SOUS LES OBUS SERBES
Linda Allain se souviendra pour le restant de ses jours de la première - et seule - fois où elle s’est retrouvée au coeur d’un conflit armé. C’est au début des années 1990, lors de la guerre en BosnieHerzégovine. Sarajevo était encerclée par les forces serbes. Plusieurs pays occidentaux ont alors uni leurs forces pour assurer la livraison aéroportée de vivres aux citoyens coincés à l’intérieur de la ville. Avec trois collègues de la Croix-Rouge, Mme Allain avait la tâche d’évaluer la situation de quelques centres pour personnes déplacées… en plein coeur de la zone assiégée. «Notre logement pour les deux jours était le Holiday Inn, en plein centre de Sarajevo. Toute une façade de l’édifice avait été détruite par les bombardements - je pouvais voir de la vitre cassée et des rideaux déchirés dans le corridor de l’aile bombardée.» «L’ONU a mis un char blindé à notre disposition et nous devions porter un casque et un gilet pare-balles quand nous sortions de l’hôtel. Nous avons visité quelques installations pour personnes déplacées.» «Un ou plusieurs tireurs embusqués faisaient feu sur les gens qui se promenaient à pied et nous devions courir du char blindé aux portes des édifices en question.» «Une fois nos visites terminées, nous sommes retournés au Holiday Inn. En soirée, j’ai entendu du bruit et les tirs (d’obus) ont commencé. Certains provenaient de la montagne en face de l’hôtel et tiraient dans notre direction, tandis que les autres venaient de la riposte de canons postés tout juste en dessous de ma fenêtre d’hôtel.» «Je me suis couchée par terre entre les deux lits et j’ai mis mon casque et mon gilet pare-balles pour me protéger. Ces tirs ont continué jusqu’à l’aube. Je pensais à ces femmes, à ces enfants et à ces autres personnes déplacées que nous avions rencontrés plus tôt et j’avais le coeur serré. Je craignais pour leur bien-être.» «Lors de notre départ en après-midi, quand nous étions à l’aéroport, nous avons demandé à un soldat suédois s’il avait un bilan des combats de la nuit. il nous a informés que plus de 1200 obus étaient tombés pendant ces quelques heures, mais que personne n’avait été blessé grièvement et qu’aucun centre pour personnes déplacées n’avait été atteint. J’en étais si soulagée.» Mme Allain souligne cette expérience - bien qu’éprouvante - l’a aidée à mieux comprendre les besoins des victimes des conflits armés.