Le général Hassan face au juge aujourd’hui
L L’ancien chef de l’unité d’élite du Service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste (Scorat), relevant de l’ex-DRS (Département de renseignement et de sécurité), le général Hassan, de son vrai nom Abdelkader Aït Ouarabi, sera j
Le procès en appel de l’ancien chef du Service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste (Scorat), qui dépendait de l’ex-DRS (Département de renseignement et de sécurité), le général-major à la retraite Hassan, de son vrai nom Abdelkader Aït Ouarabi, s’ouvrira aujourd’hui devant la cour d’appel militaire de Blida. Poursuivi pour «destruction de documents» et «infractions aux consignes militaires», son affaire revient après cassation du verdict en novembre 2019, confirmant la peine de 5 ans de réclusion criminelle prononcée par le tribunal militaire d’Oran en novembre 2015. La peine maximale qu’il a purgée avant de quitter la prison en décembre 2020. Son arrestation en août 2015 avait fait couler beaucoup d’encre, tout comme d’ailleurs sa condamnation rapide (en trois mois) à la peine maximale, qui avait suscité de nombreuses réactions. D’abord celles de ses avocats. «Sur le plan du droit, les faits reprochés au général Hassan ne résistent pas devant une analyse juridique impartiale. Il s’agit, pour rappel, de la ‘‘destruction de documents’’ et ‘‘infraction aux consignes’’, faits prévus et punis par les articles 289 et 324 du code de justice militaire», déclarait, dans une lettre rendue publique, Me Mokrane Aït Larbi. Et de préciser : «Pour la première inculpation, il s’agit de notes personnelles et le service ne s’est jamais plaint de la disparition de documents. Quoi qu’il en soit, la loi vise la destruction par ‘‘tout militaire ou tout individu embarqué’’ sur un bâtiment de marine ou sur un aéronef militaire. Ce qui n’est pas le cas. D’ailleurs, la loi ne peut pas prévoir cinq ans de prison pour avoir déchiré un papier, quelle que soit sa nature.» Revenant sur l’accusation d’infraction aux consignes, l’avocat affirmait : «Il s’agit de la gestion administrative et sécuritaire d’un dossier ‘‘top secret’’ et je n’en dirai pas plus. Se posent alors deux questions : la première est que les consignes générales données à la troupe sont-elles applicables aux services spéciaux et à cette affaire ?
La deuxième : le général Hassan at-il agi, dans la gestion de ce dossier, conformément aux consignes de sa hiérarchie ?» Et de souligner : «Afin d’éviter tout amalgame, je tiens à rappeler qu’il ne s’agit pas du procès du DRS ou des généraux. Mon devoir est de défendre, avec professionnalisme, un homme réduit au silence qui réclame justice, sans entrer dans d’autres considérations qui sortent du domaine professionnel et des droits de la défense.» Me Aït Larbi rappelait dans sa lettre les déclarations du chef hiérarchique de son mandat, le général de corps d’armée à la retraite Mohamed Mediène, dit Toufik, et de l’ancien chef d’état-major de l’ANP et ministre de la Défense, le généralmajor à la retraite Khaled Nezzar, en disant : «Aujourd’hui, ces deux questions viennent de messieurs Khaled Nezzar et Mohammed Mediène, dit Toufik, (…) dans leurs déclarations publiques que je ne veux pas commenter. Pour le premier, les consignes générales données aux troupes ne s’appliquent pas aux services secrets : ‘‘Il est curieux d’exiger d’un chef des services de renseignement de respecter des consignes générales, alors que ses missions imposent que l’on s’affranchisse, parfois, de la contrainte imposée par les règles et la transparence.’’ Pour le second, ‘‘en ce qui concerne l’opération qui lui a valu l’accusation d’infraction aux consignes générales, j’affirme qu’il a traité ce dossier dans le respect des normes et en rendant compte au moment opportun’’.» Dans une déclaration rendue publique, Khaled Nezzar affirmait que les poursuites contre le général Hassan n’auraient jamais dû relever du domaine pénal et auraient dû se limiter à l’aspect disciplinaire, et s’interrogeait sur le fait qu’on «exige d’un chef des services de renseignement de respecter des consignes générales, alors que ses missions imposent que l’on s’affranchisse, parfois, de la contrainte imposée par les règles et la transparence. La destruction de documents qui se rapportent au renseignement et aux opérations secrètes peut se comprendre». Pour Nezzar, «pareil jugement, énoncé au tribunal militaire d’Oran, peut faire jurisprudence et, dans ce cas-là, les conséquences seraient fâcheuses, surtout eu égard à la confiance que doivent nourrir les soldats, sous-officiers et officiers, visà-vis de leur hiérarchie». Pour sa part, l’ex-patron du département du renseignement militaire avait souligné que «pour l’opération qui a valu au général Hassan l’accusation d’‘‘infraction aux consignes générales’’, j’affirme qu’il a traité ce dossier dans le respect des normes et en rendant compte au moment opportun (…). Il a géré ce dossier dans les règles, en respectant le code de travail et les spécificités qui exigent un enchaînement opérationnel vivement recommandé dans ce cas d’espèce».
Pour les plus avertis, le général Hassan faisait partie des dommages collatéraux d’une «lutte de clans» entre l’ex-patron du renseignement militaire, le général Toufik, et feu Gaïd Salah, notamment durant l’automne 2013, après le retour du Président déchu de l’hôpital militaire de Val-deGrâce, en France, après une longue convalescence. Une «lutte» qui préludait le démembrement du Département du renseignement, sous le nom de «restructuration», à travers des opérations de mise à la retraite de nombreux cadres, dont beaucoup à un âge très jeune, des poursuites judiciaires, des mesures de mutation disciplinaire, de la neutralisation du service d’enquête judiciaire, etc., avant que le premier responsable ne soit éjecté, en 2015. Quelques mois seulement avant que le général Hassan, connu pour être proche du général Toufik, et surtout pour avoir tenu tête à feu Gaïd Salah, ne soit arrêté et placé en détention. Prévu aujourd’hui, son procès se tient trois mois après qu’il ait purgé la peine maximale de 5 ans de réclusion, qui lui a été infligée, et quitté la prison. Il comparaîtra en étant en liberté.