Le mouvement se renforce à l’est du pays
Les réactions étaient prévisibles, hier, après l’empêchement par les services d’ordre d’un rassemblement pacifique tenu mardi dernier par quelques dizaines d’étudiants et de citoyens sur la place Ahmed Bey (plus connue par Dounia Ettataraif) au centre-ville de Constantine. Il n’aura fallu que quelques minutes pour que les policiers agissent pour disperser les présents et embarquer certains d’entre eux. Une action vivement dénoncée lors de la marche d’hier, marquée par la présence de centaines de Constantinois, déterminés à poursuivre leur mouvement jusqu’à la satisfaction des revendications du hirak. «Pourquoi les étudiants et les citoyens ont été malmenés mardi dernier à la place Ahmed Bey, pourtant le rassemblement était pacifique comme celui de vendredi ; c’est de la hogra caractérisée ; mais cela ne nous empêchera pas de poursuivre notre mouvement», a affirmé une étudiante. Un mouvement qui a été marqué hier aussi par des commentaires portés sur des écriteaux faisant allusion à tout ce qui a été dit sur les réseaux sociaux et dans la presse sur la mainmise du Rachad sur le hirak, alors que beaucoup de participants à ces marches ne se revendiquent nullement de ce mouvement et affirment qu’ils continueront toujours de défendre leurs idées. L’un d’entre eux a choisi de l’exprimer ainsi : «Nous sommes différents idéologiquement et politiquement, mais le hirak nous réunit.»
La marche d’hier, en dépit d’un nombre de participants moins important que celui de vendredi dernier, a été l’occasion pour maintenir la pression sur le pouvoir à travers des slogans comme «Rendez le pouvoir au peuple», «L’Algérie est plus grande que la bande», «la légalité du hirak est au-dessus de celle des élections» et d’autres réclamant encore une fois la libération des détenus du hirak.
Par ailleurs à Annaba, ceux qui ont misé sur le renforcement du mouvement populaire pacifique ont remporté le pari. En effet, il s’est confirmé encore une fois, hier dans la wilaya, au 111e vendredi marquant le début du mois d’avril avec le retour en force des manifestants, adultes, jeunes et moins jeunes, des deux sexes. D’aucuns ont constaté que les rangs de ces derniers se sont grossis avec l’affluence des citoyens venus des quatre coins de la wilaya. Cette confirmation a été précédée par une autre, vendredi dernier. Pour marquer la force de ce fort «come-back», l’itinéraire habituel de la marche a été modifié pour intégrer au long tour du cours de la Révolution, la plus importante place publique de la wilaya, la rue Ibn Khaldoun (ex-Gambetta). Une manière de marquer la fermeté du peuple algérien face au système en place, dont les hirakistes revendiquent le départ immédiat. Les slogans scandés par les protestataires durant la marche de ce 111e vendredi convergeaient tous vers le rejet catégorique des élections législatives. Ce rejet est, comme d’habitude, assorti d’hostilités à l’encontre du système. Les manifestants, qui réclamaient hier la souveraineté du peuple dans ses choix, promettent de continuer à battre le pavé jusqu’à la naissance réelle d’une nouvelle Algérie, démocratique, des libertés et des droits.
A Jijel, en dépit d’un nombre plus tenu de manifestants, la marche hebdomadaire a tout de même eu lieu, mais sonnant comme un acte assurant une permanence. Si l’on est loin des milliers de manifestants d’avant, certains appellent à regarder en face les choses pour déterminer le pourquoi de cet état de fait. Est-ce la peur ? La pression ? Ou autre chose de plus pernicieux ? Les marcheurs ont réitéré les éternels appels pour asseoir un Etat civil à la place d’un régime militaire, rejeté «les législatives avec les bandes», réaffirmé qu’il n’y a ni islamiste ni laïc dans le hirak, mais que les Algériens «sont des frères unis face à la bande qui vole en plein jour». Un slogan longtemps disparu a refait surface : «Djazaïr horra dimocratia». Les généraux ont comme d’habitude eu leur lot de slogans, de même que les services de sécurité assimilés à des terroristes.