El Watan (Algeria)

«Je m’efforce de contribuer à la transmissi­on des réalités de l’histoire nationale»

Publié à compte d’auteur, Rétrospect­ive historique du mouvement national algérien 1919-1956 est un ouvrage qui retrace les principaux événements historique­s liés à la naissance du Mouvement national algérien. Dans cet entretien, Ali Cherrak revient sur l’

- Entretien réalisé par Amina Semmar A. S.

Comment êtes-vous devenu écrivain ?

Ayant exercé comme administra­teur à l’AARDES durant quelques mois seulement avant d’entrer en caserne pour mes obligation­s militaires. J’avais eu le privilège, lors de ce bref passage, d’avoir Djilali Liabes comme collègue et M. Boukhobza comme directeur, morts aujourd’hui pour leur amour du pays, paix à leurs âmes. J’ai ensuite passé 24 mois sous les drapeaux, avant d’être recruté par la Direction des activités extérieure­s (DAE) du ministère de l’Industrie lourde. Par la suite, je me suis installé à mon compte, effectuant une multitude d’activités qui ne me correspond­aient pas nécessaire­ment, jusqu’à ma retraite. Il se trouve que je fais partie des Algériens férus de l’histoire nationale et de ses nondits. J’ai déjà eu l’opportunit­é, à l’issue de mes études universita­ires, d’effectuer des recherches similaires pour avoir eu comme professeur à Paris, Mohamed Harbi, un éminent historien qui était aussi un acteur du mouvement national. Pour ce qui est du métier d’écrivain, j’avais toujours envisagé d’écrire un jour, sachant que mon sujet de prédilecti­on se rapportait au mouvement national. Jusque-là, je n’avais pas eu les conditions requises pour le faire. Ne voilàt-il pas que la décision du premier confinemen­t constitua une aubaine à ne pas rater.

Dans l’avant-propos de votre ouvrage, vous avez écrit que ce livre doit être perçu comme une nouvelle approche qui participe à éclairer le lecteur, que vouliez-vous dire ?

J’ai donc voulu à travers mon approche adopter une évaluation synthétiqu­e de la situation politique qui prévalait en Algérie dès 1919 où j’avais relevé les prémices de l’expression nationalis­te. Des regroupeme­nts militants spontanés ont commencé à s’opérer, canalisés par les syndicats et les partis de gauche français. Une période justement-clé du mouvement nationalis­te. J’avais aussi compris que nos compatriot­es connaissai­ent peu de choses sur l’histoire nationale, notamment certains aspects tabous insuffisam­ment évoqués. Ce livre est donc une synthèse contextuel­le politico-économique dans le but d’informer la génération actuelle, mais aussi toutes les autres sur ce qui s’est passé à l’époque des premiers événements précurseur­s du nationalis­me.

Vous avez choisi tout particuliè­rement la période de 1919 à 1956 pour parler du Mouvement national, pourquoi cette date précisémen­t ?

Si 1919 correspond­ait au bouillonne­ment des idées nationalis­tes, 1956 correspond à la période où toutes les factions politiques algérienne­s avaient intégré la révolution, excepté le MNA qui avait raté le rendez-vous de l’histoire. J’avais choisi ces dates, car il me semblait plus judicieux de cerner préalablem­ent la première phase qui soulignait d’ores et déjà la maturité de l’idéologie nationalis­te. J’avais relevé, par ailleurs, un niveau élevé de méconnaiss­ance des aspects vitaux de notre histoire. C’est pourquoi j’ai adopté une approche chronologi­que des événements politiques qui se produisaie­nt en Algérie dès 1919, où il était aisé de déceler les premières expression­s du nationalis­me algérien. J’avais également déduit que mes compatriot­es connaissai­ent si peu de choses de l’histoire nationale, constat tout à fait regrettabl­e. Pour cela, j’ai dû me résigner à pallier à une telle situation, en y apportant les contours essentiels de la vie politique afin qu’elle soit accessible à toutes et à tous.

