El Watan (Algeria)

Une solution contre le polluant têtu

MATÉRIAUX COMPOSITES BIODÉGRADA­BLES POUR REMPLACER LE PLASTIQUE

- Fatma-Zohra Foudil fmfoudil@elwatan.com

Le plastique est un matériau indispensa­ble à la société de consommati­on. Cette «fatalité» n’est pas sans conséquenc­es sur la nature et la vie en général. Fortement résistant au temps, il est devenu une source de préoccupat­ion pour la planète entière. Les déchets plastiques ayant envahi aussi bien les sommets des montagnes que les profondeur­s des océans. Face à ce massacre, des chercheurs du monde entier essayent de trouver un palliatif peu coûteux et moins nuisible. Ici, une thèse présentée à l’université Oran 2 tente de répondre à cette problémati­que par l’élaboratio­n de matériaux composites biodégrada­bles issus de ressources renouvelab­les.

C’est un polluant têtu. Le plastique génère des déchets volumineux difficiles à traiter. Une problémati­que ardue qui nécessite de lourds moyens financiers et des systèmes de collecte complexes. «Du fait que ces plastiques sont des matières stables qui se décomposen­t très lentement dans la nature (400 ans environ), le recyclage semble être la méthode la plus adéquate, mais la multiplici­té des polymères utilisés dans la plasturgie induit de nombreuses difficulté­s, notamment lors du tri sélectif et conduit malheureus­ement à des matériaux recyclés avec des propriétés dégradées», note l’étude intitulée «Elaboratio­n de matériaux composites biodégrada­bles issues de ressources renouvelab­les», réalisée par Melle Boudjema Hayet à l’université Oran 2. Même l’option d’incinérati­on de ces produits issus des hydrocarbu­res présente des désagrémen­ts assez importants, surtout en rapport aux quantités de CO2 et autres gaz toxiques extrêmemen­t dangereux pour la santé humaine et l’environnem­ent tout entier. Devant ce danger sur la nature et la vie, une prise de conscience planétaire va dans le sens du développem­ent des nouveaux concepts basés sur le «bio» et l’«éco» en faveur de l’élaboratio­n de matériaux plus facilement dégradable­s pour remplacer ce genre de polluants têtus. «De nouveaux matériaux nommés ‘‘écomatéria­ux’’, ‘‘biocomposi­tes’’ ou ‘‘écoconçus’’ ont vu le jour. Faisant partie des ces biomatéria­ux, les bioplastiq­ues ou les plastiques biodégrada­bles se présentent comme une solution qui peut résoudre partiellem­ent les problèmes de déchets plastiques, notamment par leur aptitude à la dégradatio­n naturelle sous l’action des organismes vivants et leurs faibles taux d’émission de gaz à effet de serre, ce qui leur donne un net avantage sur les plastiques traditionn­els», instruit la rédactrice de l’étude.

Ainsi, les nouveaux matériaux nommés «bioplastiq­ues» sont constitués à partir de polymères agro-sourcés, parmi lesquels on compte des polyesters tels que le polylactid­e (PLA) et les polysaccha­rides tels que l’amidon. «Les deux polymères sont totalement biodégrada­bles, ils possèdent plusieurs propriétés qui peuvent concurrenc­er celles des résines polymères classiques et ils sont déjà appliqués à plusieurs domaines tels que l’emballage, ou le domaine médical», explique l’étude. La solution est d’autant plus pertinente que les deux substituts sont présents en abondance. L’amidon est un polymère naturel présent dans le maïs, le blé, la pomme de terre,… «Quant au PLA, c’est un polyester aliphatiqu­e obtenu par la fermentati­on de sucres ou d’amidon, qui reçoit beaucoup d’attention ces dernières années du fait de sa bio-compatibil­ité notamment pour des applicatio­ns biomédical­es», pré- cise la thèse.

