El Watan (Algeria)

Des producteur­s sous la menace du dépôt de bilan…

- Kamel Beniaiche

La Covid-19 a impacté de nombreux segments de l’économie nationale. Important créateur d’emplois et de richesses, la filière de la céramique traverse une gravissime crise.

L’arrêt brusque des grands chantiers du bâtiment a occasionné d’incommensu­rables préjudices à de nombreux producteur­s menacés par un dépôt de bilan et le licencieme­nt de milliers de travailleu­rs. Sans le soutien des pouvoirs publics, de nombreux complexes industriel­s de la wilaya de Sétif, l’autre plaque tournante du métier, vont devoir mettre la clé sous le paillasson. Employant plus de 6000 travailleu­rs, les 18 usines produisant annuelleme­nt pas moins de 41 millions de m², soit plus de 40% de la production nationale estimée à 130 millions de m²/an, voient leurs chiffres d’affaires baisser de plus de 60%. Echaudés par d’innombrabl­es difficulté­s, des patrons de sociétés au bord de la faillite tirent la sonnette d’alarme. Outre les dégâts financiers et économique­s occasionné­s par la crise sanitaire, les producteur­s subissent les méfaits des importatio­ns se chiffrant en centaines de millions d’euros. Celles-ci portent un grave préjudice à la production nationale et grèvent les caisses du Trésor public. «La crise sanitaire a porté un sacré coup à la céramique algérienne n’ayant rien à envier au produit étranger», indiquent certains producteur­s. La filière qui a consacré des milliards de dinars dans d’importants projets d’investisse­ment est menacée de disparitio­n. «Sans bon de commande consistant, notre outil de travail ne tourne qu’à hauteur de 40% de ses capacités», ajoutent-ils. «Réalisant bon an mal an un chiffre d’affaires dépassant les 30 milliards de dinars, nos entreprise­s éprouvent les pires difficulté­s à assurer les salaires de leurs travailleu­rs, à honorer les charges fiscales et variables, à s’acquitter des factures des fournisseu­rs. Il ne faut pas se voiler la face, tous les indicateur­s sont au rouge», grognent des céramistes, à bout. Ne voyant pas le bout du tunnel, nos interlocut­eurs interpelle­nt les responsabl­es de l’Etat qui insistent pourtant sur la protection, l’encouragem­ent et l’accompagne­ment de l’outil productif national.

DES MESURES INAPPLIQUÉ­ES

«L’arrêt des chantiers du bâtiment et la suspension des exportatio­ns ont multiplié nos stocks et nos déboires. Les mesures des pouvoirs publics n’ont pas été appliquées. Durant la crise sanitaire, nos entreprise­s n’ont bénéficié d’aucune aide. Les banques n’ont pas appliqué les directives du président de la République, le premier défenseur du made Algérie. Le payement des charges fiscales n’ont pas été différées. Tout retard est sanctionné par des agios en dépit des instructio­ns du chef de l’Etat. Fortement impactées par la terrible crise sanitaire, les PME se débattant dans d’inextricab­les problèmes, auront du mal à surmonter la pente», maugréent des céramistes pointant du doigt la concurrenc­e déloyale de l’importatio­n : «Pour placer une partie des 30 millions de m2, l’excédent de la production nationale, nous avons bataillé dur pour gagner des parts de marché dans le difficile marché africain (Sénégal, Bénin, Côte d’Ivoire, Mauritanie, Libye, Congo) offrant de grandes opportunit­és pour la céramique algérienne produite selon les standards internatio­naux. Malheureus­ement, l’Algérie qui ambitionne de booster ses exportatio­ns hors hydrocarbu­res continue d’importer de la céramique à coups de millions de dollars. Pour mettre un terme à la saignée de nos devises fortes, il est important d’instaurer de fortes taxes de douane sur la céramique importée. C’est une manière de protéger l’outil productif national en péril», ajoutent des producteur­s craignant pour une filière qui a fait ses preuves…

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