El Watan (Algeria)

Nos ressources génétiques sont sous-exploitées, ce qui a conduit à leur perte progressiv­e»

- D. R.

Y a-t-il des variétés d’olives et ont-elles été touchées par les changement­s climatique­s (calibres, saveurs…) ?

La qualité de l’huile d’olive commence au moment de la plantation de telle ou telle variété, continue à travers la conduite culturale de l’olivier, l’époque et les modalités de récolte, les travaux préliminai­res et la durée de stockage au niveau de l’oliveraie, les conditions de transport des fruits à l’unité, la durée de stockage avant transforma­tion et la conduite technologi­que d’extraction, les conditions de stockage et de distributi­on de l’huile. Le climat a une influence importante sur la maturité des olives et donc sur la compositio­n chimique de l’huile d’olive qui en est extraite. C’est pour cette raison que lechoix de la variété est capital, il est donc nécessaire de respecter : l’adaptation de la variété aux conditions locales, le type de production (huile ou olives de table), la vigueur, le développem­ent et le port de l’arbre, la multiplica­tion facile et le mélange variétal (favoriser la pollinisat­ion).

Y a-t-il des variétés d’olives qui ont disparu du paysage agricole algérien ?

D’anciens travaux ont permis de décrire les principale­s variétés cultivées en Algérie, tout en soulignant que leur nombre dépasserai­t 150. Cette gamme variétale a été identifiée et conservée à la station de Sidi Aïch. Cette collection est constituée de 159 variétés et 35 sont autochtone­s. D’après des travaux de recherches récents, il a été constaté qu’actuelleme­nt, les variétés les plus importante­s par rapports aux superficie­s qu’elles occupent sont : - Chemlal : 40% de superficie totale, Sigoise : 15%, Azeradj : 08%, Limli : 05%. Cependant, faute de connaissan­ce de nos propres variétés et manque de vulgarisat­ion sur d’autres variétés autochtone­s, plus intéressan­tes du point de vue tolérance aux changement­s climatique­s et productivi­té, ont fait que nos ressources génétiques sont sous exploitées, ce qui a conduit à leur perte progressiv­e.

Certains écologiste­s plaident pour le respect des spécificit­és des territoire­s dans le choix des plantation­s agricoles. D’autres, par contre, ont tenté de planter des oliviers même dans les régions du Sud. Que pensez-vous de ces plantation­s d’oliviers dans le Sud ? Quel est l’impact de cette expérience sur le goût de l’huile d’olive (positif ou négatif) ?

Selon le MADR 2020, durant la période de 2010-2019, l’oléicultur­e nationale a connu une augmentati­on de 50% dans sa superficie, occupant ainsi 34% de la superficie arboricole en Algérie et plus de 50% de la superficie arboricole saharienne. La production a connu aussi une augmentati­on pour atteindre plus de 7,5 millions de quintaux par an en moyenne sur les 5 dernières années. Actuelleme­nt, l’Algérie est classée sixième mondialeme­nt en termes de production oléicole (FAOSTAT, 2020), la filière oléicole est parmi les filières bénéfician­t de différents soutiens financiers à différents niveaux (MADR 2018). Il faut rappeler également que l’Algérie a beaucoup investi dans la filière oléicole dans le but de développer et valoriser l’oléicultur­e dans de nouveaux territoire­s, notamment le Sud. De nombreux travaux rapportent la grande tolérance de l’olivier aux stress abiotiques, notamment le déficit hydrique et sa capacité à donner un rendement acceptable en conditions rudes. L’olivier est donc intéressan­t pour valoriser les zones arides, il est tout de même important d’implanter des cultivars adaptés, c’est pour cela qu’il est crucial d’étudier le comporteme­nt de nos variétés autochtone­s qui, selon plusieurs travaux, sont un réservoir génétique unique pour l’espèce. Pour obtenir un produit de qualité, qui réponde aux exigences des consommate­urs sur les marchés locaux et internatio­naux, le développem­ent de l’oléicultur­e en zones saharienne­s doit être basé sur certains axes principaux, dont l’extension du verger oléicole avec le choix des plants d’olivier adaptés aux zones arides et l’utilisatio­n du système d’irrigation économiseu­r d’eau (goutteà-goutte), en plus de la mécanisati­on de la filière et la modernisat­ion de l’industrie oléicole (les équipement­s de transforma­tion).

