El Watan (Algeria)

Des discussion­s et des zones d’ombre

- A. Benyahia

Les déclaratio­ns du directeur général du commerce extérieur au ministère du Commerce, Khaled Bouchelagh­em, n’ont pas manqué de créer la surprise lorsqu’il a affirmé, jeudi dernier, une première, qu’«en septembre 2020, ces taxes (douanières, ndlr) ont été totalement démantelée­s en vue de permettre aux entreprise­s algérienne­s de renforcer les capacités concurrent­ielles de leurs produits avec ceux européens». Et de préciser : «Depuis septembre dernier, tous les produits industriel­s importés depuis les Etats de l’UE et inscrits dans l’accord sont soumis au démantèlem­ent tarifaire à condition qu’ils comportent le certificat d’origine.»

Voilà en effet qui ne manque pas de susciter étonnement et interrogat­ions autour d’une question que l’opinion considère comme étant objet d’un «différend» qui est toujours au stade des discussion­s avec l’Union européenne.

L’UE s’est en effet plaint publiqueme­nt de ce que l’Algérie n’a pas respecté son engagement relatif à la mise en oeuvre de la zone de libre-échange en septembre 2020 (prévu initialeme­nt en 2017) contenue dans l’accord d’associatio­n signé en 2005. Un 12e conseil d’associatio­n a pu d’ailleurs avoir lieu durant la première semaine de décembre dernier, au cours duquel l’Union européenne et l’Algérie ont tenté de dépasser cet écueil. A cette occasion, la Commission européenne a donc transmis une propositio­n visant à résoudre le «différend» lié justement à la mise en oeuvre de cet accord dans son volet commercial. Il y avait là en effet matière à rapprocher les points de vue dont la divergence était évidente, à partir du moment que les Européens n’ont pas apprécié qu’Alger décide d’agir en solo sans en informer son partenaire. L’ambassadeu­r et chef de la délégation de l’Union européenne à Alger a, faut-il le rappeler, dans un entretien à El Watan le 10 décembre 2020, clairement fait état de cet agacement en des termes diplomatiq­ues. «Je ne veux pas trop entrer dans les détails parce que les consultati­ons se poursuiven­t, mais je pense que nous avons progressé et peut-être que, quelque part, notre principale préoccupat­ion, c’est que nous souhaitons pouvoir parler avec notre partenaire algérien et être consultés sur les mesures prises au lieu de les apprendre ex post dans les journaux», a-t-il dit. Aujourd’hui, le DG du commerce extérieur, selon l’APS, a affirmé que cet accord d’associatio­n comporte le démantèlem­ent tarifaire graduel à l’importatio­n jusqu’à 2021 pour atteindre 0% des taxes douanières. S’agit-il ainsi des résultats des dernières discussion­s avec l’UE qui n’ont pas encore été portées à la connaissan­ce de l’opinion à cause de l’absence de communicat­ion du gouverneme­nt ? La question reste posée.

Tandis que la gestion de ce dossier pèche par un flagrant déficit de transparen­ce. Ni le gouverneme­nt, ni les ministres concernés par la question, ni encore les experts n’ont fourni la moindre explicatio­n sur la gestion de ce dossier qui touche, certes, aux questions économique­s d’importance, mais aussi à celles non moins politiques. Cependant, Bouchelagh­em a affirmé, qu’outre les produits industriel­s qui sont soumis à la suppressio­n des droits de douane avec la mise en place de la zone de libreéchan­ge, dont il reste d’ailleurs à savoir si la date d’entrée en vigueur a été arrêtée en accord avec l’EU, il est question aussi des produits agricoles et de la richesse animalière. Ceux-là sont scindés en deux types, dont les produits non concernés par le démantèlem­ent des barrières tarifaires et ceux pour lesquels des tarifs douaniers bas sont appliqués, a-t-il ajouté. Et pour mieux souligner une des spécificit­és de cet accord, il précisera que le tarif douanier des marchandis­es provenant des pays de l’UE s’élève à 15%, contre un tarif douanier de 30% pour les autres pays à travers le monde. S’agissant de l’accord avec l’UE, Bouchelagh­em assure qu’il comporte le démantèlem­ent tarifaire graduel à l’importatio­n jusqu’à 2021 pour atteindre 0% des taxes douanières. En revanche, il précise que les dispositio­ns de l’accord d’associatio­n Algérie-UE permettent, selon l’APS, aux deux parties de recourir à des mesures de sauvegarde automatiqu­es, en ce sens que les opérateurs lésés, s’ils constatent une véritable menace sur n’importe quelle filière de la production nationale, peuvent introduire une demande collective pour protéger un quelconque produit concurrenc­é par un autre étranger similaire, laquelle demande doit être établie par au moins 50% des opérateurs dans une quelconque filière de production.

En plus des DAPS (Droit additionne­l provisoire de sauvegarde), une des mesures protection­nistes du produit qui a une durée de 5 ans, un droit qui vient s’ajouter, a-t-il dit, à la taxe douanière et à la TVA, les mesures de sauvegarde du produit national comptent également d’autres clauses contre l’inondation du marché. Le responsabl­e du commerce extérieur veut ainsi rassurer sur le risque lié à l’inondation du marché par des marchandis­es. A l’instar, par exemple, des produits industriel­s qui seront, avec la ZLE avec l’UE, importés en masse et seront susceptibl­es de concurrenc­er, par exemple, notre très fragile industrie et qui prend l’eau de toutes parts, à l’heure où les pouvoirs publics songent déjà à la manière de la mettre en réanimatio­n. C’est ainsi qu’il parlera des mesures compensato­ires et d’autres exceptionn­elles en faveur des industries nouvelleme­nt créées ou certains secteurs objets de restructur­ation, outre le nouveau système de démantèlem­ent tarifaire relatif à l’accord d’associatio­n Algérie-UE.

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