Le poète du hirak Tadjadit et quatre activistes écroués
Main lourde de la justice contre des activistes du mouvement populaire. Mohamed Tadjadit, Malik Riahi, Soheib Debaghi, Noureddine Khimoud (Nadjib Milano) et Tarik Debaghi ont été placés, jeudi, sous mandat de dépôt après leur présentation devant le juge d’instruction du tribunal de Sidi M’hamed (Alger), dans le cadre de l’affaire du mineur (Ch. S.), 15 ans, qui a accusé la police de l’avoir «maltraité» après son arrestation lors de la marche de samedi dernier. Leur présentation s’est faite très tôt, sans leurs avocats. «Ils ont été présentés devant le procureur du tribunal de Sidi M’hamed d’Alger à 8h30 avant l’arrivée des avocats. Le procureur a transmis leurs dossiers au juge d’instruction», précise le
Comité national pour la libération des détenus (CNLD). Mohamed Tadjadit, «poète du hirak», et Malik Riahi ont été arrêtés dans la soirée du dimanche 4 avril, dans un appartement à Aïn Benian (Alger), et placés en garde à vue au commissariat de la rue du docteur Trolard. Leurs camarades, Soheib Debaghi, Noureddine Khimoud et Tarik Debaghi ont été arrêtés à Barika (Batna) lundi 5 avril, à bord d’un véhicule et transférés vers Alger (Cavaignac) dans la soirée, précise le CNLD. Les mis en cause sont poursuivis pour «direction et organisation d’une association de malfaiteurs», «diffusion de fausses informations de nature à troubler l’ordre public», «atteinte à la vie privée d’un enfant et son exploitation à des fins contraires à la morale», «incitation à la débauche» et «détention de stupéfiants (drogue) pour consommation». Un sit-in a été organisé durant la journée de jeudi devant le tribunal de Sidi M’hamed, parmi les manifestants se trouvaient les familles des mis en cause, et l’adolescent.
LA LADDH RÉCLAME UNE ENQUÊTE «IMPARTIALE»
Dans la soirée de jeudi, le procureur général près la cour d’Alger a présenté, lors d’un point de presse, les «résultats des investigations» ayant été ordonnées sur la vidéo dans laquelle paraissait le mineur qui «prétend avoir subi une agression sexuelle lors de son arrestation, samedi le 3 avril 2021, alors qu’il participait à une manifestation non autorisée». Le Comité contre la torture et les conditions carcérales inhumaines (CCTCCI) estime que l’enquête «tend à nous révéler les véritables objectifs pour laquelle elle était ouverte». «Lors de son point de presse ayant trait à l’état d’avancement de l’enquête, le procureur général a donné l’orientation vers lesquelles sont dirigées les investigations qui visent à disculper les auteurs des agressions sur le mineur (…), à savoir chercher des bouc émissaires parmi les jeunes ayant dénoncé les abus à son encontre», souligne le comité qui s’en prend aux médias, qui distillent «des allégations mensongères sur la victime et des jeunes du hirak», et au bâtonnier d’Alger, dont la déclaration est «venue lever d’une manière définitive le voile sur les desseins inavoués et machiavéliques que cache l’ouverture de cette enquête». Pour Fetta Sadat, avocate et ex-députée du RCD, «l’histoire retiendra la mise à mort de principes universels, tels que le secret de l’information et la présomption d’innocence et qu’en plus de virulents réquisitoires ont été clamés en public, en dehors du prétoire et avant l’ouverture d’un quelconque procès». Outré lui aussi par la décision du tribunal de Sidi M’hamed, le vice-président de la LADDH, Saïd Salhi, annonce que la Ligue revendique une «enquête impartiale et un procès équitable pour faire éclater la vérité, dire le droit et faire justice».