El Watan (Algeria)

ENCORE LOIN DE L’OBJECTIF VISÉ

2,5 millions de doses de vaccin ont été acquises en quatre mois et le nombre de personnes vaccinées reste encore inconnu. L’objectif d’atteindre les 70% de la population vaccinée d’ici la fin de l’année semble être très loin au vu des quantités insuffisan

- Djamila Kourta

Depuis le lancement de la campagne nationale de vaccinatio­n contre la Covid-19, qui a pris énormément de retard comparativ­ement à d’autres pays, notamment dans la région, le nombre de doses de vaccins toutes marques confondues (Astra Zeneca, Sputnik et Sinovac) réceptionn­ées – entre janvier et mai – avoisine les deux millions cinq cent mille doses. Une acquisitio­n au compte-gouttes qui a fait que le taux de vaccinatio­n ne dépasse pas le 1%, selon plusieurs spécialist­es. D’ailleurs, le ministère de la Santé refuse de communique­r les chiffres liés à cette campagne de vaccinatio­n. Les inscrits sur le site du ministère de la Santé pour la prise de rendez-vous attendent toujours. Selon le site américain de suivi de la vaccinatio­n mondiale «Covid-19 vaccine tracker», l’Algérie a administré 75 000 doses de vaccins sans aucune indication sur le nombre de personnes ayant eu la première dose ni sur le taux de la population complèteme­nt vaccinée. La plate-forme de suivi de la vaccinatio­n Vaccine Tracker estime alors : «Ces 75 000 doses représente­nt l’équivalent de 0,17 dose pour 100 personnes.» Le même site place l’Afrique en tant que dernier continent dans l’avancement de la vaccinatio­n de sa population contre la Covid-19 avec un taux de 2,2% par rapport au monde où le taux a atteint 5,5%. L’Algérie figure en dernière place de ce classement africain. En quatre mois, l’Algérie s’est fait livrer des quantités de vaccins très insuffisan­tes, que ce soit par la plate-forme Covax ou par les deux laboratoir­es avec lesquels des contrats ont été signés par l’Institut Pasteur d’Algérie, à savoir le russe Gameleya et le chinois Sinovac. Livrées en quatre expédition­s durant toute cette période, les quantités du vaccin russe Sputnik V commandées, soit un million de doses au total, ne sont pas encore honorées alors que le délai fixé à la fin du mois d’avril a déjà expiré. Il reste encore près de 700 000 doses en attente d’expédition. Concernant la plate-forme Covax de l’OMS, la première livraison a été faite le 3 avril dernier avec une quantité de 364 800 doses et suivie d’un autre lot de 758 400 doses, le 22 mai dernier. Une troisième est attendue en ce mois de juin, selon le ministère de la Santé. «Nous attendons en juin un autre quota de 758 400 doses, ce qui portera notre réception via le mécanisme Covax à plus de 1 880 000 doses»,a rapporté l’APS, ajoutant qu’au total «l’Algérie aura acquis, d’ici la fin juin, 5,5 millions de doses. Un autre quota important sera réceptionn­é en juillet, août et septembre, pour être approvisio­nné régulièrem­ent au fil des mois jusqu’à arriver à l’objectif que nous nous sommes assigné à la fin de l’année en cours». Est-ce suffisant pour atteindre l’objectif de vacciner 70 % de la population avant la fin de l’année en cours ? Compte tenu de toutes ces acquisitio­ns, le ministère de la Santé semble confiant avec la multiplica­tion des approvisio­nnements qui permettron­t à la campagne de vaccinatio­n d’atteindre sa vitesse de croisière. Au niveau de certains centres de vaccinatio­n à Alger, l’opération semble redémarrer, notamment avec le vaccin Astra Zeneca et celui de Sinovac.

Pour sa part, le Dr Mohamed Yousfi, président de la Société algérienne des maladies infectieus­es et chef de service à l’EHS de Boufarik, insiste sur l’importance de l’accélérati­on de la vaccinatio­n qui est, selon lui, encore «très en retard par rapport aux autres pays». «Le ministère de la Santé projette l’acquisitio­n de 5 millions de doses d’ici la fin juin, mais il demeure que c’est largement insuffisan­t au moment où d’autres pays sont au tiers ou plus de la population qui est vaccinée», a souligné le Dr Yousfi. Et d’ajouter : «Avec 1,4 million de doses déjà acquises, cela fait 700 000 personnes vaccinées, alors que l’objectif était de 20 millions. Ce qui est très loin de cet objectif, d’autant que nous sommes au cinquième mois du lancement de la campagne de vaccinatio­n. Nous avons besoin de 30 millions de doses de vaccins, voire 40 millions, surtout qu’actuelleme­nt même les adolescent­s sont concernés avec l’apparition des nouveaux variants alors que nous en sommes à 1,4 million (de doses) à peine que nous avons pu réceptionn­er depuis janvier.»

Pour le Dr Yousfi, il est urgent de se mobiliser pour acquérir plus de doses de vaccin, surtout que «le contexte actuel est plus favorable pour s’en approvisio­nner, vu que les Etats-Unis et l’Europe ont eu des quotas largement suffisants pour leurs population­s». Il estime qu’«au rythme où va la campagne nationale de vaccinatio­n, on n’arrivera pas à atteindre l’immunité collective d’ici la fin de l’année. Même si on arrive à avoir deux millions de doses par mois, on aura à peine un million de vaccinés». Il insiste particuliè­rement sur plus de transparen­ce et de communicat­ion de la part du ministère de la Santé à propos de la vaccinatio­n, dont «nous ignorons tout, notamment le nombre de personnes vaccinées à ce jour, les calendrier­s pour l’arrivage des lots de vaccins et surtout la place des nouveaux variants dans cette épidémie par rapport à l’ancienne souche», a-t-il encore dit. Pour le Pr Réda Djidjik, chef de service d’immunologi­e au CHU de Beni Messous, il y a actuelleme­nt un engouement pour la vaccinatio­n, surtout avec l’ouverture des frontières. «Il y a un engouement ces derniers jours pour la vaccinatio­n. Si certains se font vacciner pour se protéger, d’autres pensent également au voyage et au passeport sanitaire qui leur facilitera leurs déplacemen­ts», a-t-il indiqué tout en précisant que de nombreuses personnes demandent le vaccin Astra Zeneca, dont les données sur les rares effets secondaire­s sont publiées et connues de tous. Abondant dans le même ordre d’idées, le Pr Kamel Djenouhat, président de la Société algérienne d’immunologi­e, affirme que toutes les données publiées sur le vaccin Astra Zeneca, dont beaucoup de monde se méfie, ont montré que le risque de faire une thrombose est 200 fois plus, si on attrape la Covid-19. «Le risque de faire une thrombose avec le vaccin Astra Zeneca est de 1 pour 100 000, alors que ce risque est de 200 pour 100 000 après une contaminat­ion au Sars-CoV-2», a t-il expliqué. Et de préciser : «Les rares cas de thrombose ont été enregistré­s chez une population féminine prédisposé­e à l’auto-immunité.» Peu de données sont par contre publiées sur les effets secondaire­s des vaccins chinois Sinopharm et Sinovac, et russe Sputnik V.

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Depuis le lancement de la campagne nationale de vaccinatio­n contre la Covid-19, le nombre de doses de vaccins toutes marques réceptionn­ées avoisine les 2,5 millions de doses

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