Le pouvoir d’achat en chute libre
● Après une période de crise sanitaire ayant un impact direct sur le marché du travail, le pouvoir d’achat continue sa chute libre.
Que le Ramadhan commence aujourd’hui ou demain, l’incapacité des Algériens à affronter ce mois de grande consommation reste la même. Après une période de crise sanitaire ayant un impact direct sur le marché du travail, le pouvoir d’achat continue sa chute libre.
Il est 10h. Boualem, retraité et père d’une famille, traîne dans le marché de fruits et légumes de Birkhadem depuis une heure déjà. Bien que ce marché couvert soit connu par ses prix les plus bas de tout l’Algérois, ce sexagénaire ayant à charge 4 filles universitaires peine à remplir son couffin. Entre les fruits, légumes et les fruits secs indispensables à la préparation de quelques tajines, les 30 000 DA que reçoit mensuellement Boualem ne suffisent pas, encore moins les charges de ce mois dit de «piété». «Je ne sais plus quoi faire. Hier, j’ai passé la soirée avec mon épouse à faire la liste des achats nécessaires. C’est injuste de devoir compter ses sous pour subvenir à ses besoins élémentaires», se désole-t-il avant de sortir un bout de papier de sa poche : la fameuse liste d’achat.
Farine, semoule, fruits et légumes, dattes, sucre, feuilles de brik, huile et viande hachée. Les 5000 DA que Boualem avait réservés à cette lourde mission risque d’être épuisés dès les premiers achats. Pour la farine, la semoule et le sucre, le problème ne se pose pas, leurs prix étant plafonnés. Les feuilles de brik aussi. Les prix sont très abordables : 100
DA le paquet de 12 feuilles. Ce sont plutôt les dattes qui sont chères. Il a payé 350 DA pour quelques branches dont le poids était affiché 1 kg. Pour les dattes dites premium, le prix dépasse les 800 DA. Dans le rayon des fruits et légumes, notre retraité a dépensé presque la moitié de son budget. «Nous sommes nombreux à la maison. Je ne peux pas me permettre d’acheter peu. Comme ça j’ai au moins un petit stock pour la 1re dizaine de jours», estime-t-il. La carotte est à 80 DA. Ailleurs, son prix tourne autour de 100 à 120 DA.
La salade à 160 DA, la pomme de terre à 60 DA, la tomate à 130 DA et le persil et la coriandre à 25 DA pour quelques branches. Pour le rayon viande, la viande hachée est à 900 DA le kilo. Un prix impossible à trouver en dehors de Birkhadem. Dans les autres régions de la capitale, les prix ne sont pas moins de 1300 DA le kilo. Les autres variétés de viande sont au-delà des capacités d’achat des Algériens, toutes bourses confondues.
Même les prix des viandes blanches ont pris des ailes depuis plusieurs semaines, en prévision de ce mois de Ramadhan. Même s’ils ont légèrement chuté, le kilo de poulet est entre 350 et 400 DA. Les abats de poulet achetés par les petites bourses ont aussi suivi cette tendance haussière. Alors qu’ils étaient à 150 et 200 DA le kilo, ils sont aujourd’hui à 250 DA. Le plateau d’oeufs (30 unités) surfe aussi sur la même tendance. Il est à 400 DA. L’huile, produit rare sur les étalages, est hors de prix. Notre retraité est revenu sans.
La situation de Boualem est représentative d’une grande majorité de chefs de famille qui n’arrivent pas à affronter la cherté de la vie.
Les carnets de crédit dans les magasins d’alimentation générale en disent long sur les dettes que se font ces derniers pour subvenir à leurs besoins. Ceci sans compter toutes ces personnes qui ont perdu leur poste de travail à cause de la crise sanitaire et n’arrivent pas à retrouver une place et un revenu stables. Le malaise social est palpable tout au long de l’année. Durant le Ramadhan, il est frappant. Les derniers chiffres avancés évoquent plus de 2 millions de familles dans le besoin. Leur nombre augmente de manière drastique chaque année. Ceci contrairement au pouvoir d’achat qui baisse et les salaires n’ont pas été revus depuis 2012. Aujourd’hui, il ne s’agit pas seulement de disponibilité de produits sur le marché mais surtout de la capacité des Algériens à acheter.