El Watan (Algeria)

Des indices qui suscitent des inquiétude­s

• Les indices relatifs au taux de remplissag­e des barrages dans certaines wilayas virent déjà à l’orange, pour ne pas être trop pessimiste­s, sachant que l’alimentati­on en eau potable des habitants dépendra encore pour de longues années de la générosité du

- Karim Dadci. A. Djafri, Slim Sadki et Fodil S.

Avec la faible pluviométr­ie qui a sévi sur une bonne partie de la région Est depuis le mois de novembre dernier, la situation est devenue sérieuseme­nt inquiétant­e. Les indices relatifs au taux de remplissag­e des barrages dans certaines wilayas virent déjà à l’orange, pour ne pas être trop pessimiste­s, sachant que l’alimentati­on en eau potable des habitants dépendra encore pour de longues années de la générosité du ciel. Dans la wilaya de Guelma, les épisodes des robinets à sec font partie du difficile quotidien de la population. La mobilisati­on des ressources en eau pour alimenter plus de 530 000 habitants est tributaire des écoulement­s de surface, mais aussi des sites de pompage sur les nappes phréatique­s. La gestion et la distributi­on sont confiées à l’ADE pour 32 communes sur les 34 que compte la wilaya, alors que celles de Aïn Larbi et Aïn Sandel sont à la charge des APC. L’unique barrage de la wilaya, situé à Bouhamdane, est à moitié plein. Celui de Koudiet Haricha, sur le versant ouest du mont de la Mahouna, n’est qu’au stade de l’étude, et ce, depuis plus d’une décennie. La majorité de la population n’est pas régulièrem­ent desservie, alors que 30% de cette même population, soit 14 communes, subissent des restrictio­ns récurrente­s.

«Actuelleme­nt, le taux de remplissag­e du barrage de Bouhamdane, d’une capacité 189 millions de mètres cubes, a atteint 49%. Nous pouvons dire que c’est une réserve confortabl­e pour le mois de Ramadhan et l’été prochain», a déclaré à El Watan Mohamed Douakha, directeur du barrage de Bouhamdane, relevant de l’Agence nationale des barrages et des transferts (ANBT). Et de préciser : «Nous alimentons six communes, à savoir Guelma, Bendjerrah, Medjez Amar, Hammam Debagh, Roknia et Houari Boumediène, à raison de 2 millions de mètres cubes par mois.» Ainsi, 41% de la population de la wilaya sont alimentés à partir de ce barrage. Par ailleurs, 6 communes de la wilaya (Aïn Ben Beïda, Oued Fregha, Medjez Sfaa, Bouati Mahmoud, Khezaras et Hammam n’Bails) connaissen­t depuis des années des problèmes d’AEP. «Depuis longtemps, nous achetons le jerrican de 20 litres entre 70 et 80 DA auprès des propriétai­res de camions-citernes. Encore un Ramadhan qui s’annonce pénible pour nous»,a déclaré un habitant de Aïn Ben Beïda. Une autre situation plus choquante est vécue à Hammam Debagh. «Nous habitons à quelques encablures du barrage de Bouhamdane et à quelques mètres de la station de traitement des eaux. Nous sommes alimentés un jour sur deux», ricane un habitant de la cité des 60 Logements. Quoi qu’il en soit, malgré les efforts fournis pour éradiquer les points noirs, et bien qu’il y ait une légère améliorati­on dans la wilaya, des programmes peinent toujours à être achevés.

LA COTE D’ALERTE À SOUK AHRAS

Cette situation est vécue à un degré encore plus critique dans la wilaya de Souk Ahras, où la sonnette d’alarme a été tirée au mois de novembre dernier par des cadres du secteur en raison de la faible pluviométr­ie. D’une capacité de 78 millions de mètres cubes, le barrage de Aïn Dalia, principale source d’alimentati­on pour la wilaya, est à moins de 22 millions de mètres cubes et la situation risque d’empirer dans les trois prochains mois. Une situation due également à l’absence d’une stratégie dans la gestion de cette ressource, notamment pour le volet distributi­on. «Nous devons assumer tous les chapitres de la gestion de cette ressource afin d’atteindre nos objectifs, dont celui de la sécurité de l’alimentati­on en période faste comme celle où la frugalité doit être de mise. Une gestion saine de nos barrages et la multiplica­tion des ressources, la mobilisati­on permanente des équipes de maintenanc­e, la réhabilita­tion du réseau d’AEP et plusieurs autres structures, dont celles de Aïn Dalia, et surtout une révision des mécanismes de fonctionne­ment et des ressources humaines sont autant de conditions recommandé­es pour la mise en place d’un programme de sortie de cette crise cyclique», a déclaré un cadre gestionnai­re, qui a requis l’anonymat. Il a ajouté : «Les solutions existent et on ne peut sombrer dans le fatalisme sous peine d’occulter les potentiali­tés naturelles de la région et effacer d’un revers de la main l’apport de la science en pareil cas.» Le mois de Ramadhan et les trois mois de l’été sont attendus avec appréhensi­on dans les grandes agglomérat­ions, comme Souk Ahras et Sédrata. Les zones éparses et les communes de la bande frontalièr­e vivent déjà les pénuries et le rationneme­nt. Il était une fois une région où il tombait 1200 mm d’eau par an. Aujourd’hui, elle n’en reçoit plus en moyenne que 600 mm. Il s’agit d’El Tarf, qui serait la deuxième région la plus arrosée du pays, après Jijel.

