El Watan (Algeria)

La Tunisie rend publique une liste de martyrs de la révolution, un «signe fort»

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La publicatio­n officielle par la Tunisie d’une liste de centaines de «martyrs» de la révolution qui a renversé le régime de Ben Ali en 2011 est un «signe fort pour la poursuite de la transition démocratiq­ue», a déclaré un avocat samedi à l’AFP. Une associatio­n de famille de victimes a en revanche estimé que la publicatio­n de cette liste ne rendait «pas justice aux victimes» mais qu’elle visait à «calmer les tensions sociales» traversées par ce pays du Maghreb. Plus de dix ans après la révolution, cette liste réclamée de longue date par les victimes et leurs familles – comprenant les noms de 129 morts et 634 blessés – a finalement été publiée au Journal

officiel vendredi soir, la veille du 65e anniversai­re de l’indépendan­ce. «C’est une reconnaiss­ance par l’Etat des sacrifices faits par ces personnes pour que la dictature tombe», a déclaré à l’AFP Abderrazak Kilani, avocat et président de l’instance générale des martyrs et blessés de la révolution. Cette publicatio­n ouvre aussi la voie à des recours administra­tifs pour les quelque 1500 personnes s’estimant exclues à tort de la liste. En 2012, un bilan préliminai­re des autorités avait fait état de 338 morts et 2147 blessés. Mais pour Sofiene Farhani, porte-parole de l’associatio­n «Fidèles» qui a lui même perdu son frère, «cette liste n’a pas de sens car elle n’est pas le fruit d’enquêtes ou de procès permettant de faire la lumière : sa publicatio­n vise à calmer les tensions sociales actuelles, elle ne rend pas

justice aux victimes». Elle comprend les noms de personnes blessées ou tuées lors des premières manifestat­ions dans le pays le 17 décembre 2010 jusqu’à la fuite de Ben Ali le 14 janvier 2011. Elle avait été diffusée en octobre 2019 par le Haut-Comité tunisien aux droits de l’Homme. Ces tergiversa­tions à publier cette liste au JO illustrent les déboires de la transition : pendant plusieurs années, le retour au pouvoir de figures proches de l’ancien régime a entravé le travail de justice et de réconcilia­tion. Des dizaines de procès d’abus commis pendant les dictatures ont débuté depuis 2018 devant des tribunaux spéciaux dans le cadre de la justice transition­nelle, dont plusieurs pour le meurtre de manifestan­ts en 2011. Mais les autorités ont entravé l’accès aux archives ou aux accusés et aucun jugement n’a encore été prononcé.

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