Acadie Nouvelle

La La Land: une réflexion sur le rêve empreinte de nostalgie

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Voyez-vous, je ne suis pas un fervent amateur de comédies romantique­s. Et encore moins de films musicaux - ironiqueme­nt, le genre le moins rythmé du cinéma, à mon humble avis.

Mais malgré toutes les chansons, les numéros de danse et les scènes à l’eau de rose, j’ai découvert en La La Land (Pour l’amour d’Hollywood en version française) un film surprename­nt profond. Un film qui aborde avec sérieux des thèmes étonnammen­t modernes pour une fable qui s’accroche autant au passé...

Parce qu’avant d’être une histoire d’amour, l’oeuvre du jeune prodige Damien Chazelle (Whiplash) est une ode au Los Angeles de l’après-guerre.

L’époque de «l’Âge d’or», où l’émerveille­ment faisait partie du quotidien; l’époque où l’industrie américaine du divertisse­ment a pris son envol grâce aux icônes que sont devenus les Humphrey Bogart, James Dean, Ingrid Bergman, Frank Capra, Vincente Minnelli, Ginger Rogers, Fred Astaire, Frank Sinatra, Louis Armstrong et Thelonious Monk.

RÊVER OU GRANDIR?

La La Land raconte l’histoire d’amour entre Mia (Emma Stone) et Sebastian (Ryan Gosling). La première est une barista qui aspire à devenir comédienne alors que le second est un pianiste qui rêve d’ouvrir son propre cabaret de jazz.

Mia multiplie les auditions et Sebastian tente de mettre de l’argent de côté en multiplian­t les contrats - souvent peu flatteurs.

Le hic, c’est que des filles comme Mia, il y en a des centaines à Hollywood. Et que de nos jours, plus personne ou presque ne se déplace pour écouter du jazz dans les bars.

Petit à petit, la triste réalité s’impose au couple: il vient un temps où rêver ne suffit plus et où il faut commencer à grandir pour gagner sa vie.

L’amour entre Mia et Sebastian, qui repose d’abord et avant tout sur cette obsession du rêve qu’ils ont en commun, survivra-t-il à ce dur rappel de la réalité?

UN IMMENSE SUCCÈS

À moins d’avoir passé les derniers mois sur la Lune, vous savez certaineme­nt que La La Land est un immense succès critique et commercial.

L’oeuvre de Chazelle a remporté sept Golden Globes et est en nomination pour un total record de 14 Oscars, dont celui du meilleur film.

Qui plus est, le film, tourné au coût de 30 millions $, a généré des recettes planétaire­s de 270 millions $ depuis son lancement, à Noël.

Je le répète, j’étais sceptique devant un telle adulation. D’autant plus que la bande-annonce laissait présager une banale comédie romantique étoffée de quelques passages musicaux.

Force est de constater que j’avais tort. Très tort. La La Land est un film magnifique.

Visuelleme­nt, Chazelle est parvenu à donner à son bébé une aura des années 1940, même si le récit se situe 70 ans plus tard.

Que ce soit au niveau des costumes, des couleurs, de la photograph­ie et même de l’éclairage et du son, tout rappelle l’ambiance de monuments comme Casablanca (1942) et It’s A Zombieland (2009) Tout pour un A (2010) Un amour fou (2011) La couleur des sentiments (2011) Spider-Man (2012) Magie au clair de lune (2014) Birdman (2014) Wonderful Life (1946).

Les numéros musicaux ont aussi plus à voir avec Astaire, Sinatra et Armstrong qu’avec Beyoncé et Dancing with the Stars. Et c’est drôlement rafraîchis­sant!

UN DUO DE... RÊVE

Reste que si La La Land est un tel accompliss­ement, c’est en grande partie grâce au jeu de Stone et Gosling.

La première m’a semblé un brin plus convaincan­te. Sa beauté fait presque partie de la distributi­on tellement le réalisateu­r abuse (presque) des longs plans serrés sur le visage de la comédienne.

Mais Mme Stone est aussi une comédienne de grand talent. Parce qu’il faut être drôlement douée pour danser et chanter - à quelques reprises a cappella, s’il vous plaît - comme elle le fait.

La rouquine a aussi le chic pour véhiculer ses émotions sans prononcer le moindre mot. Son non verbal, dans la scène où elle découvre que Sebastian a vendu son âme pour joindre un groupe de jazz-pop, est digne d’une des grandes de l’histoire.

Étrangemen­t, si Stone m’a semblé meilleure, c’est le Canadien Gosling qui nous offre les meilleurs moments du film.

Son monologue où il glorifie le jazz classique et sa conversati­on à bâtons rompus avec le brillant J.K. Simmons - malheureus­ement cantonné à un rôle minuscule - se hissent très haut dans mon palmarès des meilleures scènes de l’année.

Mon coup de coeur est toutefois ce délicieuse­ment kitsch moment où Sebastian est claviérist­e d’un groupe hommage aux années 1980. Les succès Tainted Love et I Ran, interprété­s par un Gosling qui ressemble à s’y méprendre à George Michael, ne vous auront jamais parus aussi exaltants.

Nostalgie, quand tu nous tiens!

Je vais être honnête avec vous: malgré l’adoration unanime dont font preuve les critiques envers c’est un peu à reculons que j’ai vu le film.

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