La commissaire aux langues officielles doit être respectée
Que l’on soit libéral ou conservateur, nous n’avons aucune raison de nous réjouir du comportement de nos députés à Fredericton cette semaine. En quelques jours, les élus des deux côtés de l’Assemblée législative ont réussi à faire reculer notre province de plusieurs années dans le dossier des droits linguistiques.
Sans aller dans les détails que vous connaissez déjà, on peut dire sans se tromper que notre premier ministre Brian Gallant et son ministre Donald Arsenault ont manqué plusieurs occasions de se taire en commentant aussi maladroitement le travail de la commissaire aux langues officielles. Et que penser de Victor Boudreau qui, alors que tout le monde tente d’atténuer la crise, en rajoute avec son désormais célèbre «tout est sur la table», un peu comme s’il n’avait pas encore réalisé dans quel merdier ses collègues s’étaient placés.
Que les conservateurs provinciaux ne se réjouissent pas trop, car leur chef Bruce Fitch n’a pas fait mieux, en voulant la démission de Katherine d’Entremont. Il est de mise de questionner son engagement envers la loi sur les langues officielles, puisque ses propos à ce sujet sont toujours vagues et nébuleux.
Précisons d’entrée de jeu que Mme d’Entremont fut choisie à l’unanimité par l’Assemblée législative, selon un processus rigoureux où les partis politiques furent consultés. Voilà que le premier ministre ne se souvient plus de sa participation à cette nomination, en laissant entendre que David Alward est celui qui a embauché la commissaire!
Un rappel au premier ministre qu’il est le responsable de la Loi sur les langues officielles et que la commissaire – comme c’était le cas dans mon autre vie – présente au bureau du premier ministre non seulement son rapport, mais ses recommandations au chef du gouvernement. Et cela chaque année!
Quant à Donald Arsenault, il devrait tourner sa langue sept fois avant de parler. Il en est à sa deuxième gaffe cette année. Un peu plus tôt, pendant la campagne électorale fédérale, il a déclaré que Thomas Mulcair n’était pas le bienvenu à Belledune. Quand on sait qu’à l’époque, le chef NPD menait dans les sondages, il peut se considérer chanceux que celui-ci n’ait pas été élu premier ministre.
Amis conservateurs, ne rigolez pas trop ici de la gaffe des libéraux, car votre chef Bruce Fitch n’a pas fait mieux. Que non! Heureusement jeudi, les partis politiques ont repris leur sens et ils ont mandaté Serge Rousselle et Madeleine Dubé pour calmer le jeu lors de la présentation de Mme d’Entremont au comité des privilèges de l’Assemblée. L’appel au calme de ces deux personnes a, à tout le moins, arrêté l’hémorragie. Ce qu’il convient de faire maintenant pour le premier ministre et le chef de l’opposition, c’est de sauter sur la première occasion à la reprise des travaux de l’Assemblée la semaine prochaine, pour réitérer ensemble leur attachement aux principes de l’égalité des communautés linguistiques et à la Loi sur les langues officielles. C’est le moins que l’on puisse espérer.
Le gouvernement Gallant ne semble pas apprécier les critiques et les remarques des officiers de l’Assemblée législative. On se souviendra que la vérificatrice générale du N.-B. avait été la cible de certains ministres du gouvernement Gallant après avoir critiqué la comptabilité créative et le refus du gouvernement de fournir l’information financière demandée par le bureau de la vérificatrice générale.
Depuis quelques semaines, c’est au tour de la commissaire aux langues officielles d’être critiquée de façon très virulente par le ministre Arseneault et même le premier ministre Gallant lui-même. D’abord, M. Arseneault disait qu’il n’aurait pas agi de la même façon que la commissaire sur une plainte qui avait conduit à une réaffectation d’un employé du gouvernement. Pourtant, on apprend maintenant que la commissaire a tout simplement fait état d’un employé dans une position stratégique qui ne comprenait pas le français. La décision de réaffecter cet employé et de réduire ses heures de travail est une décision du gouvernement dont font partie le ministre Arseneault et le premier ministre Gallant et non de la commissaire aux langues officielles.
Comme le dit si bien Bernard Richard un ancien ministre du gouvernement McKenna et qui a aussi occupé le poste d’ombudsman, le premier ministre et certains de ses ministres semblent égarés. Ceux-ci accusent la commissaire d’avoir pris une décision à propos d’un employé, alors que la décision vient d’eux-mêmes. Le premier ministre en rajoute en disant que la commissaire est une nomination du gouvernement Alward, tentant ainsi de la dénigrer et rajoute qu’elle devrait s’occuper de dossiers positifs.
Donc, faire son travail – soit de s’assurer que les droits des deux communautés linguistiques sont respectés au N.-B. – n’est pas positif selon le premier ministre Gallant. Un commentaire ridicule et stupide alors que la nomination de la commissaire en est une de tous les députés de l’Assemblée législative.
M. Gallant lui-même a appuyé cette décision étant le chef de l’opposition officielle lors de la nomination. Ceci démontre un manque de maturité évident et que la priorité encore une fois est la politique de basse-cour au lieu de la gestion de la province. Comme le disait Robert Pichette au sujet de l’ancienne équipe de Shawn Graham, «nous avons affaire à un groupe d’amateurs sans talent». Il semble maintenant que la solution du gouvernement Gallant est d’éliminer les postes des personnes qui questionnent les décisions gouvernementales ou qui mettent les lois en application, pour envoyer un message aux autres de demeurer silencieux. Ça ne ressemble pas beaucoup au gouvernement transparent et ouvert promis en 2014.
Après un an au pouvoir, le premier ministre Gallant devrait modifier son entourage de conseillers très spéciaux. L’équipe politique qui a aidé à faire élire le gouvernement devrait être remplacée par une équipe qui veille aux intérêts de la province au lieu de celle du Parti libéral et de la politique partisane comme c’est le cas actuellement.