El Watan (Algeria)

UNE PROFONDE ASPIRATION AU CHANGEMENT

Deux ans après, quels sont les acquis arrachés par les Algériens ? L’espoir est-il permis pour l’avenir ? Le débat sur ces questions est lancé depuis plusieurs mois déjà.

- Madjid Makedhi

Deux ans. C’est le deuxième anniversai­re du mouvement populaire, appelé communémen­t hirak, qui a ébranlé, un certain 22 février 2019, les fondements d’un régime, dont les tenants se croyaient éternels. Ce jour-là, des millions d’Algériens, dans un éveil citoyen qui a ébloui le monde entier, ont déferlé sur les rues du pays pour réclamer un changement radical du système, l’édificatio­n d’un Etat de droit et l’instaurati­on d’une véritable démocratie.

Deux ans après, quels sont les acquis arrachés par les Algériens ? L’espoir est-il permis pour l’avenir ? Le débat sur ces questions est lancé depuis plusieurs mois déjà. Il y a d’abord un point qui fait consensus : le hirak a fait barrage à un mandat de trop au profit d’un Président impotent. En effet, intransige­ants et faisant preuve d’un haut degré de maturité politique, les manifestan­ts ont réussi à déjouer les manoeuvres du pouvoir de l’époque qui avait tenté de jouer la carte du temps en proposant la prorogatio­n du 4e mandat, avant de suggérer une période de transition. Peine perdue. Le hirak a maintenu la pression et contraint les tenants du pouvoir à céder. La présidenti­elle programmée pour le 18 avril de la même année a été annulée et le président Abdelaziz Bouteflika a été poussé à la porte de sortie, après vingt interminab­les années d’un règne sans partage. Mais ce que les Algériens croyaient être le début d’un processus de démocratis­ation du pays s’est transformé en un véritable

cauchemar. La victoire est tronquée.

Dès la confirmati­on de la démission du chef de l’Etat, les tenants du vrai pouvoir, comme l’affirment de nombreux acteurs politiques, se sont mis en scène pour tracer leurs propres règles de jeu politique.

Faisant fi de toutes les initiative­s des partis d’opposition et des organisati­ons de la société civile, ils imposent alors un passage «obligé» par l’élection présidenti­elle, au nom d’une «solution constituti­onnelle». Et ce n’est pas tout. Malgré le caractère pacifique du mouvement, les tenants du pouvoir n’ont pas hésité à enclencher la machine répressive. On a assisté alors à une vague d’arrestatio­ns et d’emprisonne­ments des militants politiques et des activistes du hirak. La cible était particuliè­rement les acteurs les plus en vue : le moudjahid Lakhdar Bouregaa (décédé en 2020 des suites de la Covid-19), Karim Tabbou, Fodil Boumala, des militants de l’associatio­n RAJ, Samir Belarbi, et des porteurs de l’emblème amazigh… Des milliers de manifestan­ts ont fait l’objet d’arrestatio­n, et des centaines ont été présentés devant la justice et poursuivis pour divers chefs d’accusation. Ainsi, le hirak qui aspirait à plus de liberté est réduit, des mois durant, à réclamer la libération des détenus d’opinion.

Parallèlem­ent à la campagne répressive, le pouvoir a renforcé son dispositif législatif limitant davantage les espaces de liberté. C’est ainsi que les réunions publiques, la libre expression, les manifestat­ions sont carrément remises en cause. Les médias sont également fermés devant toutes les voix discordant­es, revenant ainsi aux anciennes pratiques ayant prévalu par le passé. Et la situation ne fait qu’empirer. Mais l’aspiration au changement est toujours présente. Elle ne fait que se renforcer…

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Le hirak a maintenu la pression et contraint les tenants du pouvoir à céder

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