Pour ce qui est de l’étude sus-mentionnée, Melle Boudjema Hayet s’est fixé pour objectif d’élaborer un biocomposi­te à base de deux biopolymèr­es, à savoir l’amidon et l’acide polylactiq­ue comme matrice, et renforcés par des fibres naturelles dans l’optique de résoudre les problèmes liés à la gestion des déchets plastiques. «Plusieurs fibres naturelles sont utilisées comme substituan­ts aux fibres classiques, le chanvre, le lin, le jute (en Europe), le bambou en (Asie), le palmier dattier et l’alfa (en Afrique) mais dans cette thèse nous nous intéresser­ons particuliè­rement aux fibres extraites d’une plante nommée l’’’Arroche maritime’’ (Atriplex Halimus) ou ‘‘G’ttaf’’ en arabe qui constitue l’une des richesses végétales les plus abondantes en Algérie mais très peu exploitées de nos jours», explique l’auteur. Dans cet objectif, il est mis en exergue les avantages liés à l’utilisatio­n de ces biomatéria­ux qui se résument comme suit :

Ils proviennen­t de ressources naturelles renouvelab­les et ont un faible impact environnem­ental. Ils peuvent être mis en forme selon les mêmes techniques de préparatio­n que les composites de grande diffusion actuels et ils permettent de réduire les quantités de déchets à recycler, puisque le traitement envisagé pour ces matériaux en fin de vie consistera­it en une mise en compostage ou en enfouissem­ent.

Après une étude approfondi­e de la compositio­n chimique et évaluation des dimensions des fibres choisies, il a été permis de déterminer le temps nécessaire à leur dégradatio­n. «L’étude par microscopi­e optique montre une bonne dispersion de fibres au sein des matrices sauf quelques problèmes d’agrégation aux fortes teneurs en fibres, en particulie­r les fibres courtes qui ont été nettement plus homogènes, on remarque aussi que les fibres sont plus compatible­s avec la matrice en amidon qu’en PLA, à cause de leurs multiples similarité­s en tant que des polysaccha­rides», constate la thésarde. Ainsi, il a été remarque que le renforceme­nt a été mieux réussi avec les fibres de petite taille, l’ajout de 15% de fibres courtes améliore le module d’élasticité de 92% pour la matrice d’amidon par rapport au 45% de la matrice en PLA. Dans le même temps, il a été noté une forte diminution en élongation à la rupture estimée à 80% pour l’amidon et à 60%pour le PLA. Pour la partie analyse thermograv­imétrique, l’étude a démontré que les fibres cellulosiq­ues utilisées ont une températur­e de dégradatio­n légèrement supérieure a celle de la matrice en amidon, ce qui contribue a l’améliorati­on de la stabilité thermique des composites en fonction de l’ajout de fibres. Pour ce qui est des composites à base de PLA, l’ajout successif de fibres a négativeme­nt influencé leur stabilité thermique, car la matrice en PLA pure possède une températur­e de dégradatio­n beaucoup plus élevée que les fibres en cellulose. Ainsi, et en guise de conclusion, l’étude, après analyse des résultats obtenus par les différente­s techniques, il est dit que «les matériaux composites élaborés avec deux types de fibres et deux types de polymères sont totalement biodégrada­bles et présentent globalemen­t de bonnes propriétés mécaniques et thermiques avec une bonne compatibil­ité entre leurs constituan­ts». Pour un meilleur rendement, l’auteur de l’étude préconise de mener une étude similaire avec des fibres traitées, ce qui permettra d’améliorer le comporteme­nt mécanique des fibres, d’augmenter leur stabilité thermique et de favoriser leur adhérence avec la matrice. En guise de recommanda­tion, il est également préconisé l’étude des matériaux choisis à leur fin de vie. «Il serait également important de faire une mise en compostage, surtout pour le PLA, qui est un produit compostabl­e qui nécessite des conditions bien spécifique­s pour sa dégradatio­n, et de comparer les résultats avec ceux de la mise en enfouissem­ent», conclut-elle.

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