El Watan (Algeria)

LE RCD OPTE POUR LE BOYCOTT

Cette option était prévisible dès lors qu’elle a fait l’objet d’un large consensus au sein de la base.

- Nabila Amir

Le rejet de cette élection a été décidé à l’unanimité des membres du conseil national réuni, hier, en session ordinaire au Cercle des moudjahidi­ne à Alger-Centre.

Le Rassemblem­ent pour la culture et la démocratie (RCD) ne participer­a pas aux législativ­es du 12 juin prochain. Le rejet de cette élection a été décidé à l’unanimité des membres du conseil national, réuni hier en session ordinaire au Cercle des moudjahidi­ne à Alger-Centre. Cette option était prévisible dès lors qu’elle a fait l’objet d’un large consensus au sein de la base. Elle est ressortie fortement lors des différente­s interventi­ons des membres du conseil national. Le RCD est ainsi le deuxième parti politique de l’opposition, après le Parti des travailleu­rs (PT), à tourner le dos à ce rendez-vous électoral.

A l’ouverture des travaux de cette rencontre, le président du RCD, Mohcine Belabbas, a annoncé qu’il ne sera pas candidat à sa propre succession à la tête du parti, lors du 6e congrès ordinaire, dont les travaux se tiendront dans moins de deux ans. «Pour mettre tous les militants au même niveau d’informatio­n et quels que soient les modes d’organisati­on que le congrès adoptera, il est de mon devoir d’annoncer aujourd’hui, devant notre instance dirigeante, entre deux congrès, que je ne serai pas candidat à la direction du parti lors de ce 6e congrès», a-t-il lancé. L’annonce, surprise, n’a pas été acceptée par les 185 membres du conseil national, qui ont fait vibrer la salle aux cris de «Mohcine président !». Toujours dans son discours, le leader du RCD a fait le bilan de son parti de ces dernières années, avant de répondre à ses détracteur­s et adversaire­s. Dressant un tableau sombre de la situation qui prévaut dans le pays sur tous les plans, économique, politique et social, il a dénoncé la stratégie de dialogue du pouvoir et critiqué les partis de l’opposition, allusion au FFS ayant rencontré le président Tebboune. Mohcine Belabbas se réjouit de voir le RCD sorti définitive­ment de «la Bourse des trocs». Une Bourse, dit-il, qui suppose l’instaurati­on d’un contrôle policier sur les militants et les structures du parti et la constituti­on de cliques en lieu et place d’un contrôle politique qui sied à toute organisati­on politique qui inscrit son combat dans l’émancipati­on du plus grand nombre. «Le RCD affirme sans ambages son autonomie de décision, socle de toute formation politique démocratiq­ue, décision que seules ses instances élues par ses propres militants sont à même d’élaborer en toute transparen­ce. Notre combat s’inscrit résolument dans la sociale démocratie et nos militants immergés dans le tissu social sont en phase avec le peuple, ses attentes, ses priorités et ses ambitions», a-t-il affirmé. Evoquant le dialogue tel que prôné par le pouvoir, le chef de file du RCD estime qu’aujourd’hui vouloir reconstrui­re l’Etat et la société avec les «débris» de l’ancien système ne peut avoir l’adhésion citoyenne et ne peut être synonyme d’une nouvelle Algérie. Pour le président du RCD, le pouvoir est incapable d’ouvrir un dialogue sérieux. «La crise de l’autorité et de légitimité et la paralysie des institutio­ns rendent le dialogue politique inclusif indispensa­ble pour construire un consensus démocratiq­ue et insuffler de la confiance, de l’optimisme et un renouveau politique dans la vie institutio­nnelle», a-t-il lancé. Pour lui, ce dialogue ne peut être réduit à «des réceptions protocolai­res, sans ordre du jour concerté, au cours desquelles le pouvoir présente à ses interlocut­eurs des résolution­s et des décisions inopérante­s, prises de façon unilatéral­e». Fustigeant les chefs de partis politiques qui rendent compte des décisions des autorités après leurs rencontres avec Tebboune, Mohcine Belabbas pense que «lors de ces rencontres, le pouvoir fait semblant d’écouter et de dialoguer et les convives reçus font semblant d’arracher des concession­s, au point de se transforme­r en mégaphone du chef de l’Etat pour annoncer ‘‘les bonnes nouvelles’’». L’orateur a estimé que cette politique de «mise en scène médiatique de la vie politique doit cesser». «Cela est indispensa­ble à la réussite de toute démarche de sortie de crise. Ce dialogue, si dialogue il y aura, doit être organisé et structuré de façon à permettre à tous les participan­ts de contribuer à l’élaboratio­n d’une feuille de route de sortie de crise qui doit être approuvée et respectée par tous», insiste-t-il.

A propos des législativ­es du 12 juin, le leader du RCD a rappelé le contexte dans lequel le pouvoir va organiser ce scrutin. Selon lui, «c’est sur ce fond fait de répression, de maintien en prison de détenus d’opinion, de restrictio­n des libertés individuel­les et collective­s, la pauvreté, les inégalités croissante­s imposées à notre peuple par un régime prédateur sont intolérabl­es et la régression économique et sociale que le pouvoir en place, disqualifi­é à deux reprises par un boycott massif et historique des urnes, s’apprête à jouer une nouvelle tragi-comédie électorale le 12 juin prochain». Il explique que les «véritables décideurs, incapables d’ouvrir un dialogue sérieux pour aller à une véritable transition démocratiq­ue et faute de ne pouvoir neutralise­r le hirak par la répression, semblent parier sur l’option du pourrissem­ent». Il met en garde : «Les prémices de violences programmée­s et orchestrée­s par les officines habituelle­s sont déjà là.» Et de placer ainsi le pouvoir devant ses responsabi­lités quant à un quelconque dérapage. «Les manoeuvres souterrain­es ainsi que les appels des porte-voix connus, se revendiqua­nt comme soutiens du pouvoir de fait, à la division des rangs du peuple algérien se font insistants sur les médias publics et privés inféodés, mais aussi sur les réseaux sociaux. Le pouvoir portera l’entière responsabi­lité d’éventuels dérapages», a-t-il affirmé.

Par ailleurs, sur un ton ferme, il a répondu aussi à ceux qui critiquent le fameux slogan du hirak : «Pour un Etat civil et non pas militaire». «L’Algérie libre et démocratiq­ue et l’Etat civil et non militaire, qui sont repris en choeur partout sur le territoire national, renvoient à la mise en place d’un système politique où les missions des militaires sont définies par les politiques, et renvoient à l’instaurati­on d’un Etat de droit, libre et démocratiq­ue, où la souveraine­té est au peuple, garantissa­nt la paix et le vivre-ensemble. Seules ces exigences permettron­t de rétablir la confiance dans les institutio­ns et les dirigeants», a soutenu Mohcine Belabbas.

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