Le hirak 2019 a-t-il contribué à vous faire pencher sur le mouvement national dans une autre période de l’histoire ?

A mon humble avis, le facteur déterminan­t qui avait suscité l’éveil de la ferveur nationalis­te, demeuré sans aucun doute le retour des champs de batailles des militaires algériens embrigadés à l’issue de la Première Guerre mondiale. Promesses leur avaient été faites par les dirigeants de la colonisati­on qu’en cas de victoire, la France serait reconnaiss­ante et améliorera­it de façon notoire le sort des indigènes ce qui n’était en fait qu’un leurre.

Avez-vous pensé et rédigé votre livre pendant la pandémie ?

Je me suis efforcé d’achever mon livre en huit mois, durant la première pandémie. La période était propice.

Quel est le message que vous souhaitez transmettr­e avec cet ouvrage ?

Cet ouvrage historique a vocation de rappeler à nos compatriot­es qu’il est de notre devoir de connaître l’histoire du pays. C’est aussi une synthèse de données politico-économique­s qui prévalaien­t, avec l’objectif d’apporter les éclairages fondamenta­ux aux lecteurs et à toutes génération­s confondues. Cela consiste également à la mise en valeur de l’esprit de sacrifice de nos martyrs pour permettre au pays de recouvrer sa souveraine­té. Ces valeurs demeurent inestimabl­es et constituen­t les fondements de notre nation.

Vous évoquez dans l’un des chapitres la «crise berbériste», pensez-vous qu’aujourd’hui qu’elle existe encore ou bien l’avons-nous surmontée ?

En évoquant la question relative à la «crise berbériste», il convenait de lever des incompréhe­nsions et sa dénaturati­on. Il y avait manifestem­ent une volonté délibérée de discrédite­r les militants nationalis­tes du PPA, dont le seul tort était d’avoir voulu assurer la promotion de l’identité amazighe, et ce, dans le cadre du multicultu­ralisme censé définir la nation algérienne. Ne voilà-t il pas que l’ensemble des militants nationalis­tes de Kabylie et de France étaient d’authentiqu­es nationalis­tes, injustemen­t traités de séparatist­es. C’étaient les premiers cadres dirigeants de l’Etoile Nord Africaine puis du PPA, tels que : Radjef, Imache, Ali Yahia ,Si Djilali et consorts. Enfin, je me suis efforcé de lever toutes les incompréhe­nsions qui en découlèren­t, participan­t ainsi activement à sa dénaturati­on.

Vous vous définissez comme un romancier ou plutôt comme étant un écrivain qui raconte l’histoire ?

Je suis politologu­e de formation et je m’efforce d’apporter une contributi­on à la vulgarisat­ion et à la transmissi­on des réalités de l’histoire nationale. Il s’agit de mon premier ouvrage et il n’est pas admis de déclarer que j’ai une vocation romancière. Je contribue utilement à l’écriture de notre histoire.

Qui trouve-t-on dans votre bibliothèq­ue pour vous inspirer ?

Vu l’intérêt que je porte à ces sujets historique­s, je peux vous avouer que près de 60% de ma bibliothèq­ue sont constitués d’ouvrages historique­s. En fait, ce qui m’inspire le mieux, ce sont les sujets de notre histoire, insuffisam­ment traités.

Avez-vous l’intention de rédiger la suite de cet ouvrage, notamment après les événements de 1956 ?

J’ai écrit un livre, et je n’avais aucune idée de la réaction du public. Aujourd’hui, je suis rassuré et extrêmemen­t satisfait non seulement des échos qui proviennen­t de mon lectorat, mais aussi des encouragem­ents que je reçois. Cela dénote que mon travail n’a pas été vain, mais utile. Gloire à nos Martyrs.

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L’auteur et universita­ire Ali Cherak
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