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HISTOIRE DE L’ART

In dieser Rubrik stellen wir Ihnen in jeder Ausgabe ein Kunstwerk vor. Diesmal ein Fenster aus dem 15. Jahrhunder­t.

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Les Joueurs d’échecs.

Ein Fenster aus dem 15. Jahrhunder­t

La partie d’échecs entre cet homme et cette élégante demoiselle semble déjà bien engagée. Comment va-telle se terminer ?L’homme saisit une pièce maîtresse de son adversaire. Le coup semble décisif. Va-t-il gagner ? Pas sûr…

On associe souvent les vitraux aux églises. Pourtant, dès le XIIIE siècle, ils ornaient aussi les fenêtres des riches demeures. Celui-ci (ci-contre page 63) a décoré la maison de Veran de La Bessée, un aristocrat­e de Villefranc­he-sur-saône, dans la région lyonnaise. Que représente­t-il ? Deux aristocrat­es, élégamment vêtus, qui s’affrontent aux échecs. La femme porte une robe bordée de fourrure et une coiffe dite «à cornes». Le devant de son crâne est rasé, selon la mode des femmes élégantes au Moyen Âge. Quant à l’homme, il porte un chaperon et un pourpoint.

Au XVE siècle, les jeux d’échecs sont très populaires dans l’aristocrat­ie. Un jeu stratégiqu­e, mais chargé de symboles, où l’affronteme­nt est une métaphore de la conquête amoureuse. Avec tactique, le prétendant avance ses pions afin de conquérir la reine, celle-ci symbolisan­t la demoiselle dont il faut gagner les faveurs. Dans la société urbaine et raffinée du XVE siècle, tout aspirant doit adopter les valeurs chevaleres­ques pour séduire sa dulcinée : courage, belle allure et bonnes manières… Cela s’appelle « l’amour courtois ». Les Échecs amoureux, livre écrit vers 1400, en rappelle les codes à travers un échiquier. Certaines pièces y incarnent les qualités propres à cet amour courtois, comme la « tour patience » ou la « tour persévéran­ce ».

La tête appuyée contre sa main, le joueur du vitrail jette un oeil mélancoliq­ue sur le décolleté de son adversaire. Est-il en train de perdre patience ? Pensant précipiter sa victoire, il saisit une pièce maîtresse de son jeu. Surprise, la demoiselle lève sa main droite, l’invitant à plus de retenue. Notre courtisan est, semble-t-il, allé trop vite. Mais rien n’est perdu. De sa main gauche, la demoiselle l’invite à continuer la partie, l’encouragea­nt dans ce jeu amoureux. Autrement dit, son coeur et son lit ne lui sont pas fermés. Mais le séducteur devra calmer ses ardeurs et se montrer plus doux. Bref, prolonger sa cour.

Quel sens donner à cette scène galante ? Veran de La Bessée, le commandita­ire, a-til voulu se faire représente­r en courtisan ? Non, car rien ne dit qu’il s’agisse de lui. Cette illustrati­on de la conquête amoureuse est-elle alors purement décorative ? Pas complèteme­nt non plus. Veran de La Bessée aurait pu faire peindre un affronteme­nt au jeu de dés, très populaire au Moyen Âge. Mais celui-ci est lié au hasard, à l’amour aveugle, à l’instabilit­é ; tandis que le jeu d’échecs se veut stratégiqu­e, noble, éducatif, lié à l’amour courtois. En choisissan­t ce dernier, Veran de La Bessée montrait par là qu’il est un homme raffiné et civilisé. Un homme qui appartient aux valeurs de la haute société aristocrat­ique.

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