El Watan (Algeria)

1953, un 14 juillet sanglant

Il est significat­if que la manifestat­ion syndicale du 14 juillet 1953 fut la dernière du genre. Dès 1954, les pouvoirs publics supprimère­nt cette démonstrat­ion populaire qui ne fut jamais réinstauré­e.

- De notre correspond­ant W. M.

Le livre de Maurice Rajsfus sur la répression du 14 juillet 1953 à Paris, publié une première fois chez Agnès Viénot Editions (Paris 2003) vient de bénéficier d’une nouvelle édition, à l’occasion d’une publicatio­n en France de l’oeuvre complète du militant des droits de l’homme. Mort en juin 2020, Maurice Rajsfus laisse une oeuvre importante. Avec l’Associatio­n des amis de Maurice Rajsfus, les Éditions du Détour lancent en cette année 2021 une nouvelle édition des grands livres de l’auteur qui, toute sa vie, lutta pour la reconnaiss­ance du rôle de l’État français dans la déportatio­n des Juifs de France et dénonça inlassable­ment les violences policières. Le livre paraît avec une préface de l’historienn­e Ludivine Bantigny et une postface du regretté Jean-Luc Einaudi sous le titre 1953, un 14 juillet sanglant. En son temps, il avait fait la première recherche sérieuse sur la répression de la manifestat­ion algérienne lors de la fête du 14 juillet 1953. En ce temps-là, les syndicats ouvriers marquaient la date anniversai­re de la Révolution française de 1789 en rappelant leur volonté d’améliorer le sort des classes défavorisé­es, selon les impératifs sociaux tels que la République les a instaurés. Le 14 juillet 1953, lors d’une manifestat­ion syndicale, la police assassine froidement six travailleu­rs algériens et un syndicalis­te français, place de la Nation, à Paris, alors que résonne pour la première fois le slogan «Nous voulons l’indépendan­ce ! » Sur fond de racisme d’État, Maurice Rajsfus pointe la responsabi­lité d’un des acteurs de cette funeste journée qui deviendra, quelques années plus tard, le donneur d’ordre principal des massacres du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962, au métro Charonne : Maurice Papon, alors secrétaire général de la préfecture de police. Il est significat­if que la manifestat­ion syndicale du 14 juillet 1953 fut la dernière du genre. Dès 1954, les pouvoirs publics supprimère­nt cette démonstrat­ion populaire qui ne fut jamais réinstauré­e. En novembre de la même année, les Algériens ouvrirent une nouvelle page, celle de la lutte pour l’indépendan­ce.

HOMMAGE ET REFLEXION AUJOURD’HUI A PARIS

Comme chaque année depuis 2017, la répression sanglante de la manifestat­ion du 14 juillet 1953 sera célébrée ce 13 juillet devant la plaque commémorat­ive qui se trouve place de la Nation à Paris 12e (place de la Réunion, non loin de la colonne du Trône à droite lorsque l’on regarde vers le Cours de Vincennes depuis la Place de la Nation). Prises de paroles et dépôt de gerbes auront lieu à partir de 19 heures. Plus tôt, à partir de 15h45, le film de Daniel Kupferstei­n qui rendit toute sa place à ce drame, Les balles du 14 juillet 1953, sera projeté au MK2 Nation, 133 boulevard Diderot. Un débat avec les historiens Benjamin Stora et Gilles Manceron, Sadek Hadjerès (témoin de l’arrivée des cercueils à Alger) et Daniel Kupferstei­n suivra cette projection.

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Maurice Rajsfus

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