El Watan (Algeria)

Près de 130 morts en six jours

l Le nouveau chef de l’Etat, Mohamed Bazoum, dont la victoire à la présidenti­elle du 21 février a été confirmée dimanche par la Cour constituti­onnelle du Niger, s’est engagé à lutter contre l’insécurité. Un des plus grands défis du Niger.

- Amnay Idir

En six jours, l’ouest du Niger a connu une série d’attaques ayant fait près de 130 morts. Ainsi, au moins 60 civils ont été tués dimanche dans des opérations contre des villages, a rapporté hier l’AFP citant des sources sécuritair­e et locale. «Le bilan s’établit provisoire­ment à 60 morts», a déclaré une source des services de sécurité du Niger. «Des hommes armés sont venus sur des motos et ils ont tiré sur tout ce qui bouge. Ils ont sévi à Intazayene, à Bakoarate et à Wistane et dans des campements environnan­ts et on compte au moins 40 personnes tuées», a auparavant affirmé un élu local. Les localités visées sont situées dans la région de Tahoua, voisine de celle de Tillabéri, toutes deux proches de la frontière avec le Mali. La région de Tillabéri est située dans la zones dite «des trois frontières», aux confins du Niger, du Mali et du Burkina Faso, régulièrem­ent frappée par les groupes djihadiste­s. Le 15 mars, des djihadiste­s présumés y ont mené plusieurs attaques contre des véhicules qui rentraient du grand marché hebdomadai­re de Banibangou. Ils ont également pris pour cible le village de Darey-Daye, massacrant des habitants et incendiant des véhicules et des greniers à céréales. Le bilan est de 66 morts. Par ailleurs, le même jour, une attaque revendiqué­e par le groupe Etat islamique (EI) menée contre l’armée malienne dans cette «zone des trois frontières» a tué 33 soldats.

Le 2 janvier, entre deux tours présidenti­els, 105 personnes ont été tuées dans des attaques dans la zone de Ouallam (région de Tillabéri) par des hommes armés circulant également à moto. Le 9 janvier 2020, soit un an auparavant, 89 soldats nigériens sont morts dans l’attaque du camp militaire de Chinégodar. Le 10 décembre 2019, dans une attaque à Inates, une autre localité de la région de Tillabéri, 71 soldats nigériens ont péri. Ces deux attaques contre l’armée ont été revendiqué­es par l’EI.

Le nouveau chef de l’Etat, Mohamed Bazoum, successeur de Mahamadou Issoufou, dont la victoire à la présidenti­elle du 21 février a été confirmée dimanche par la Cour constituti­onnelle du Niger, s’est engagé à lutter contre l’insécurité. Un des plus grands défis du Niger. Après les massacres du 15 mars, l’armée nigérienne a déployé des renforts dans la région de Tillabéri. Un contingent de 1200 soldats de l’armée tchadienne a également été déployé dans la zone des trois frontières, dans le cadre du «G5 Sahel» (Mauritanie, Mali, Burkina, Niger et Tchad) qui s’efforce de coopérer dans la lutte antidjihad­iste depuis 2015. Comme ses voisins le Mali et le Burkina Faso, le Niger coopère avec l’opération française antidjihad­iste Barkhane, qui compte 5100 hommes déployés au Sahel.

LE CHANCRE

Depuis plusieurs années, le Niger est cible d’attaques menées par de nombreux groupes terroriste­s, entre autres, Boko Haram, Al Qaîda, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Pour schématise­r, en 2010, sept collaborat­eurs du groupe nucléaire français Areva sont enlevés à Arlit (nord), rapt revendiqué par Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI). La même année, deux jeunes Français sont enlevés dans un restaurant de Niamey puis tués lors de l’interventi­on de l’armée française qui tentait de bloquer la fuite des ravisseurs. En mai 2013, le Niger est frappé par deux attentats-suicides, contre un camp militaire à Agadez et un site d’uranium d’Areva (une vingtaine de morts), revendiqué­s par les Signataire­s par le sang de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). En 2015, le Niger devient une cible du groupe nigérian Boko Haram, avec en février de multiples attaques meurtrière­s dans la zone de Diffa (sud-est) et en avril contre une position militaire sur une île du lac Tchad (au moins 74 morts). Depuis 2016, le Sud-Est connaît des attaques du groupe Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), issu d’une scission d’avec Boko Haram. En octobre 2017, quatre soldats américains et cinq militaires nigériens ont été tués dans une embuscade à Tongo, un village près du Mali, dans le sud-ouest. Cette attaque a été revendiqué­e par l’EI. Le 9 août 2020, six jeunes humanitair­es français de l’ONG Acted sont assassinés avec leur chauffeur et leur guide nigériens dans la zone touristiqu­e de Kouré, à 60 km au sud-est de Niamey. L’attaque est revendiqué­e par l’EI. Fin 2018, l’armée nigérienne se déploie massivemen­t dans la région de Tillabéri pour chasser les islamistes venus du Mali dans la zone des «trois frontières», devenue un repaire des djihadiste­s, dont l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS). Le Niger abrite aujourd’hui des bases militaires étrangères, française à Niamey et américaine à Agadez.

Outre l’insécurité, le pays est confronté à des tensions politiques. Fin 2015, le président Issoufou, candidat à sa réélection, affirme qu’une tentative de coup d’Etat, dont la réalité est contestée par l’opposition, a été déjouée, justifiant une vague d’arrestatio­ns. En mars 2016, il est réélu lors d’un scrutin boycotté par l’opposition. En mars 2017, l’opposant Hama Amadou, second à la présidenti­elle, est condamné à un an de prison pour une affaire de trafic internatio­nal de bébés, qu’il qualifie de complot politique pour l’écarter. Revenu d’exil, il sera écroué fin 2019, puis gracié en 2020 en raison du coronaviru­s.

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Des soldats nigériens

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