LES DEUX POLICIERS BLANCHIS
La Cour du Banc de la Reine de Bathurst a déterminé que la preuve était insuffisante pour que les deux policiers, qui étaient accusés pour la mort de Michel Vienneau, subissent un procès au criminel.
La juge Anne Dugas-Horsman a tranché, vendredi après-midi, dans une salle bondée au tribunal de Bathurst.
À l’issue de l’enquête préliminaire qui s’est étalée de manière non consécutive, de la fin août au début décembre, elle a blanchi Patrick Bulger et Mathieu Boudreau de toutes les accusations qui pesaient contre eux. La plus grave était celle d’homicide involontaire. Les procédures font l’objet d’un interdit de publication.
Mme Dugas-Horsman a conclu que le ministère public n’a pas pu prouver que les policiers étaient dans l’illégalité durant les événements fatidiques du 12 janvier 2015, ni le lien entre leurs gestes et la mort de Michel Vienneau.
Une salve d’applaudissements a éclaté à l’annonce du verdict. La juge a rappelé à l’ordre l’assistance. M. Boudreau avait les larmes aux yeux, tandis que M. Bulger contenait difficilement ses émotions. Leurs familles, collègues et amis, très nombreux pour l’audience, les félicitaient, en s’embrassant et en se serrant dans les bras.
«Le gendarme Bulger est soulagé. Ce fut une longue année et demie (depuis les accusations en novembre 2015) à passer au travers. C’est une solide décision selon mon point de vue. Elle (la magistrate) a pris son temps pour en arriver à cette conclusion et pour moi, c’est la bonne. Ce qui est arrivé est malheureux, quelqu’un a perdu la vie. Il n’y a rien à célébrer aujourd’hui, pas de joie à avoir dans la situation, mais il y a un soulagement véritable. Mon client peut aller de l’avant, de même que l’autre coaccusé», a dit à la sortie du tribunal Brian Munro, l’avocat de Patrick Bulger.
«Comme M. Munro le dit, ce n’est pas une occasion de joie. C’est quand même une énorme délivrance. La juge a pris la bonne décision», a fait écho John Bird, l’assistant de l’avocat du gendarme Boudreau, T.J. Burke.
De l’autre bord de la salle, la famille de la victime paraissait sonnée, comme si le ciel venait de lui tomber sur la tête.
Le procureur de la Couronne dit respecter la décision de la juge Horsman, qui a une longue expérience, même s’il aurait bien évidemment voulu que les agents soient cités à procès.
Le drame est survenu il y a deux ans, lors d’une opération policière qui a mal tourné. Les policiers s’étaient rendus à la gare de Via Rail pour intercepter Michel Vienneau et sa compagne Annick Basque. Une dénonciation anonyme à Échec au
crime leur avait indiqué que le couple aurait, à son retour de Montréal en train, un chargement de produits illégaux.
Selon les poursuites au civil intentées par Mme Basque, les gendarmes, qui étaient habillés en civil, sont descendus de leur automobile banalisée, armes à la main, alors que le couple était dans son véhicule.
L’homme d’affaires aurait coincé Patrick Bulger contre un amoncellement de neige, en tentant de quitter rapidement la scène.
Mathieu Boudreau, croyant la vie de son partenaire en danger, aurait tiré, atteignant mortellement Michel Vienneau.
Aucune de ces allégations n’a cependant été prouvée en cour. Une enquête indépendante menée par la GRC de la Nouvelle-Écosse a toutefois déterminé que la victime n’était pas liée à une quelconque activité criminelle.
Mathieu Boudreau et Patrick Bulger n’en ont cependant pas fini avec la justice, puisqu’ils font face à trois poursuites au civil en même temps que leur employeur, la Ville de Bathurst. Annick Basque a déposé deux procédures contre eux et les parents de Michel Vienneau.
«Je suis déçu. Par contre, je n’ai pas encore lu la décision et il faut que nous analysions ce qu’elle a dit pour décider si nous allons porter l’affaire plus loin», a exprimé Me Stephen Holt.