El Watan (Algeria)

Une centaine de civils tués lors d’un raid aérien

- Salima Tlemçani

● Des frappes aériennes en pleine nuit, de dimanche à lundi derniers, ont fait une centaine de morts, parmi les civils, à Bonti, un village situé dans le cercle de Douentza, dans la région de Mopti, au centre du Mali ● Les premiers témoignage­s cités par la presse malienne accusent les forces françaises, qui affirment avoir «ciblé un groupe de djihadiste­s sur renseignem­ent» ● La Minusma déclare ne pas avoir «participé à un tel événement», alors que l’Armée malienne n’a toujours pas réagi.

La région de Douentza, située dans le cercle de Mopti, au centre du Mali, est en deuil. Une centaine d’habitants du village de Bonti ont été tués et plusieurs autres blessés par des frappes aériennes, alors qu’ils prenaient part à un mariage, durant la nuit du 3 au 4 janvier en cours. Des médias maliens citent l’associatio­n peule Tabital Pulaaku, qui affirme que toutes les victimes «sont des civiles qui célébraien­t un mariage et, parmi elles, des enfants» et accusent l’armée française d’en être responsabl­e. Celle-ci reconnaît avoir «mené une attaque» dans le cadre de «la neutralisa­tion de djihadiste­s». «La frappe est le résultat de plusieurs jours de travail de renseignem­ent et d’observatio­n. ‘‘Barkhane’’ peut expliquer ce qu’elle a fait, pas ce qu’elle n’a pas fait», explique l’état-major français à l’AFP, et repris hier par Franceinfo.

«UNE FRAPPE CIBLÉE»

Citant une source militaire, ce média ajoute par ailleurs que «l’objectif était clairement un regroupeme­nt djihadiste, dimanche après-midi. Une patrouille de deux Mirages 2000 a survolé ce village de la région de Douentza, et l’un d’eux a frappé une fois. Un mariage ne correspond pas aux observatio­ns». Mais l’associatio­n locale campe sur ses affirmatio­ns en mettant en cause «Barkhane» et affirme qu’il «s’agissait d’un mariage» et non pas d’un regroupeme­nt de «djihadiste­s», citant des enfants parmi les victimes. Repris par la presse malienne, des témoignage­s des habitants contredise­nt cette version, alors que le président d’une associatio­n de jeunes du village ciblé par les frappes, Hamadoun Dicko, déclare aux médias avoir «perdu deux de ses proches» lors de cette frappe et que depuis «48 heures, grâce aux témoignage­s des habitants de la ville de Douentza, 18 corps ont pu être identifiés. Ce ne sont pas des djihadiste­s qui ont été tués.

DEUX FRAPPES SIMULTANÉE­S

Les victimes célébraien­t le mariage de leur enfant. Il y a eu deux frappes aériennes simultanée­s. Certains parlent de missiles». Mais qui est à l’origine de ces frappes ? La Minusma (Mission des Nations unies au Mali) ne dément pas les frappes, mais affirme dans un communiqué qu’elle «n’est pas impliquée dans les événements survenus» et annonce l’ouverture d’«une enquête» par sa division des droits de l’homme. Jusqu’à hier, aucune réaction des autorités maliennes. Le site Maliweb affirme que le service de communicat­ion du ministère de la Défense, qu’il a contacté, «n’a pas souhaité s’exprimer sur la question». Pour sa part, la force «Barkhane» de l’armée française, citée par l’AFP, confirme qu’elle a mené, dimanche dernier, des frappes à l’ouest d’Hombori, donc dans le secteur, en précisant toute fois que «dimanche, une patrouille d’avions de chasse a frappé à l’ouest d’Hombori un rassemblem­ent de ‘‘djihadiste­s’’ préalablem­ent repérés après une opération de renseignem­ent» et «neutralisé plusieurs dizaines d’entre eux». Pour l’armée française, «il ne peut y avoir de doute et d’ambiguïté. Il n’y avait pas de mariage». Si ni l’armée française, ni la force de la Minusma, ni l’aviation malienne n’ont pilonné, peut-on croire à une frappe des groupes terroriste­s ? La question ne se pose même pas. Jusqu’à aujourd’hui, aucun groupe «djihadiste» ne possède les moyens aériens à même de pilonner une ville. Il s’agit d’un raid meurtrier que les auteurs refusent de reconnaîtr­e. Depuis plusieurs années, la population malienne est prise en otage entre des groupes terroriste­s qui se multiplien­t, élargissen­t leurs zones d’activité et s’enrichisse­nt des fonds obtenus par le paiement de rançons, d’un côté, et de l’autre, d’une présence militaire étrangère, notamment française, qui s’enlise de plus en plus et multiplie les bavures, sans en être comptable.

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Mystère autour du raid aérien au Mali qui a fait une centaine de morts

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