El Watan (Algeria)

L'argent sale n'est pas propre

- Par Chawki Amari

Alger, dimanche 7 mars. Siège du gouverneme­nt, il pleut dehors, alors que les robinets sont à sec, mais les épaisses fenêtres ne laissent rien entendre, encore moins les discrets gémissemen­ts de douleur que provoque l’inflation en bas. La table est grande et les bouteilles d’eau sont de petit format, la nappe est lisse et tout le monde est assis, le Président a réuni ses ministres, tous des jeunes issus de la Nouvelle Algérie. A l’ordre du jour, en finir avec l’argent sale lors des élections, car il y aura bientôt des élections, même s’il n’y a plus d’argent. Si l’on fait un bond en arrière de 5 ou 10 ans, on peut retrouver la trace de cette scène dans le même lieu, l’ex-Président avait dit la même chose et l’ancien secrétaire général du FLN, le célèbre médecin vétérinair­e orthopédis­te du coeur, Ould Abbès, avait juré que c’était fini, plus jamais d’argent qui ne sent pas bon l’eau de Javel. Mais qu’est-ce que l’argent sale ? C’est de l’argent non déclaré qui est donné illégaleme­nt à quelqu’un pour s’offrir un service, un poste de député ou de coiffeur à la Présidence, par exemple, qui en théorie est gratuit et non vendable, parce qu’il ne dépend que de la compétence. Une forme de corruption pour obtenir un avantage, comme un douanier qui paye un poste dans une zone où il y a beaucoup de trafics ou un gendarme qui paye le sien à un barrage routier par lequel circulent beaucoup de buveurs. Oui, mais comment techniquem­ent empêcher un grossiste en viande de chat de payer un membre du bureau des candidatur­es du FLN pour être présenté sur une liste électorale ? Surveiller tout le monde 24 heures sur 24, les équiper de caméras sur la tête, mettre un produit sur les billets de banque pour qu’ils explosent quand ils passent aux mains du FLN, ou mieux, couper les mains à tous les dirigeants des partis au pouvoir, de façon à ce qu’ils ne puissent toucher l’argent sale. On sait bien que c’est impossible. Pour la simple raison qu’on a déjà vu un député du FLN compter des billets avec ses pieds.

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