Le Gore-Tex: une formidable invention… qui n’est pas infaillible
Le Tim Horton, réputé pour son café hélas trop chaud à mon goût, demeure à l’occasion mon lieu de prédilection pour recueillir les dernières nouvelles.
Véritable échiquier où chaque case est occupée par le même personnage jour après jour, ce haut lieu du savoir dissèque sans égards les propos à saveur philosophique, la politique municipale de même que toutes réflexions remontant au bon vieux temps.
En cette fin de matinée froide et blafarde, trois attablés aux fronts dégarnis et aux sourcils broussailleux (de grands sages quoi!) tournaient sur la braise un skieur de fond qui, de toute évidence se prêtait volontiers à leur boutade amicale. «De youscé que tu t’sors, toute échnollé pi tout trempe de même. Dé plans pour poigner la mort-auxrats ou même une inflâmâtion de pâmons».
Toujours délicieux de prêter oreille à de telles plaisanteries. Échnollé et inflammation de pâmons je décodai comme épuisement et inflammation pulmonaire. Mors aux dents d’accord, mais pour relier mort-aux-rats à l’état de mon skieur, je me devais d’interrompre un des trois savants. Mort-aux-rats fait allusion à un poison fatal pour le rongeur. Notre skieur trempé de sueur signait, j’en déduisis, son arrêt de mort.
Que de fausses croyances. La transpiration par temps froid ne prédispose nullement une personne bien portante à la grippe, au rhume, à la pneumonie, etc.
L’Université de Manchester a démystifié cette croyance moyenâgeuse en soumettant des volontaires à de nombreuses expériences. Certains sujets portant des vêtements mouillés furent placés dans des courants d’air froid jusqu’à ce qu’ils grelottent. Un second groupe se promenait à l’extérieur en petite tenue à la suite d’une séance d’exercice exténuante. Un troisième groupe se prêtait à une plongée en eau glacée après une séance de bain sauna.
Une étude statistique exhaustive s’en est suivie. La compilation des données n’a démontré aucune corrélation entre le fait de transpirer, de demeurer au froid, de se refroidir brutalement à la suite d’un effort et un risque accru de contracter la grippe, le rhume, la pneumonie, etc.
Rhume et grippe sont causés par un virus tandis que la pneumonie peut être d’origine virale ou bactérienne. Quoi qu’il en soit, ces deux agents causals ne favorisent guère les conditions climatiques pas plus que les principes de refroidissement ou de transpiration corporels. Cependant, il y va de soi qu’un individu dont le système immunitaire est préalablement chancelant encourt un risque accru que son état de santé flanche face aux assauts viraux ou bactériens.
L’étude concluait également que les systèmes de chauffage des maisons assèchent le tractus respiratoire, créant une irritation favorable à la propagation virale et bactérienne.
Les magasins spécialisés en vêtements plein air nous offrent une imposante panoplie de tenues vestimentaires destinée aux activités extérieures.
Depuis de nombreuses années, les vêtements Gore-Tex sont vantés autant pour leur légèreté, leur imperméabilité et leur capacité de nous maintenir au chaud peu importent les conditions climatiques.
Le Gore-Tex est une membrane microporeuse censée permettre l’expulsion de la transpiration vers l’extérieur tout en assurant une étanchéité face aux intempéries, notamment la pluie. De nombreuses chaussures de plein air bénéficient également du principe Gore-Tex.
Petit bémol cependant. Je peux vous assurer que peu importe le vêtement ou la chaussure dont on vante les mérites d’imperméabilité, vous serez trempé à l’os dans une pluie de forte intensité. J’ai personnellement testé ces produits dans le Grand Nord et dans l’Ouest canadien lors des trente dernières années et lors de conditions pluvieuses persistantes, aucun n’a assuré une étanchéité.
Un imperméable deux-pièces au coût de 500$ provenant de chez Cabelas a laissé pénétrer la pluie après quelques heures. On m’a offert un échange, prétendant qu’il devait s’agir d’un défaut du manufacturier puisque tous ces produits étaient soumis à de vigoureux tests de laboratoire simulant des conditions extrêmes.
Ah bon, me suis-je dit! Je retourne chez moi, j’enfile l’imperméable et je laisse l’eau de la douche m’asperger. Aucun problème pour les vingt premières minutes. Je m’appuie alors l’épaule contre le mur de la douche, histoire de patienter un autre dix minutes et surprise; l’eau s’infiltre au lieu de contact entre le vêtement et le mur de la douche.
Retour du produit chez Cabelas avec le résultat du test de mon humble laboratoire. Le directeur était pour le moins estomaqué, me promettant de retourner le produit au laboratoire de Chicago et de me faire part des trouvailles.
Semblerait que le Gore-Tex laisse pénétrer l’eau s’il est en contact avec une surface. La raison: la membrane microporeuse se détend. Explication raisonnable puisque je me rappelais avoir eu le fessier trempé avec ce même imperméable assis dans un bateau.
Pour ce qui est des chaussures Gore-Tex, promenez-vous dans l’eau et vous m’en reparlerez. Par contre, je le concède; ce sont des percées vestimentaires remarquables où la légèreté prime tout en assurant une évaporation efficace de la transpiration vers l’extérieur. Pour ce qui est de l’imperméabilité totale, je suis toujours en attente des résultats de Cabelas.
Hochement de tête de mes savants triplets sirotant leurs dernières gouttes de café et irréfutable conclusion de leur part; «Fiez -vous donque à la bonne vieille tchulotte de laine; y sont pesantes mouillées, mais vous aurez pas frète».
J’oscille toujours entre ces vénérables propos et ceux vantés par la haute technologie, souhaitant un jour un vêtement qui serait à la fois léger, chaud et surtout imperméable!