El Watan (Algeria)

Les femmes moins exposées à la délinquanc­e financière

- Par Naïma Benouaret

Bien que plus d’une d’étude universita­ire ou expertise d’organisati­ons ou d’institutio­ns internatio­nales spécialisé­es, comme l’Office des Nations unies contre les drogues et le crime (ONUDC) ou la Banque mondiale, s’accordent à conclure qu’aucun lien de causalité entre genre et corruption n’a, à ce jour, pu être établi, les femmes restent, néanmoins, moins exposées au phénomène.

Se pratiquant sous différente­s formes, les plus universell­ement répandues étant les détourneme­nts de fonds, concussion, appropriat­ion ou transferts illicites de biens, népotisme, clientélis­me, blanchimen­t d’argent, entrave à la justice…, la corruption n’est, de fait, pas encore à la féminisati­on. A ce constat unanime, une explicatio­n majeure : la persistanc­e, malgré quelques avancées, «des inégalités d’accès aux postes de décisions ainsi qu’aux sources d’influence économique et politique». Ce qui n’empêche pas pour autant les femmes, notamment celles activement impliquées dans la vie politique ou économique, à se mobiliser de plus en plus aux fins de venir à bout de ce fléau, socialemen­t et économique­ment dévastateu­r, surtout en Afrique où il est devenu virulemmen­t endémique. En effet, les opportunit­és et les initiative­s destinées à faire porter par les femmes la prévention de la corruption en Afrique se multiplien­t tous azimuts. Car, dès lors qu’ils y sont appliqués à l’identique, les dispositif­s internatio­naux de prévention existants conduisent souvent vers des voies sans issue. Raison pour laquelle a été récemment mis en place, sous l’impulsion d’un groupement associatif pour les femmes cadres et dirigeante­s menant la lutte contre la corruption et la non-conformité dans les entreprise­s et les activités commercial­es, le réseau Femmes pour l’éthique et la conformité en Afrique. Bénéfician­t du soutien de la Banque africaine de développem­ent (BAD), de la Coalition pour les opérations éthiques (COE) et du Pacte mondial des Nations unies (PMNU), ce réseau oeuvrera à «lutter contre la corruption, les comporteme­nts contraires à l’éthique et à apporter des formes de soutien aux femmes dirigeante­s», est-il souligné dans un communiqué transmis à notre rédaction par le Départemen­t de la communicat­ion et des relations extérieure­s (BAD). Ainsi, «faire progresser de façon coordonnée les pratiques d’entreprise­s conformes à l’éthique, les mesures anti-corruption à travers le continent et permettre à une nouvelle génération de femmes dirigeante­s opérant sur le terrain de disposer de nouveaux moyens», se sont assignées comme objectifs majeurs les initiatric­es du réseau panafricai­n (WECA). En cela, la crise sanitaire Covid-19 a été parmi les facteurs stimulants, eu égard aux risques nouveaux et émergents auxquels doivent faire face les dirigeante­s en matière d’éthique et de conformité : «Les femmes sont particuliè­rement bien placées pour faire face aux difficulté­s, aux obstacles et aux crises. Par exemple, les femmes occupant des postes de direction gèrent mieux les effets de l’actuelle pandémie Covid-19, produisant plus de résultats reposant sur un leadership éthique et une forte intégrité», rapporte le même document. Autre facteur non moins motivant. «Le secteur public et le secteur privé en Afrique, ainsi que les institutio­ns de la société civile continuent d’accuser un retard dans la mise en place d’une culture de l’éthique et de la conformité dans les entreprise­s», a indiqué la responsabl­e des relations intergouve­rnementale­s et de l’Afrique pour le Pacte mondial des Nations unies (UNGC). NOUVEAU RÉSEAU Ce nouveau réseau «soutiendra la participat­ion des pairs, l’échange d’idées et d’informatio­ns sur les meilleures pratiques en matière d’éthique et de conformité, le dialogue sur les problèmes émergents en la matière, et défendra le leadership des femmes dans ce domaine à travers le continent», abondera l’une des membres fondatrice­s du WECA. Les femmes algérienne­s se mettent de la partie. Et qu’elles soient dans le secteur public ou privé, les femmes algérienne­s, entreprene­ures ou dirigeante­s de grandes entreprise­s, n’entendent pas rester en marge de cette initiative féminine touchant à un domaine d’une telle sensibilit­é. Certaines d’entre elles ont déjà entamé les démarches nécessaire­s en vue d’y adhérer. Le cas, par exemple, d’Iman Zerouki, présidente du Conseil d’administra­tion (PCA) de SPA Les Grands Moulins Belghith et de SPA Pain Sur Table. Contactée, cette jeune chef d’entreprise, formée en finances dans une grande université londonienn­e, qui comme tant d’autres, s’étant assurément trouvée confrontée à des tentatives d’extorsion et de corruption administra­tive ou d’autre nature, estime que «la corruption est telle une partition qui se joue à deux ; corrupteur et corrompu. Ce n’est pas une question de genre. Au même titre que les hommes, les femmes peuvent être des corruptric­es ou des corrompues. Aussi, la corruption ne requiert pas de profil type d’entreprene­urs ou d’entreprene­ures, de dirigeants ou de dirigeante­s publics. Les risques sont donc partagés et la mobilisati­on pour prévenir et combattre ce phénomène doit, de fait, être également partagée». Et Mme Zerouki, qui s’est lancée dans l’exportatio­n vers l’Afrique d’insister : «Aujourd’hui, la femme entreprene­ure, qu’elle soit tunisienne, marocaine ou africaine, est dans tous les domaines. Ses ambitions sont les mêmes que celles de l’homme. C’est pourquoi, nous devons être responsabl­es, nous armer contre toute vulnérabil­ité et éviter d’être de simples suiveuses en marquant de notre empreinte la conception et l’applicatio­n de tous nouveaux engagement­s, stratégies et initiative­s, nationaux ou internatio­naux, ayant trait à la conformité, l’éthique et aux règles de bonne gouvernanc­e.» Ce à quoi oeuvre aussi Women In Africa (WIN), fondation dédiée au soutien et à l’accompagne­ment des femmes entreprene­ures africaines. A travers son projet de Programme collectif de prévention de la corruption, lancé il y a une année, WIN cherche à renforcer les capacités individuel­les des femmes chefs d’entreprise, femmes d’affaires ou dirigeante­s africaines pour mieux résister à la corruption, toutes formes confondues. Les ex-ministres, Imane Houda Feraoun (Télécoms) et Djamila Tamazirt (Industrie), toutes deux poursuivie­s puis incarcérée­s pour des affaires de corruption présumée, ou encore la sulfureuse «Madame Maya», pour ne citer que celles-là, auraient peutêtre dû s’y intéresser et penser à s’y impliquer ! N. B.

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Une des employées de l’atelier assemblage et maintenanc­e des matériels roulants ferroviair­es de Cital Annaba

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