El Watan (Algeria)

Les gens pestent contre «l’Algérie nouvelle»

- Slim Sadki

Pas de doute, c’est revenu en force. Il y a encore moins d’argent dans les bureaux de poste et les banques à El Tarf. «C’est pire que les épisodes précédents», entendons-nous dire dans les rassemblem­ents devant les bureaux de poste et les distribute­urs automatiqu­es de billets (DAB). «Si c’est cela l’Algérie nouvelle, il faut s’attendre à être rémunéré avec de la semoule et de l’huile si on en trouve», fulminent des citoyens.

La crise des liquidités perdure à El Tarf, avec des périodes plus intenses pour les détenteurs de comptes à Algérie Poste ou dans les banques. «Aller retirer son argent, c’est comme jouer à la loterie, on n’est pas sûr de gagner tous les coups», nous a soufflé un cadre à la retraite. «Elle arrive quand cette Algérie nouvelle avec laquelle on nous rabat les oreilles dans tous les discours ? Juste avant les élections ?», s’interroge-t-on dans la foule agglutinée qui attend l’ouverture des portes, depuis des heures.

Inutile de préciser que rares sont ceux qui portent des masques. D’ailleurs, c’est cette affluence qui renseigne sur la disponibil­ité de l’argent. «Parce que de temps à autre, deux ou trois jours par semaine, il y en a dans quelques bureaux, à tour de rôle. Les gens l’apprennent à l’avance, on ne sait comment», nous dit un responsabl­e du secteur. «Si on sait comment, l’argent se volatilise vite», ajoute un employé. Vite, ce n’est pas vrai.

Car, des gens dans la file à l’intérieur d’un bureau de poste expliquent qu’il faut compter les pannes de réseaux ou de courant, et la lenteur des agents des guichets à qui il faut 7 minutes en moyenne pour un retrait. Après avoir réduit les retraits à 30 000 DA par personne et par jour, il y a une année, Algérie Poste a annoncé à la mi-janvier 2021, que le seuil est relevé à 200 000 DA. Mais en fait, il n’en est rien. Les retraits sont toujours rationnés, à l’humeur, entre 30 000 DA et 50 000 DA, selon la disponibil­ité et la tête du client. Les DAB qui fonctionne­nt sont rarement alimentés et la plupart sont signalés comme étant en panne. Dans les banques ce n’est pas mieux. Nous avons fait le tour de la BNA, BDL, BADR, CNEP, Société Générale à El Kala et El Tarf.

Pas un seul DAB n’est en état de marche. Ils sont tous en panne ! Curieux non ? Les experts donnent de nombreuses explicatio­ns à une situation qui ne fait qu’empirer et devient problémati­que : planche à billets, dévaluatio­n du dinar, épuisement de la rente issue des hydrocarbu­res, la Covid-19, la hausse du chômage, la baisse du pouvoir d’achat conséquent­e à l’inflation, etc. Le ministre des Finances, Aymen Benabderra­hmane, a indiqué récemment qu’une grande quantité de capitaux circule actuelleme­nt en dehors des cadres financiers légaux. «6000 milliards de dinars ont été échangés sur le marché noir en 2020 en Algérie», a-t-il affirmé. Mais alors, il faut vite aller chercher ces billets de banque qui manquent si cruellemen­t.

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