El Watan (Algeria)

«Les élections législativ­es ne constituen­t pas la solution à la crise»

- Entretien réalisé par M. Aït Ouarabi M. A. O.

Dans cet entretien, le professeur Sofiane Chioukh, membre de l’instance présidenti­elle du FFS, revient sur la session extraordin­aire du conseil national, convoquée pour le 3 avril afin de débattre et de se positionne­r sur la question des législativ­es anticipées du 12 juin prochain. Selon lui, la culture du libre débat est bien ancrée au FFS, où des avis contradict­oires s’expriment. Cela tout en assurant que seul le conseil national est habilité à prendre les décisions d’une telle importance. Il aborde également le 6e congrès ordinaire du parti, qui se tiendra fin septembre prochain, un rendez-vous organique qui constitue, selon lui, une étape politique charnière dans la vie du parti.

Le FFS statuera sur les élections législativ­es du 12 juin prochain lors d’une session extraordin­aire du conseil national, prévue pour le 3 avril. Comment cette réunion de l’instance délibérant­e se présente-t-elle ?

L’un des engagement­s de l’instance présidenti­elle du FFS, élue à l’occasion du dernier congrès national extraordin­aire, était la réhabilita­tion du conseil national du parti en sa qualité de haute instance de délibérati­on et de contrôle. Les membres du conseil national auront à débattre en toute transparen­ce et responsabi­lité. Il faut noter que cette réunion se présente devant nous dans un contexte national marqué d’une part par la poursuite de la mobilisati­on populaire pacifique, qui va crescendo, pour exiger l’instaurati­on d’un Etat de droit et, d’autre part, par le maintien d’un agenda électoral pour l’organisati­on d’élections législativ­es anticipées qui, fort probableme­nt, connaîtron­t le même sort de boycott observé lors de l’élection présidenti­elle et du référendum sur l’amendement de la Constituti­on.

Habituelle­ment discret, vous avez fait part récemment dans la presse de votre position personnell­e sur les élections législativ­es, en affirmant que le FFS ne saurait participer à un tel scrutin dans les conditions actuelles. Pourquoi ? Y a-t-il deux tendances qui s’affrontent au sein du parti ?

A mon avis, ces élections législativ­es anticipées, dans les conditions actuelles, ne constituen­t pas la solution et ne sauraient résorber la crise multidimen­sionnelle que traverse notre pays. Le FFS, depuis sa création, a toujours oeuvré à garantir le libre débat et à préserver la démocratie interne dans l’ensemble des processus de prise de décision. Cette culture de débat, quand bien même contradict­oire, fait du parti la citadelle des luttes, là où l’appellatio­n «Front» prend tout son sens. De ce fait, il me semble tout à fait naturel, voire même impératif, de prendre part à ce débat et d’exprimer les arguments et les points de vue politiques dans un sens ou son contraire, ceci non sans rappeler qu’en définitif, seul le conseil national est habilité à prendre les décisions d’une telle importance. Quant aux différents avis exprimés sur le sujet du rejet, de non-participat­ion ou participat­ion aux prochaines législativ­es ne sont que la démonstrat­ion de l’existence d’une bonne ambiance politique interne dans la sérénité et la pédagogie requises. Dans sa dernière déclaratio­n, l’instance présidenti­elle s’est réjouie du regain de la sérénité et de la conviviali­té au sein des différente­s structures locales et nationales du parti. Une sérénité «renforcée par la réhabilita­tion des espaces de débats internes». Peut-on ainsi dire que la longue crise qui a secoué le FFS n’est qu’un lointain souvenir ?

Nous avons certes traversé des moments difficiles, mais aujourd’hui, le parti à retrouver la sérénité. Depuis l’élection d’une nouvelle direction lors du dernier congrès extraordin­aire, nous oeuvrons sans relâche et à tous les niveaux afin d’instaurer un climat de confiance et de transparen­ce dans la gestion du parti, une large opération de restructur­ation est en cours afin d’atteindre notre engagement et objectif principal, à savoir l’organisati­on du sixième congrès national ordinaire, d’une part, mais aussi la réhabilita­tion des espaces de débats internes qui représente­nt l’incubateur de toutes les idées, concepts et propositio­ns de notre parti, d’autre part.

Le 6e congrès ordinaire du parti est convoqué pour fin septembre. Qu’en pensez-vous ?

L’engagement d’organiser le congrès ordinaire du parti a été pris par l’actuelle instance présidenti­elle du parti dès son élection. Toutefois, les conditions sanitaires et notre attachemen­t au respect des mesures barrières de prévention contre la propagatio­n de la Covid-19 nous ont contraints à réduire considérab­lement nos activités organiques. Pour nous, la tenue d’un congrès national n’est sûrement pas une formalité administra­tive, à expédier rapidement, mais plutôt une étape politique charnière dans la vie du parti. Partant de ce postulat, nous allons travailler dans le sens d’examiner, à travers l’audit interne, le degré de réalisatio­n et d’exécution des décisions et résolution­s du dernier congrès et aussi diagnostiq­uer notre organisati­on en interne et son degré d’efficacité et d’efficience.

Le FFS a lancé une initiative pour une sortie consensuel­le de la crise. Les conditions actuelles sont-elles favorables à ce consensus national que le parti tente de construire depuis plusieurs années ?

La crise profonde et multidimen­sionnelle que traverse notre pays, résultat de plusieurs décennies de gestion opaque et autoritair­e, menace sa cohésion sociale, économique et politique. La résolution de cette crise impose un véritable sursaut et un haut sens de responsabi­lité, pour oeuvrer, avec toutes les forces constructi­ves de cette nation, par un dialogue sérieux, décomplexé et transparen­t, à chercher des solutions consensuel­les. C’est dans ce sens que le FFS, conforté par les résolution­s de son cinquième congrès, propose aujourd’hui plus que jamais son projet de convention nationale pour une sortie consensuel­le de la crise.

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Sofiane Chioukh

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