Quelle protection pour les employés ?
Deux années consécutives, 2019 et 2020, ont été marquées par de fortes turbulences dans le monde de l’entreprise avec la baisse de l’activité dans plusieurs secteurs impactant lourdement les travailleurs.
N> Par Samira Imadalou
ombreux, en effet, sont aujourd’hui les salariés à subir les contrecoups de cette double crise, même si des prémices d’une reprise sont bien là, selon un rapport récent du ministère des Finances qui avance confiant : «Les perte subies en 2020 seront rattrapées en 2021.» Serait-ce réellement le cas ? Les travailleurs en poste et les demandeurs d’emploi bénéficierontils de cette reprise si reprise il y aura ? Réussira-t-on à réduire l’impact de la crise sanitaire et de la chute de l’activité économique sur le plan social ? Ce sont parmi les questions qui s’imposent, alors que les données font lourdement défaut à ce sujet. Une carence qui touche également le volet social en l’absence de mesures efficaces face à une telle situation puisque les mesures décidées par le gouvernement pour venir en aide aux travailleurs ayant perdu leurs emplois en raison de la pandémie n’ont pas été totalement mises en oeuvre. Beaucoup de zones d’ombre ont, en effet, entaché le dispositif en question, laissant place aux incertitudes et aux appréhensions sur l’avenir de milliers de travailleurs au moment où des entreprises croulent sous les difficultés financières. Des difficultés que les mesures de soutien portant sur le report du paiement des tranches de crédit, arrivant à échéance, ou rééchelonnement des créances des entreprises impactées par la pandémie (reconduites pour la 4e fois par la Banque d’Algérie jusqu’au 30 septembre prochain) n’ont pas atténuées. Les indicateurs sont en effet au rouge dans bon nombre d’entreprises majoritairement les PME. C’est ce que résume d’ailleurs une enquête du Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD). Des entreprises algériennes sondées ont indiqué selon cette reconduite étude avoir perdu en moyenne 50% de leurs chiffres d’affaires (CA) en 2020 à cause de la pandémie Covid-19. Suite au confinement, 93% des entreprises interrogées ont noté des difficultés à commercialiser leurs produits. 63% d’entre elles ont dû opter pour un arrêt total de l’activité. L’impact se fait toujours ressentir surtout sur l’emploi. La même source indique à ce sujet que 12% des entités sondées envisagent la réduction de leur effectif, 10% présagent une tension sur la trésorerie, 11% envisagent la fermeture de leur entreprise et 10% prévoient le report de leurs investissements.
PRÉCARITÉ SOCIALE
A moyen terme, la situation ne pourrait pas s’améliorer contrairement à ce que prévoit le rapport du ministère des Finances globalement. Comme cette conjoncture touche essentiellement les PME, c’està-dire le secteur privé, les travailleurs à ce niveau seront les plus touchés, alors qu’ils subissent déjà les conséquences avec des retards de versement des salaires, des résiliations de contrats et autres décisions difficiles à accepter en ces temps crise surtout en l’absence d’un système de protection sociale cohérent. Un système qui exclut les travailleurs du secteur informel qui constitue pourtant, faut-il le souligner, une bonne partie des effectifs chez le privé. Et de surcroît, ce même système est marqué par l’absence de prestations de chômage, ce que la crise a mis clairement en évidence. Et dire que sous d’autres cieux, il y a eu recours à des régimes de protection en cas de chômage et à d’autres dispositifs pour aider les entreprises à maintenir les travailleurs dans l’emploi. Ce qui a permis d’éviter les licenciements dus à des baisses temporaires de la demande et de favoriser une reprise rapide selon l’Organisation internationale du travail (OIT). Cette institution internationale a d’ailleurs émis une série de recommandations dans ce cadre. Il s’agit de renforcer la sécurité des revenus par le biais des transferts en espèces en augmentant les niveaux de prestations et en étendant la couverture offerte par les programmes existants ou de nouveaux programmes. Protéger les personnes travaillant dans l’économie informelle en menant des politiques innovantes qui permettront d’accéder rapidement à ces personnes, en combinant des régimes non contributifs et contributifs, figurent également parmi les propositions de l’OIT. Laquelle appelle par ailleurs à garantir la protection des revenus et des emplois en utilisant les régimes de protection des chômeurs et d’autres mécanismes. En Algérie, le chemin à mener pour mettre en oeuvre ces mesures s’annonce des plus longs puisque le court-termisme est toujours de mise.