El Watan (Algeria)

La fidélité des vendredist­es

- S. Arslan, M.-F.Gaïdi, K. Ouhab et Fodil S.

Depuis la reprise des marches, lundi 22 février 2021, journée de son deuxième anniversai­re, le hirak à l’Est est désormais parti pour ne plus s’arrêter. Hier encore à Constantin­e et juste après la fin de la prière du vendredi, le mouvement s’est ébranlé à partir de la place des Martyrs, face à un dispositif sécuritair­e maintenu dans les lieux habituels, comme c’était le cas lors des précédents vendredis et qui n’a pas connu un quelconque renforceme­nt. La marche d’hier est survenue aussi dans un climat de tension et d’appréhensi­on. Beaucoup de rumeurs ont circulé sur d’éventuelle­s arrestatio­ns ou l’interdicti­on de la marche. Il y a eu surtout beaucoup d’interpréta­tions après les mises en garde du Haut Conseil de sécurité, réuni, mardi dernier, sous la présidence de Abdelmadji­d Tebboune. Finalement, les choses se sont déroulées globalemen­t dans le calme, malgré quelques escarmouch­es entre des manifestan­ts et des automobili­stes énervés à la rue

Abane Ramdane, où des sages sont intervenus pour calmer les esprits. Ce qui a poussé certains à lancer des appels à la vigilance contre les tentatives de division du hirak. «Depuis plus de deux ans, notre mouvement a toujours été pacifique. Il ne faut pas céder aux rumeurs et aux provocatio­ns, car il y aura toujours des tentatives pour diviser le hirak en jouant sur certaines sensibilit­és. Chacun doit respecter les idées de l’autre, mais le hirak doit rester uni pour atteindre ses objectifs», a averti un vieil homme habitué des marches du vendredi à Constantin­e. C’était d’ailleurs le même souffle qui a animé les habitants de la wilaya de Annaba en ce 112e vendredi, durant lequel ils ont persisté et signé pour le départ immédiat et sans aucune condition du système en place. Par centaines, ils sont venus des quatre coins de la wilaya pour être à ce rendez-vous dont le point de chute est le Cours de la Révolution et ses alentours. Sur fond de bruit des sirènes d’une ambulance dont les manifestan­ts lui ont cédé le passage, ils ont manifesté, pacifiquem­ent, en scandant différents slogans dont le dénominate­ur commun est : «Hey la bande, nous sommes toujours debout pour restituer les droits des martyrs, sans arrêter notre mouvement». D’autres insistent sur : «Pas d’élections avec la bande».

DES APPELS POUR LA LIBÉRATION DES DÉTENUS

Sur les pancartes, des protestata­ires ont brandi des messages appelant à la libération des détenus. L’ambiance était comme d’habitude festive. Aucun engin de police n’a stationné sur le Cours de la Révolution. En majorité en tenue civile, les services de sécurité étaient en retrait. Aucun incident n’est à déplorer. A Skikda, les manifestan­ts ont scandé hier «Wallah mana habsine» (Nous n’abdiqueron­s jamais). Ils étaient en effet quelques centaines à battre le pavé pour maintenir la pression sur le pouvoir et réitérer leur soif d’un pouvoir «civil et non militaire». Menée par des figures locales du hirak, la marche entamée à Bab Kcentina s’est poursuivie jusqu’à la place du 1er Novembre près de l’hôtel de ville avant de revenir vers le point de départ et de se poursuivre jusqu’aux Allées du 20 Août 1955. Des refrains conjonctur­els ont également été fredonnés, comme «Les élections ne sont qu’une pièce théâtrale, le problème est dans la légitimité». Des manifestan­ts ont exprimé de nouveau leur courroux par rapport à la presse, considérée comme «la source de nos problèmes» ont-ils laissé comprendre avant de clamer leur amour à la chaîne «El Magharibia» «la chaîne du peuple» scandait une partie des marcheurs. D’autres revendicat­ions à caractère local ont été brandies pour demander l’emprisonne­ment d’anciens responsabl­es vivant dans la wilaya de Skikda. Par ailleurs à Jijel, les derniers événements, notamment l’affaire Chetouane et la sortie de mardi dernier considérée comme des «menaces», ont ravivé des slogans dénonçant les services de sécurité, qualifiés une fois encore de terroriste­s et de «haggarine», et le pouvoir. Le président Abdelmadji­d Tebboune sera particuliè­rement ciblé par les slogans qui lui dénient toute légitimité et qui le présentent comme la façade du pouvoir militaire. Des appels ont été lancés pour libérer les détenus d’opinion. La visite du Premier ministre français (annulée) a été aussi l’occasion pour les marcheurs de qualifier les tenants du pouvoir d’enfants «de Bigeard». Plusieurs manifestan­ts hissaient d’ailleurs bien haut les photos des dernières personnes arrêtées suite à l’affaire Chetouane. Arrivés devant le siège de l’ANIE, les marcheurs ont scandé «Pas d’élection avec la bande», alors que sur les écriteaux arborés par certains manifestan­ts, on pouvait lire «Non au 12/12 bis» et «Macron casse-toi».

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