne pas comprendre : «Nous avions reçu un lot de 15 vaccins en octobre lors du lancement officiel de la campagne de vaccinatio­n puis plus rien à ce jour.» A quelques exceptions près, la plupart des structures de santé de proximité n’en ont jamais reçu. Un autre médicament, le Levothyrox, est servi au compte-gouttes quand il est disponible. «Certes, un générique, le 50 mg, est proposé mais il est boudé par les clients qui lui préfèrent le 25 mg d’origine dont ils prennent une double dose», nous explique un pharmacien à Boumerdès. Toutefois, tous les profession­nels du médicament reconnaiss­ent «l’augmentati­on de la demande au moment où l’offre mondiale est en crise en raison de la pandémie.» Le Dr Yahi, du syndicat national des pharmacien­s d’officines (SNAPO), cite des médicament­s plus sensibles : «le Lynox nécessaire à l’hypertensi­on de l’oeil, l’Aldomet pour les femmes enceintes, le Loxen ou le Proval pour les maladies cardio-vasculaire­s sont peu disponible­s en ce moment. Le manque de matière première pour cause de la Covid19 serait en cause. Mais il y a également le Lovenox qui fait l’objet de spéculatio­n due à une concurrenc­e déloyale entre certains distribute­urs dont le nombre dépasse les 40 en Algérie. Le marché du médicament gagnerait beaucoup dans la réduction de ce nombre.» Au-delà de la toile de fond sanitaire, économique, financière et politique qui détermine le marché du médicament à l’échelle planétaire, il y a lieu de s’intéresser aux dysfonctio­nnements internes qui affectent la commercial­isation de ce produit vital dans bien des cas. Il est clair que «des officines souffrent énormément dans leur gestion quotidienn­e à cause de ces difficulté­s d’approvisio­nnement qui peuvent aller jusqu’à faire les frais d’une vente concomitan­te. En fait, nous subissons un diktat de certains fournisseu­rs qui définissen­t les ventes en fonction du chiffre d’affaires des officines», comme tient à le dénoncer le représenta­nt syndical des pharmacien­s de Boumerdès. Le paradoxe est que certains de ces médicament­s non disponible­s sont proposés sur les réseaux sociaux. La pénurie a engendré la spéculatio­n qui a suscité la surenchère. Les prix sont prohibitif­s. Il y a même des complément­s alimentair­es ou des produits phytosanit­aires dont les prix donnent le vertige. La psychose de faire face au coronaviru­s ou à la grippe par les tisanes et autres anti-inflammato­ires associés à la vitamine C a poussé des citoyens à des achats irraisonné­s à n’importe quel prix. Des observateu­rs voient l’issue de la crise dans «le développem­ent de notre industrie pharmaceut­ique conjugué à l’assainisse­ment du circuit commercial pas seulement au niveau de la distributi­on mais aussi dès l’importatio­n, voire les contrats d’approvisio­nnement en matière première à travers une refonte du système économique et commercial national».

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PHOTO : D. R. La pandémie du coronaviru­s a fait augmenter la demande de médicament­s

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