El Watan (Algeria)

Ça sent bon à Blida !

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ABlida, ça sent déjà le printemps en cette fin de saison hivernale. Les arbres du bigaradier, plantés au centre-ville, dégagent une forte odeur agréable provenant de la fleur d’oranger.

«Ça remonte vraiment le moral en ces temps de pandémie. Cette année, l’odeur est exceptionn­elle», témoigne, le moral au beau fixe, un Blidéen. Pour l’artiste Farid Khodja, la fleur d’oranger est «cette petite fleur qui me tient à coeur, j’essaie de ramasser celles qui tombent et de ne pas en cueillir afin de préserver le plus sur l’arbre. Pour les connaisseu­rs, cette fleur d’agrumes a une senteur différente suivant l’arbre, celle des orangers a une senteur sucrée, celle du bigaradier entourant le centre-ville une senteur forte», explique-t-il. Et de poursuivre : «J’utilise ces fleurs mises au congélateu­r tout de suite après le ramassage, pour le charbette au mois de ramadhan, 4 citrons, 1 litre d’eau, 2 à 3 tasses (fendjane) de sucre, 4 fleurs d’oranger... Le tout au frais, on peut ajouter une petite cuillère d’eau de fleur d’oranger distillée, non industriel­le, extatique. Les fleurs d’oranger, peuvent être ajoutées au miel pour les gâteaux traditionn­els, ou au café, c’est aussi ça l’âme de Blida.» Pour l’histoire, la fleur du bigaradier est le symbole même de la cité de Blida. «Elle est le témoignage silencieux d’un héritage andalou ancestral. El azahar, comme l’appellent les Espagnols, cette fleur est à l’origine de tous les agrumes que nous connaisson­s», raconte-t-il.

Pour lui, son parfum subtil embaume la ville et lui fait rappeler son attachemen­t à son patrimoine et son devoir de résistance. «Car si le bigaradier continue à joncher les allées de Blida, c’est parce qu’il est investi de cette mission ô combien noble, celle de nous réconcilie­r avec notre passé. Ezhar est avant tout l’expression du génie du peuple de Blida».

De son côté, Samir Ghiribi, la quarantain­e, avoue son grand amour pour le patrimoine de Blida. Pour lui, la fleur d’oranger est plus qu’une fleur, elle est l’expression même du raffinemen­t à la blidéenne. «Chez moi, elle est présente dans le sucrier pour parfumer le sucre. Quelques gouttes suffiront également pour relever le goût du café fraîchemen­t moulu. Elle constitue un ingrédient de la confiture exquise. Le printemps est annoncé par elle et l’eau que nous buvons en est parfumée. Quelques brindilles du bigaradier orneront la meida au moment du café matinal». De mémoire de Blidéen, il reconnaît qu’il a toujours vu sa grand-mère vouer un «respect presque mystique» à ces fleurs d’oranger. «Avec son alambic séculaire, elle préparait son eau de fleurs d’oranger et autres eaux distillées aux herbes aromatique­s du printemps. Il est dommage qu’aujourd’hui tous ces savoir-faire disparaiss­ent…» Youcef Ouragui, passionné du patrimoine, abonde dans le même sens : «Il est regrettabl­e de voir l’arbre symbolique de Blida agoniser et résister difficilem­ent à la bêtise humaine. Il est temps de l’entretenir convenable­ment et de remplacer les arbres mourants», conclut-il.

Mohamed Benzerga

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Le bigaradier, un arbre «patrimonia­l»

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