Sauver le projet démocratique
Les chantiers politiques ne cessent de se multiplier dans un contexte où le pays se trouve véritablement en équilibre instable. Dans ce climat de tensions exacerbées, l’épidémie de coronavirus est quasiment oubliée, sans savoir si elle a été vaincue ou si on n’a fait que la conjurer. On s’interrogerait presque sur la véracité ou l’opportunité du projet de production locale d’un vaccin anti-Covid, quand on observe le sort réservé au protocole de prévention. Il ne faudra pas compter sur les autorités en place pour réaffirmer les priorités ou les urgences. Elles peuvent par contre sévir, toutes affaires cessantes, au sein du comité scientifique en charge du suivi de la crise sanitaire simplement pour rassurer des instances religieuses au sujet de l’organisation du culte dans les prochaines semaines. Elles ont préalablement réussi la prouesse d’interdire tout en autorisant les regroupements, notamment ceux des partis politiques. Des réunions d’importance sont derechef organisées, entérinant la fin de la distanciation physique et le début des empoignades politiques. Celle organisée ce week-end par le FFS à Tizi Ouzou pose avec un fracas très vite répercuté sur internet la question centrale de la reconstruction des forces démocratiques. Ainsi que celle de la préservation des organisations politiques bâties dans l’adversité pendant des décennies et qu’il est inconcevable de voir disparaître sous prétexte de profondes mutations dans le pays. La réhabilitation des cadres partisans ayant longtemps structuré la société et qui ont constitué de véritables écoles de la démocratie ne manque pas de manifester son caractère urgent à ce moment crucial où la collectivité nationale se retrouve à la croisée des chemins. D’autres formations du camp démocratique sont également traversées de débats très vifs, liés à la consolidation de leur parcours politique face aux projets qui se dessinent dans des discours présentement à très forte «prévalence». Le militant démocrate, qui, à travers les générations, a fait accomplir au pays de nombreuses avancées historiques dans la consécration des droits et des libertés, semble être mis en minorité aujourd’hui. Il est pris pour cible même quand il n’expose pas sa vision et ses ambitions pour le pays. Il est pourtant interpellé quand la subversion s’invite dans la contestation et le rapport de force n’est plus dirigé contre le pouvoir mais contre la dynamique populaire émancipatrice. De même que des médias qui ont payé un lourd tribut dans la défense du droit à l’information et d’expression finissent dans la ligne de mire des nouveaux parrains du changement. Ces derniers tentent de transposer leurs plaies du passé sur une jeunesse qui veut s’inscrire dans l’avenir et relancer leur projet belliqueux mis en échec par les Algériens il y a plus d’un quart de siècle. Le pouvoir a compris que l’«attentat du futur» sera numérique, mais il n’apporte pas la bonne réponse. Celle-ci réside dans le projet résolument démocratique.