La ministre Foote change son fusil d’épaule
Alain Otis Dieppe
Une nouvelle qui ne nous est pas parvenue, tempête oblige, nous intéresse au premier chef. La ministre des Services publics et de l’Approvisionnement, Judy Foote, revient sur ses positions concernant le Bureau de la traduction. Devant le Comité des langues officielles, Mme Foote a déclaré qu’elle veut relancer le Bureau de la traduction, redorer son blason. Excellente nouvelle!
Pourtant, dans sa réponse au rapport du Comité des langues officielles, en octobre, la ministre avait repoussé toutes les recommandations faites, s’en tenant à des déclarations creuses sur l’importance des langues officielles au Canada, la place de la traduction pour la dualité linguistique canadienne et le rôle incontournable du Bureau de la traduction. Bref, rien à se mettre sous la dent.
Faut-il croire que la ministre a relu attentivement l’excellent rapport que le Comité avait préparé et tenu compte des témoignages entendus? Chose certaine, il y a maintenant beaucoup de substance dans ses propos.
La ministre annonce que le Bureau recommence à embaucher. Bravo! Un organisme comme le Bureau doit pouvoir compter sur un effectif renouvelé s’il veut garder sa pertinence. Le Bureau offre à nouveau des stages aux étudiants. Sage décision, qui témoigne du sérieux que la ministre et le gouvernement accordent à la formation de la relève en traduction.
Autre mesure importante, l’embauche d’un directeur à la qualité. La décision, malheureuse, de mettre à la disposition de tous les fonctionnaires le logiciel de traduction Portage, dit outil de compréhension, n’avait pas manqué de soulever de graves inquiétudes dans l’esprit de quiconque attend de l’administration fédérale des communications de qualité en français. Ce virage ne peut que réjouir les membres du Bureau et ne fera que renforcer leur volonté de fournir un produit à la hauteur des attentes. Reste à voir ce que donnera cette prise de conscience inattendue, mais rafraîchissante.
La ministre n’entend cependant pas bouger sur un aspect, celui du statut du Bureau de la traduction. Avant 1993, le Bureau faisait partie du Secrétariat d’État, maintenant Patrimoine canadien, et relevait du ministre chargé des programmes de langues officielles, dualité linguistique et valeurs canadiennes, entre autres. La traduction, qui jette des ponts entre les deux langues officielles au pays, allait de pair avec l’application de la politique de bilinguisme au Canada. C’est ainsi qu’on l’avait toujours envisagé.
Depuis 1993, le Bureau fait partie du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, maintenant Services publics et Approvisionnement, ce qui semble rendre compte plus justement de sa réalité commerciale, le Bureau étant défini comme un «organisme de service spécial». Bien que cela ne soit pas appelé à changer, selon la ministre, une concession a été faite: le Conseil du Trésor pourrait envisager de rendre obligatoire le recours aux services du Bureau, facultatif à ce jour. Ce serait un pas dans la bonne direction, car une chose est sûre: le mandat du Bureau reste bien plus près des préoccupations de Patrimoine canadien que de celles de Services publics et Approvisionnement.