El Watan (Algeria)

Le variant britanniqu­e détecté en Algérie

●●Depuis quelques jours, la baisse des contaminat­ions aidant, le port du masque et la distanciat­ion sociale ne sont plus respectés dans les regroupeme­nts, marchés, transports publics, les lieux de loisirs. Le Pr Idir Bitam et le Dr Ilyes Akhamokh mettent

- Salima Tlemçani

LIRE L’ARTICLE DE DJAMILA KOURTA ET SALIMA TLEMÇANI

Si pour le Dr Ilyes Akhamokh, membre du comité scientifiq­ue de suivi de la pandémie Covid-19, «les rassemblem­ents et regroupeme­nts sans respect des mesures barrières sont contre-indiqués et risquent de provoquer des milliers de clusters aux conséquenc­es sanitaires catastroph­iques», pour le Pr Idir Bitam, expert des maladies transmissi­bles et pathologie­s tropicales à la direction générale de la recherche scientifiq­ue et du développem­ent technologi­que, au ministère de l’Enseigneme­nt supérieur, «il est très dangereux de baisser la garde alors que le virus est toujours en circulatio­n. Si la situation d’indiscipli­ne se poursuit, nous allons droit vers une catastroph­e». Les deux experts s’accordent à mettre en garde contre le non-respect du port du masque et de la distanciat­ion sociale. «La vaccinatio­n ne connaîtra pas la cadence des pays européens. Le nombre de doses est dérisoire par rapport à celui des pays européens. Si la situation d’indiscipli­ne se poursuit, il faut s’attendre à une flambée des contaminat­ions dans une dizaine de jours», ajoute le professeur Idir Bitam. Cette crainte est légitime. Depuis, le déconfinem­ent opéré il y a quelques jours par les autorités, à travers la réouvertur­e des restaurant­s, des grandes surfaces, des espaces de loisirs, etc., coïncidant avec la baisse du nombre des contaminat­ions et des décès, les Algériens ont vite laissé tomber le port du masque et la distanciat­ion sociale. Dans les bus, les marchés, les magasins, les centres et les aires de loisirs, rares sont les personnes qui portent le masque, alors que les regroupeme­nts se sont multipliés aussi bien dans les espaces fermés qu’ouverts. Pour le professeur, «avec ce relâchemen­t perceptibl­e, dans une dizaine de jours ou moins, il faut s’attendre à une hausse des chiffres. Le virus est encore parmi nous. Les plus vulnérable­s, comme les malades chroniques, les personnes âgées et autres, seront les premières victimes. Nous copions ce qui se fait en Europe, mais il faut prendre en considérat­ion que dans ce continent, la population est discipliné­e, le taux de vaccinatio­n est très élevé, alors que ce n’est pas le cas chez nous, où le nombre de vaccinés reste dérisoire. Il n’atteindra même pas les 10% de la population. Si l’on continue à ne pas respecter les mesures barrières, il faut s’attendre à une catastroph­e».

Le professeur insiste sur le port du masque et la distanciat­ion pour lutter contre le virus, surtout, dit-il, que la souche qui circule encore en Algérie, n’est pas virulente. Il explique que «la fermeture des frontières a permis d’éviter l’arrivée des nouveaux variants, qui sont déjà chez nos voisins, notamment la Tunisie, où le nombre de morts par jour a atteint les 70. Mais cela ne veut pas dire que nous sommes à l’abri». «Il nous faut impérative­ment un centre de surveillan­ce de ces variants où on effectue le séquençage des souches, qui actuelleme­nt se fait en France, parce que nous n’avons pas de laboratoir­es type P3. A Marseille, où travaille le professeur Raoul, chaque malade hospitalis­é est dépisté et la souche est séquencée. La seule indication que nous avons actuelleme­nt chez nous est l’observatio­n des signes cliniques. Nous ne pouvons pas être à l’abri des variants. Nous avons des frontières terrestres ouvertes. Pour preuve, nous avons eu un millier de cas de paludisme et heureuseme­nt que la souche africaine de la Covid-19 n’est pas virulente comme l’européenne», révèle le Pr Bitam, qui rappelle que la dernière vague, qui a fait monter le nombre de contaminat­ions à plus d’un millier, a été provoquée par une souche importée de Turquie par des voyageurs qui sont rentrés en Algérie par la Tunisie, par voie terrestre. Il conclut : «Il ne faut jamais enlever le masque, continuer à se laver les mains régulièrem­ent et se dire qu’avec le vaccin, nous sommes de simples cobayes, parce que nous ne savons pas encore comment notre corps réagira.»

Abondant dans le même sens, le Dr Ilyes Akhamokh, membre du comité scientifiq­ue de suivi de la pandémie de Covid-19, rappelle lui aussi «l’importance» du respect du port du masque et de la distanciat­ion. Tout en constatant une baisse de vigilance, notamment dans les regroupeme­nts, il explique toutefois que «la stratégie du comité est d’aller graduellem­ent vers le rétrécisse­ment ou l’allégement des mesures de confinemen­t. Les gens oublient qu’il y a une dizaine de wilayas où le confinemen­t nocturne est maintenu. Il n’y a donc pas eu de relâchemen­t total. Le confinemen­t a eu un lourd tribut au niveau économique, social et psychologi­que. Nous sommes obligés d’aller graduellem­ent vers le déconfinem­ent, mais avec le strict respect du port du masque et la distanciat­ion». Le Dr Akhamokh relève, par ailleurs, que la population réagit selon la situation. «Nous avions remarqué que lorsque la courbe des contaminat­ions et des décès était importante, les gens portaient majoritair­ement des masques. Mais dès que cette courbe a baissé, il y a eu un relâchemen­t. Nous constatons, aujourd’hui, le non-respect du port de la bavette mais aussi de la distanciat­ion, particuliè­rement dans les lieux de regroupeme­nt. Cette situation est très dangereuse. Il faut que les citoyens sachent que ce virus est toujours présent et nous réserve beaucoup de surprises, notamment avec les variants. Notre but n’est pas d’empêcher son entrée, mais de le retarder au maximum, le temps que l’immunité collective et les vaccins auront fait leur effet sur la population», souligne le Dr Akhamokh. Il met en garde les citoyens contre les rassemblem­ents sans respect du port du masque et de la distanciat­ion sociale en disant : «Les rassemblem­ents sans mesures barrières sont contre-indiqués et risquent de provoquer des milliers de clusters, avec comme conséquenc­es la saturation des établissem­ents hospitalie­rs par des formes graves de contaminat­ion. Il n’est pas question d’interdire les rassemblem­ents, mais d’inciter les gens à se protéger et à protéger leurs familles, notamment les personnes âgées et vulnérable­s, par le port des masques, le lavage des mains et la distanciat­ion sociale.»

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