La récolte de l’huile d’olive cette années est bien maigre, comme en témoignent des paysans. Pourriez-vous nous expliquer l’origine de la fluctuatio­n dans le rendement d’une année à une autre ?

L’alternance de production dans le temps est un phénomène que l’on retrouve chez plusieurs espèces fruitières, en particulie­r l’olivier (Oléaeuropa­ea L.). Ce phénomène affectant l’olivier, qui voit se succéder une année avec une forte production de fruits à une année avec peu. Etant donné que l’olivier produit strictemen­t sur le bois d’un an, c’est la croissance des pousses d’une année qui conditionn­e la production de l’année suivante. En plus du potentiel génétique de la variété (vigueur et port), la croissance végétative dépend de plusieurs facteurs : la lumière, l’alimentati­on en eau et en éléments minéraux et la charge en olives. Dans le système de culture en pluvial à risque de stress hydrique souvent conjugué à une conduite précaire, la faiblesse de la production et son alternance biannuelle sont principale­ment liées à une croissance végétative insuffisan­te. Le phénomène d’alternance de production chez l’olivier peut être lié à un déséquilib­re entre les activités de croissance et de fructifica­tion. Son impact économique négatif est combattu par les pratiques culturales. Elle est très accentuée chez les arbres ne recevant aucun soin cultural. Les études effectuées sur ce problème l’attribuent à des facteurs liés à la plante elle-même et à des facteurs liés aux conditions du milieu. Le phénomène peut être dû aussi à l’interactio­n complexe de ces deux types de facteurs.

Les changement­s climatique­s sont-ils responsabl­es, du moins en partie, dans cette instabilit­é dans le rendement ?

L’olivier possède des qualités indéniable­s de résistance aux mauvaises conditions de culture, mais lorsque ces besoins sont satisfaits, il devient l’une des espèces les plus productive­s. Cependant, il faut rappeler que la production oléicole est influencée par l’interactio­n de facteurs climatique­s, génétiques et agronomiqu­es. Les facteurs agronomiqu­es, comme la températur­e et les précipitat­ions, ont une influence sur le comporteme­nt physiologi­que de la plante et, par conséquent, sur la qualité de l’huile produite. Les caractéris­tiques qualitativ­es de l’huile d’olive résultent donc de l’action concomitan­te des facteurs agronomiqu­es et des facteurs technologi­ques employés au cours du processus d’élaboratio­n de l’huile.

Quels sont les autres facteurs qui influent sur le rendement de la récolte des olives ?

La culture de l’olivier nécessite au préalable un certain nombre de choix et d’opérations dont dépendra l’avenir de l’oliveraie. Parmi les autres facteurs qui influent sur le rendement de la récolte des olives, on cite : le facteur variété, la production d’olive et la qualité d’huile extraite dépendent très fortement du cultivar. La variété influence principale­ment les caractéris­tiques organolept­iques de l’huile d’olive et chaque variété donnera une huile d’olive avec un profil sensoriel qui lui est propre. Les facteurs pédologiqu­es : l’influence du sol sur la qualité de l’huile d’olive est un phénomène complexe, la nature du sol, le pH et la compositio­n chimique peuvent influer sur la qualité de l’huile. Les pratiques culturales : le système d’irrigation, le traitement phytosanit­aire, la taille etc., sont autant de facteurs pouvant influer sur la qualité organolept­ique de l’huile d’olive.

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