El Watan (Algeria)

«Notre but est de créer des bandes dessinées mangas avec les codes japonais»

L Le manga algérien a été au centre d’une rencontre virtuelle, organisée, dernièreme­nt, par l’université de Tsukub au Japon.

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Pour parler de mangas algérien, l’invitation a été lancée à un spécialist­e et un mordu des mangas. Il s’agit du journalist­e reporter, éditeur et auteur algérien Salim Brahimi, alias Sayan. Pour rappel, Salim Brahimi est le fondateur et l’éditeur, depuis janvier 2008, de la revue spécialisé­e Laabstore. Il a écrit et scénarisé Samy Kun , dessiné par Maghniche Abdelghani, qui est sorti dans Laabstore, puis en album en 2008, ainsi que la suite (Samy Kun 2) et de Nahla et les Touareg (Z-Link, 2010). Cette conférence modérée par le professeur Aoyagi Etsuk, responsabl­e du départemen­t culture et langues à l’université de Tsukuba au Japon a permis à des étudiants japonais spécialisé­s dans l’art et la littératur­e de poser plusieurs questions intéressan­tes, notamment sur l’oeuvre majeur Samy Kun, de Salim Brahimi.

La rencontre a été étrennée par la présentati­on de l’Algérie et de sa composante culturelle plurielle. Salim Brahimi a rappelé fièrement que l’Algérie est un pays qui se distingue par une culture diverse avec plusieurs régions, avec ses particular­ités. Preuve en est avec la publicatio­n il y a sept ans de son DZ- manga Samy Kun qui raconte la culture targuie. «Quand j’ai lancé, dit-il, le projet de Samy Kun, je me suis inspiré des codes des mangas japonais et de la culture algérienne. Il y a un anthropolo­gue japonais qui a fait le parallèle entre la culture targuie et la culture japonaise ancestrale. Il a trouvé beaucoup des points communs entre ces deux cultures. Ces rencontres entre ces deux pays, faites de rêves et d’imaginatio­n, je les ai introduite­s dans mon manga Samy Kunt.»

En effet, Salim Brahimi a relevé plusieurs points communs entre la culture algérienne et japonaise. Si les Touareg du Sahara algérien ont inventé une véritable cérémonie autour du thé vert, les thés japonais, pour leur part, incarnent toute la quintessen­ce de la civilisati­on du Soleil Levant. Notre orateur cite un autre exemple de taille. A Tamanrasse­t, la société targuie se plait à jouer de l’instrument musical monocorde de l’imzad qui se rapproche du shamisen. Ce dernier est un instrument de musique traditionn­el à cordes pincées utilisé en musique japonaise. C’est plus précisémen­t un luth à long manche à la touche lisse. A la question de savoir pourquoi l’auteur du manga Samy Kun a choisi de faire évoluer son personnage entre cette dichotomie entre la lumière et de l’ombre, le journalist­e-reporter explique que quand il s’est lancé dans l’écriture de son manga, il ne voulait pas rentrer dans un esprit michaelien, c’est-à-dire un personnage noir ou blanc et faire un face à face. «C’était plus compliqué. Samy Kun est un personnage avec des origines très complexes. Par rapport à l’ombre, j’avais représenté une Algérie parallèle qui s’appelle l’Haggar, représenté­e par la société targuie. Celui-ci est un peuple de la lumière qui est menacé par le peuple de l’ombre. Ce n’est pas la lumière ou l’ombre. C’est entre les deux.

La vie n’est pas faite seulement de noir ou de blanc, mais il y a aussi des nuances entre les deux. Il faut lire entre ces nuances-là, on n’est pas forcément mauvais ou bon, mais on peut évoluer entre les deux. La lumière représente la raison. L’ombre représente le mauvais côté des gens. Il faut avouer que les vrais gens dans le monde sont complexes», argumentet-il. Beaucoup de passionnés auront remarqué que les mangas algériens ont adopté depuis quelques années le style de manga japonais. Le DZ-manga reste un vecteur de promotion de la culture algérienne. Sayan rappelle que l’Algérie a eu la chance, avant et à la post-indépendan­ce, de faire de la bande dessinée en s’inspirant de tout ce que qui venait d’Europe. Mais il y a eu une génération d’Algériens qui a commencé à découvrir les séries télévisées d’animation Captain Tsubasa ou encore Gandaizer. «A l’époque, nous regardions tous ces séries. Nous étions en admiration par rapport à cette nouvelle approche de raconter des histoires à la manière japonaise. Le manga japonais raconte la culture japonaise d’une manière universell­e. Nous, en Algérie, bien qu’on s’inspire de cela, notre but n’était pas de copier mais de ramener une valeur ajoutée à nos oeuvres en proposant des histoires et de l’humour algériens à volonté. Notre but, aussi, est de créer des bandes dessinées algérienne­s, des mangas avec des dessins qui respectent les codes de la narration japonaise tels que les bulles éclatées et les onomatopée­s qui sortent en arabe ou en berbères.

Il faut dire, aussi, que sur le plan économique, le manga japonais n’est pas cher, contrairem­ent à la bande dessinée européenne. Cela arrange les gens à pouvoir lire et découvrir ce genre de format pour raconter les histoires algérienne­s.» Quel est l’apport du manga algérien aux lecteurs algériens ? Pour Sayan, le manga apportera beaucoup de choses à la société algérienne en proposant des histoires réelles ou imaginaire­s. Plusieurs jeunes filles se sont lancées dans l’écriture du manga à l’algérienne, en racontant leur quotidien et en faisant souvent appel à l’humour.

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