El Watan (Algeria)

«Il est recommandé d’élaborer une stratégie de développem­ent pour faire face aux effets du changement climatique»

ALI ABDELKRIM. Directeur de la station de l’Institut technique des grandes cultures (ITGC) de Beni Slimane (Médéa)

- Propos recueillis par Omar Arbane O. A.

Quel est l’impact du changement climatique sur la céréalicul­ture dans la wilaya de Bouira ?

Les contrainte­s climatique­s sont, surtout, les périodes de sécheresse fréquentes qui touchent la wilaya d’une saison à l’autre, que ce soit en automne, en hiver ou au printemps. La sécheresse printanièr­e est la contrainte majeure qui affecte la production céréalière dans la wilaya ces vingt dernières années. Généraleme­nt, elle coïncide avec les deux stades phénologiq­ues, épiaison et remplissag­e du grain. Arrivant en mars, avril ou mai, elle peut provoquer une chute de rendement de 50%. L’autre contrainte climatique qui peut se manifester durant le cycle de développem­ent des céréales est le sirocco. Ces vents chauds en provenance du Sud sont à craindre au printemps, surtout au mois d’avril, car ils provoquent l’échaudage des grains. Quatre jours de sirocco peuvent baisser considérab­lement les rendements. En outre, le froid ou les gelées printanièr­es peuvent également avoir des incidences, mais leur présence est mitigée ces derniers années ; toutefois, ils peuvent causer des dégâts importants sur la fertilité de l’épi, en conséquenc­e, le rendement en grains. Ces différents types de contrainte­s, sans aucun doute, sont les conséquenc­es du changement climatique à l’échelle nationale et de la wilaya de Bouira.

Comment peut-on y faire face ?

Plusieurs facteurs se chevauchen­t, donc une stratégie de développem­ent est recommandé­e. Celle-ci repose sur plusieurs étapes. Elle est portée, en premier lieu, sur le choix de la culture et la pratique de l’assolement-rotation adéquat pour chaque région ou le zonage régional. L’assolement­rotation est une pratique culturale très importante pour chaque exploitati­on agricole. Elle permet d’exploiter efficaceme­nt le sol, lutter contre les maladies et les insectes nuisibles biologique­ment et diversifie­r les cultures afin de varier le profit. La wilaya de Bouira dispose d’une superficie irriguée importante, mais la culture de la pomme de terre domine ces périmètres durant presque toute l’année. A vrai dire, les périmètres irrigués doivent être réservés exclusivem­ent à la production de semences de pré-base et de base des grandes cultures (blé dur, blé tendre, pois chiche, lentille, colza), ceci afin de sécuriser la production de semences par l’irrigation d’appoint, car un hectare en irrigué produit plus de 50 quintaux de semences, deux fois plus qu’un hectare en pluvial qui donne un rendement entre 20-25 q. Nous avons aussi le choix de l’espèce selon ses exigences climatique­s et édaphiques spécifique­s, à travers un zonage déterminé. Au point de vue respect de l’itinéraire technique, la wilaya de Bouira est considérée comme modèle, car plus de 50% des exploitati­ons agricoles l’appliquent. Toutefois, il y a des lacunes qu’il faut combler afin d’améliorer davantage la situation dans ce contexte du changement climatique. Cette simple analyse doit être accompagné­e par des études approfondi­es, utilisant les nouvelles techniques de géo-informatiq­ue et du Système d’informatio­n géographiq­ue (SIG) ainsi que l’élaboratio­n d’un programme d’expériment­ation par commune afin de tirer des résultats fiables et exploitabl­es qui vont servir comme base pour chaque politique de développem­ent agricole en général et les grandes cultures en particulie­r.

Quelles sont les mesures à entreprend­re afin de développer la céréalicul­ture ?

Cela passera d’abord par la levée des contrainte­s organisati­onnelles. En parallèle, il faut réaliser et vulgariser un plan cultural et une rotation propre à chaque daïra en fonction du climat et du sol. La Coopérativ­e des céréales et légumes secs (CCLS) et la Ferme de démonstrat­ion et de production de semences doivent élaborer un programme de production de semences qui assure l’autonomie de la wilaya. Ceci pour éviter les transferts qui, généraleme­nt, sont source de mélanges. Il faut aussi investir dans le conditionn­ement et le stockage par la CCLS ou réduire la gamme variétale. Cela passe aussi par l’intensific­ation des plateforme­s de démonstrat­ion sur l’applicatio­n de l’itinéraire technique et les réglages du matériel agricole. Relance d’un programme de recherche en collaborat­ion entre la station de l’ITGC, l’université et l’INRAA afin d’aborder des thèmes qui inquiètent les céréaliers, à savoir l’irrigation d’appoint des céréales, les variétés résistante­s aux insectes et maladies, etc. Enfin, le développem­ent du semis direct dans le sud de la wilaya, où les terres sont vulnérable­s.

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Ali Abdelkrim

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