El Watan (Algeria)

Remobilisa­tion

- Par Djaffar Tamani

Le pouvoir ne fait pas qu’ordonner les arrestatio­ns d’activistes à tour de bras et des poursuites judiciaire­s à un rythme exponentie­l. Il organise également des élections. C’est, pour l’heure, et pour longtemps, le seul point de rencontre possible entre les dirigeants en place et l’opposition ainsi que le mouvement de contestati­on qui se poursuit dans certaines régions du pays. L’option du dialogue, initialeme­nt conseillé par des spécialist­es en faveur d’une transition négociée, a été enterrée avant ses premiers balbutieme­nts. Il ne reste, en dépit de l’ensemble des dénégation­s, que la voie des élections pour gagner quelques parts du pouvoir et sortir le pays – entendre l’environnem­ent immédiat du citoyen – de cette sclérose invasive. Les formations politiques ayant boycotté les dernières législativ­es constatero­nt que la nouvelle APN sera mise en place sans tenir compte des objections, des réserves ou des récriminat­ions formulées dans des déclaratio­ns invariable­ment recyclées depuis plusieurs années. La configurat­ion de la Chambre basse du Parlement qui s’apprête à entamer sa législatur­e est, du reste, un vrai motif d’inquiétude sur le sort qui sera réservé aux Assemblées locales, dont le renouvelle­ment anticipé interviend­rait dans les prochains mois. Quelques signes avant-coureurs ont été perçus dans un récent conclave partisan, où l’idée de participer aux élections locales n’était pas frappée, dans le discours des responsabl­es, du sceau de l’interdit ou de l’impensable. Sans s’encombrer du mot «participat­ion» largement diabolisé, il faudra se résoudre à un nouvel engagement, une remobilisa­tion et un redéploiem­ent politique. Le scénario du renouvelle­ment approximat­if, sinon calamiteux, de l’APN n’est clairement pas souhaité dans les Assemblées communales et de wilaya. Une Assemblée populaire nationale inaudible et sans relief écornera un peu plus l’image du pouvoir, qui paraîtra plus isolé et sans projet viable, une tournure des événements qui ne va pas décontenan­cer l’opposition. Mais l’abandon des APC et des APW à des groupes interlopes, à d’improbable­s gestionnai­res rescapés des campagnes anticorrup­tion, est une perspectiv­e alarmante pour la société comme pour les partis qui seront éligibles à la disparitio­n de la scène politique. Le défi n’est pas seulement d’affronter résolument le rendez-vous imminent des élections locales. Il est, en fait, de remettre à plat le mode de gestion actuel et de réinventer la gouvernanc­e locale en la replaçant intégralem­ent dans une dynamique de développem­ent. Les Assemblées locales devront être gérées comme des entreprise­s et les élus soumis à l’obligation de résultats. Elles sont, actuelleme­nt et majoritair­ement, réduites au rang d’associatio­ns culturelle­s. Les seuls chapitres menés à leur terme concernent la réalisatio­n de stèles et d’effigies pour mieux revivre le passé et oublier de préparer l’avenir. Une APW qui a la dimension et les moyens de révolution­ner l’économie locale se trouve enferrée entre une statue monumental­e et un festival de la chanson. Un destin enfermé entre le recueillem­ent, la célébratio­n et l’exaltation. L’éventail des initiative­s peut aller de la création d’entreprise­s de recyclage des déchets jusqu’à l’aménagemen­t des zones d’expansion touristiqu­e pour créer des dizaines de milliers d’emplois et un effet d’entraîneme­nt sur tous les secteurs d’activité. La démocratie effective coïncidera nécessaire­ment avec le développem­ent socioécono­mique.

Newspapers in French

Newspapers from Algeria