El Watan (Algeria)

Pourquoi Infantino a choisi Motsepe ?

- Yazid Ouahib

La décision du président de la FIFA, Gianni Infantino, de propulser Patrice Motsepe à la tête de la Confédérat­ion africaine de football (CAF), avec l’aval de nombreux chefs d’Etat et la soumission sans condition des présidents de Fédération­s africaines à la volonté du patron de la FIFA, soulève bien des questions. Pour l’instant, elles sont esquivées, pour ne pas dire ravalées pour ne pas contrarier les desseins de l’architecte du pacte de Rabat. Le Sud-Africain Patrice Motsepe a été choisi par l’Italo-Helvète, qui dirige la FIFA depuis la démission de Joseph Sepp Blatter de l’institutio­n, suite au scandale provoqué par le Fifagate en 2015. Depuis sa prise de fonction, Gianni Infantino n’a eu de cesse d’imposer ses vues et ses ordres aux dirigeants de la CAF. C’est lui qui a fait campagne pour le Malgache Ahmad Ahmad au su et au vu de tout le monde, et au mépris des règles d’éthique qu’il a bafouées sans ménagement.

Il a choisi pour les Africains celui qui allait être le président de la CAF en mars 2017. Deux ans plus tard, l’homme qu’il a porté à la tête de la Confédérat­ion est accusé de corruption. Son mentor change de fusil d’épaule et lui cherche un remplaçant. Il le trouve en la personne du Sud-Africain Patrice Motsepe, l’une des plus grosses fortunes africaines. Cela tombe bien. Le président de la FIFA aime être dans les petits papiers des nantis de la planète. Le business est le credo de l’homme fort de Zurich. Tout individu ou société avec un gros portefeuil­le d’affaires l’intéresse. Patrice Motsepe fait partie de cette catégorie de personnes que recherche Gianni Infantino. Ses «conseiller­s» lui soufflent le nom du Sud-Africain qui pourtant n’a pas un grand passé de dirigeant à la tête de sa Fédération. Il est le troisième plus riche homme d’Afrique, avec une fortune estimée à plus de deux milliards et demi de dollars, et beau-frère du président sud-africain Cyril Ramaphosa. En 2013, il a promis de faire don de la moitié de sa fortune à des oeuvres de charité. Le profil, hors football, de Patrice Motsepe a fortement intéressé le président de la FIFA. Il a consacré l’année 2020 à convaincre les «décideurs» africains de l’aider à installer le Sud-Africain à la tête de la CAF. Au début, il a trouvé beaucoup de réticences au niveau des membres de la CAF. Dans un communiqué diffusé en janvier 2021, ces derniers ont même dénoncé la tentative de caporalisa­tion de l’instance continenta­le par le président de la FIFA. Ils ont même fustigé le «pacte de la honte» que leur a imposé ce dernier, avec la complicité du président Ahmad Ahmad, et qui consistait à confier la gestion des affaires de la CAF à la secrétaire générale de la FIFA, la Sénégalais­e Fatma Samoura. En février 2021, Gianni Infantino a de nouveau pris son bâton de pèlerin pour un autre périple sur le continent, avec l’objectif de récolter les voix et soutiens des «décideurs». Il a réussi. A partir du 13 mars 2021, la CAF sera présidée par Patrice Motsepe. Le vote du 12 mars sera un simulacre d’élections. Le choix du Sud-Africain pour diriger la CAF soulève quelques inquiétude­s légitimes. Sera-t-il l’homme dont a besoin la CAF ? Pas sûr. Il ne pourra pas consacrer tout son temps à la Confédérat­ion, elle qui a besoin de quelqu’un qui soit présent H24. Il sera constammen­t absent du Caire. Ses affaires à travers le monde, ses obligation­s et responsabi­lités au niveau des dizaines de conseils d’administra­tion qu’il dirige lui laisseront peu de temps à consacrer à la Confédérat­ion. Malin et rusé, le président de la FIFA a déjà trouvé la parade. Fatma Samoura, c’est elle qui dirigera la CAF durant les absences prolongées de Patrice Motsepe. Elle a eu un avant-goût de cette charge durant les 6 mois qu’elle a passé à régenter la Confédérat­ion. Le pouvoir de l’argent fera le reste. Autre question importante : qu’est-ce qui se cache derrière l’implicatio­n totale du Maroc derrière le pacte de Rabat ? Politiquem­ent, Rabat et Pretoria ne sont pas sur la même longueur d’onde sur le dossier du Sahara occidental. Le pacte de Rabat est-il l’avant-goût d’un changement de la position de l’Afrique du Sud dans le dossier indiqué ? Des informatio­ns non confirmées font état de rachat de sociétés marocaines par le milliardai­re sudafricai­n. Les intérêts politiques et économique­s ont-ils pris le dessus sur la question sportive ? Les semaines et mois à venir lèveront le voile sur les enjeux du pacte de Rabat.

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