Plébiscite pour la pièce Khatini
l Comme nous l’avions prédit à l’issue de l’adhésion totale et unanime du public, la pièce théâtrale intitulée Khatini écrite et mise en scène par Ahmed Rezzak, n’a pas raté la marche… du Hirak ni du podium.
Et pour cause. Dimanche soir, lors de la cérémonie de clôture du Festival culturel national du théâtre professionnel - s’étant déroulé du 11 au 21 mars, au Théâtre national algérien (TNA), à Alger- le Théâtre régional de Mostaganem Djilali Abdelhalim, à travers la pièce Khatini, a été le récipiendaire de trois «awards». Le Grand prix du Festival, le Prix de la meilleure scénographie et celui de la meilleure interprétation masculine. Un plébiscite du jury composé de Mme Nabila Brahim, Bouziane Benachour, Faouzi Ben Brahim et Habib Boukhelifa (le président), qui ne sont pas à présenter.
JAMAIS SANS NOTRE FILS UNIQUE
La troupe de Mostaganem avait dressé ses tréteaux au TNA et était montée en... puissance pour afficher son ambition avec la pièce Khatini d’Ahmed Rezzak. Elle avait fait du bruit et s’était faite entendre haut et fort car elle avait fait gronder les planches. Depuis cette estrade, le Théâtre régional de Mostaganem Djilali Abdelhalim -une grande école du 4e Art, à travers, la pièce Khatini - semblait montrer qu’il n’était pas venu festival à Alger, et ce, pour faire de la figuration. Car manifestant, scandant et battant le pavé… dans la mare. Le public était conquis. L’argument-massue de la pièce Khatini ? Elle s’ouvre sur une scène de ménage d’un vieux couple sénile. Une immersion dans la gérontologie, la démence, l’Alzheimer, l’hypertension… Du coup, ça démarre sur les chapeaux de roue, ça déménage à tous les étages, ça décoiffe, ça se crêpe le chignon, ça s’insulte par tous les noms d’oiseaux.
UNE SATIRE D’UNE RÉPUBLIQUE BANANIÈRE
Un vaudeville désopilant s’installe. L’arrivée officielle du... président de la République, vieux comme Mathusalem, impotent, tremblant, venant personnellement, chez les deux gâteux, pour dissuader leur fils, le seul, l’unique et le dernier jeune de cette contrée jurassique, candidat à l’exil, «la harga». Il s’appelle Khatini qui veut dire en dialecte arabe «cela ne me concerne pas». Khatini d’Ahmed Rezzak, est une satire du pouvoir, de son abus, de sa fossilisation, ses pratiques orwelliennes, anachroniques… Et ce, de par, un humour grinçant où il dépeint, en fait, une République bananière. Un régime où règnent un général d’opérette, un président croulant, sous perfusion, autiste (au peuple) qu’on cadre et recadre, prononçant un discours creux, oiseux… Un « cheikh en bois ».
LE HIRAK, PLANCHE DE SALUT
Le jeu des comédiens Samira Sahraoui, Bouhdjar Boudchiche, Bendebaba Fouad, Rabie Oudjaout, Korichi Sabrina... est à saluer. Justesse, fluidité, expérience et esthétique. Et cela a payé. Ils ont ému, séduit et surtout fait se poiler de rire l’assistance et sans discontinuer. La séquence du hammam pour femmes fut un grand d’anthologie, de théâtre en devenant un bain de jouvence pour ces vielles «mamas» et où le massage (des kiyassat) se transformera en message de tolérance, tendresse, courage et surtout, ce Hirak, manifeste, et plein d’espoir. Une planche de salut… tout bas. Dans son discours de clôture, M. Mohamed Yahiaoui, le commissaire du Festival culturel national du théâtre professionnel (FNTP), déclarera : «Le public demeure le seul juge de ce festival a travers lequel nous avons eu le privilège de décou vrir et d’être surpris agréablement par des révélations et autres découvertes. Le public, séduit, aura été en or. Ce rendezvous aura été une célébration de l’art algérien… Je salue et remercie le public et les participants. Ici, c’est la famille, la maison, la vôtre, du théâtre».