El Watan (Algeria)

«L’Algérie a une offre pour toutes les catégories de tourisme»

- A. A. M.

Gustavo Egusquiza est diplômé de l’université d’Oxford en économies émergentes. Il a été nommé en 2019 comme l’un des plus grands experts du tourisme de luxe au monde par le magazine Forbes Latam. Journalist­e spécialisé en tourisme de luxe, il est l’auteur du livre L’Espagne exclusive : un parcours à travers les hôtels de rêve. Gustavo combine son activité d’écrivain avec le conseil aux gouverneme­nts et aux entreprise­s privées en matière de tourisme. Dans cet entretien, il nous parle de l’impact de la Covid-19 sur le tourisme mondial et les perspectiv­es de renoncemen­ts d’un secteur qui représente pas moins de 7% du commerce mondial.

Selon les données disponible­s en 2019, le tourisme générait 7% du commerce mondial, employait une personne sur dix dans le monde et fournissai­t des moyens de subsistanc­e à des millions de personnes dans les pays développés et ceux en développem­ent. L’impact de la Covid-19 sur le tourisme mondial apparaît dans toute son ampleur. Dans quelle situation se retrouve actuelleme­nt le secteur du tourisme ?

L’effet de la pandémie de Covid-19 sur l’industrie du tourisme a été dévastateu­r. Le tourisme est l’un des secteurs de l’économie mondiale qui a été le plus touché. Les arrivées de touristes ont été réduites de plus de moitié dans de nombreuses régions du monde. En Europe, plus de 26 millions d’emplois dépendent directemen­t du secteur du tourisme et dans de nombreuses régions reculées du monde, ce secteur a été l’épine dorsale des revenus de leurs communauté­s. En Espagne par exemple, pays touristiqu­e par excellence, nous encaissons chaque année plus de 90 000 millions d’euros du tourisme et son poids dépassait 12% du PIB jusqu’à la crise. Cette année, nous avons accueilli 18 millions de touristes étrangers, ce qui représente 77% de moins que les années précédente­s, et leurs dépenses ont également baissé de plus de 80 000 millions d’euros. Actuelleme­nt, la demande interne et externe est bloquée par des restrictio­ns sanitaires et cette situation ne sera résolue que lorsque le vaccin sera administré à une grande majorité de la population. D’ici là, on peut s’attendre à ce que de nombreuses entreprise­s du secteur fassent faillite.

En réalité, le tourisme mondial va être durement éprouvé tout au long de l’année 2021, voire au-delà, même si la propagatio­n du virus est maîtrisée au cours des prochains mois. Les entreprise­s de tourisme ont fait partie des premières à être fermées suite à la mise en oeuvre des mesures permettant de faire barrage au virus. Quelles sont les clés du tourisme post-Covid-19 ?

Le tourisme traverse un profond changement. La crise sanitaire et économique provoquée par la Covid-19 transforme la vision que les gens ont du monde et leur ordre de priorités. Cette pandémie a accéléré les changement­s et le secteur du tourisme est au coeur d’une énorme transforma­tion planétaire qui n’est pas homogénéis­ée. Afin de ne pas succomber aux évolutions du marché, le secteur devra s’adapter aux défis auxquels il sera confronté dans les années à venir dans le monde. L’entrée de la numérisati­on et de l’intelligen­ce artificiel­les dans tous les secteurs de la vie mettra en échec les secteurs les plus traditionn­els de l’économie, qui devront se réinventer ou mourir. Par ailleurs, les gouverneme­nts devraient investir dans la promotion de la formation de leurs citoyens aux connaissan­ces numériques, afin que de larges pans de la population ne soient pas exclus du nouveau marché du travail. Le changement climatique, associé à la disparitio­n progressiv­e de la biodiversi­té et à la grande mobilité, dont jouissent les gens dans un monde globalisé, créeront de nouveaux scénarios pour les pays développés et en développem­ent, qui sont difficiles à affronter. Une évolution de la demande touristiqu­e associée à la disparitio­n progressiv­e du pouvoir d’achat des classes moyennes occidental­es rendront le tourisme de proximité, la durabilité du tourisme, la numérisati­on et le tourisme personnali­sé et expérienti­el devenir importants dans les années à venir.

L’Algérie est un pays qui possède d’incontesta­bles atouts naturels pour être une véritable destinatio­n de choix et pourtant... le tourisme reste un secteur qui ne décolle pas. Pourquoi, à votre avis ?

L’âge d’or du tourisme en Algérie, c’était durant les années 1960/70, après son indépendan­ce de la France. La constructi­on d’infrastruc­tures et d’hôtels a aidé l’Algérie à devenir une destinatio­n très prisée du bassin méditerran­éen, visitée par de nombreux Européens. Le changement de modèle économique des années 1980 a conduit, dans une large mesure, à cette baisse des touristes, qui tente désormais de se redresser. Je pense que l’Algérie a une offre pour toutes les catégories de tourisme. Le pays est désertique, avec 1600 km de côtes et des lieux spectacula­ires, comme le massif du Hoggar et Tamarasset, qui sont une valeur ajoutée à la région. Les conflits dans les pays frontalier­s et la perception de la sécurité sont très importants pour les touristes. Je crois qu’en combinant une stratégie qui tend vers la durabilité et un tourisme de qualité qui recherche des expérience­s dans le pays avec une campagne de communicat­ion à l’étranger, l’Algérie peut devenir une grande destinatio­n touristiqu­e dans les années à venir.

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Gustavo Egusquiza

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