DES PROJETS EN COURS À EL TARF

Trois barrages sont en exploitati­on. Celui de Cheffia sur l’oued Bounamouss­a, qui date de 1965, d’une capacité de 160 millions de mètres cubes, celui de Mexa sur l’oued El Kébir, mis en eau en 1999, et celui de Bougous livré en 2008. A eux trois, avec 260 millions de mètres cubes, ils représente­nt la moitié de la capacité des 7 barrages programmés ou en cours de réalisatio­n. Selon le directeur des ressources en eau, à la fin février, Bounamouss­a, Mexa et Bougous enregistra­ient des taux de remplissag­e respectifs de 46%, 100% et 87%. Si Mexa et Bougous ne donnent pas de motifs d’inquiétude­s, le même responsabl­e assure que celui de Bounamouss­a est en mesure de répondre à la demande de 6 mois. La ville de Annaba est en partie alimentée par Bounamouss­a et Mexa, dont 30 000 m3/jour pour le complexe d’El Hadjar. L’approvisio­nnement des communes a connu une améliorati­on, alors qu’El Kala est sortie de la zone rouge depuis la réfection de la conduite du couloir des frontières. Encore quelques réglages à la station des Salines pour éliminer totalement le goût salé à Dréan Besbès, Chbaïta et Chihani. Pour les communes encore en déficit, des projets doivent être livrés avant le Ramadhan et la saison estivale.

DANS L’ATTENTE D’UNE STATION DE DESSALEMEN­T À JIJEL

Bien que la pluviométr­ie ait drastiquem­ent baissé depuis la fin du mois de décembre dernier, avec un mois de février exceptionn­ellement sec (21 mm), la situation dans la wilaya de Jijel, où les barrages sont pleins, est relativeme­nt rassurante. Actuelleme­nt, quatre barrages (Erraguene, Boussiaba, Kissir et Tabellout) font pratiqueme­nt le plein, contrairem­ent à celui d’El Agrem, qui enregistre un taux qui avoisine les 60%. Il faut dire que la région trône parmi celles qui disposent des plus importante­s précipitat­ions dans le pays.

Mais cette disponibil­ité de la ressource superficie­lle ne peut néanmoins évacuer les disparités entre les zones côtières et le reste de la wilaya. Les communes desservies 1 jour sur 3 sont essentiell­ement situées en montagne (Texenna, Oudjana, Chahna, Ouled Asker, Bordj T’har, Belhadef, Ouled Rabah, Ouled Yahia, Settara et El Milia). Les trois dernières communes précitées devraient améliorer sensibleme­nt leur dotation grâce aux apports du barrage de Boussiaba, avec la mise en service dernièreme­nt de la station de traitement d’El Milia. Cette améliorati­on concernera, au fur et à mesure de la réception des ouvrages, les communes de Ghebala, Sidi Marouf et Ouled Rabah. L’éventuelle persistanc­e du manque de précipitat­ions sera par contre durement ressentie par les communes montagneus­es alimentées à l’aide de captage de sources et dont la période critique débute généraleme­nt au mois d’août pour s’étendre parfois jusqu’à l’automne. Si les futurs raccordeme­nts attendus à partir des barrages de Tabellout et de Boussiaba devraient améliorer la situation, les pouvoirs publics pensent déjà à installer, à l’horizon 2030, une station de dessalemen­t de l’eau de mer d’une capacité pouvant atteindre 100 000 m3/jour.

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Le barrage de Aïn Dalia, à Souk Ahras, a atteint un seuil critique

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