Acadie Nouvelle

Une technique de pêche italienne pourrait permettre de commercial­iser le crabe vert

- Jean-Marc Doiron jean-marc.doiron@acadienouv­elle.com

Une technique de pêche italienne pourrait être la clé du développem­ent d’un marché lucratif de crabe vert. Un amateur du Maine espère importer la méthode en Amérique du Nord.

Le crabe vert cause bien des inquiétude­s au Nouveau-Brunswick depuis une quinzaine d’années. L’espèce envahissan­te, qui a un appétit vorace et qui se multiplie à un rythme effréné, pourrait avoir un impact radical sur les écosystème­s des côtes du détroit de Northumber­land.

Face à un envahissem­ent inévitable, les pistes de solution sont rares. Les scientifiq­ues avancent que l’éradicatio­n est pratiqueme­nt impossible, et les pêcheurs ont conclu qu’il n’y avait pas de marché pour le crustacé. Pourtant, des dizaines de pêcheurs de crabe vert de Venise, en Italie, font des affaires d’or.

Leur secret? Ils ont développé une méthode qui permet de mettre le crabe vert sur le marché quand sa carapace est molle. Ils obtiennent ainsi un prix de 35$ à 45$ la livre. Quand sa carapace est dure - c’est-àdire la grande majorité du temps - le crustacé ne vaut que 30 à 40 cents la livre.

Jonathan Taggart, un restaurate­ur de sculptures du Maine, veut importer le secret des Italiens en Amérique du Nord.

Il y a environ deux ans, il a entendu parler des pêcheurs de crabe vert lors d’un voyage pour le travail à Venise. Intrigué, il a accompagné un crabier local, Paolo Tagliapiet­ra, sur son bateau. Les deux hommes se sont bien entendus, et l’Italien a accepté de visiter les côtes américaine­s afin de voir s’il y avait du potentiel.

«La plus importante chose qu’il a dit est “vous avez le potentiel, mais je ne suis pas certain que les Américains sont prêts à travailler assez fort pour réussir”», a affirmé M. Taggart, sourire au coin des lèvres, la semaine dernière lors d’une conférence au Bowdoin College de Brunswick, au Maine.

Le problème, explique M. Taggart, est que capturer le crabe vert dans les heures après sa mue est presque impossible. Pendant cette phase vulnérable, le crabe se cache afin de ne pas devenir la proie de ses confrères.

Les pêcheurs italiens ont donc appris à pêcher le petit crustacé juste avant sa mue. Ils attendent qu’il perde sa carapace en captivité avant de le mettre sur le marché.

M. Tagliapiet­ra a montré à M. Taggart comment identifier les crabes verts qui se préparent à subir une mue. Une mince ligne blanche et une deuxième ligne noire se dessinent sur la bordure de leur coquille.

«C’est subtil, et c’est pourquoi c’est vu comme un art. Ça aide d’avoir de très bonnes lunettes pour lire. Même dans les meilleures conditions, il y en aura juste 10% qui se préparent à muer. Le reste doit être retourné à l’eau.»

Les crabes retenus sont placés dans un casier qui réplique leur habitat naturel afin qu’ils muent en captivité. Le crabe prend une teinte grise le jour avant sa mue. Le pêcheur doit vérifier le conteneur fréquemmen­t et isoler les crabes en mue immédiatem­ent afin qu’il ne soit pas consommé par les autres crabes. Il peut alors être placé sur le marché durant six à sept jours.

Le crabe vert à carapace molle, nommé «moleche» en Italie, est habituelle­ment servi frit ou pané. Cette spécialité locale est seulement disponible pendant une courte période au printemps et à l’automne.

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Un crabe vert. - Archives

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