Acadie Nouvelle

Un temps pour rentrer chez soi

- scomo@nbnet.nb.ca

Ce jour où plusieurs se sont avancés pour que je trace une croix sur leur front avec de la cendre, j’ai présenté le carême comme un temps de joie. Il ne peut pas être vu autrement lorsqu’on saisit le sens de cette saison. Le pape François met en garde les chrétiens qui ont une «face de carême» sans la joie de Pâques.

Le carême est un temps pour rentrer chez soi. Pour revenir sur notre terre natale, notre terre familière, celle à laquelle nous appartenon­s. Vous saisissez bien que personne n’a besoin de se déplacer géographiq­uement. C’est pourtant un pèlerinage qui n’a rien de virtuel. C’est un cheminemen­t intérieur pour revenir jusqu’à ce lieu où on se sent bien et sur lequel nous pouvons dire «c’est pour habiter ce lieu que j’ai été créé».

Dans ce lieu, on fait la merveilleu­se expérience de l’amour: se sentir aimé inconditio­nnellement et aimer par-dessus tout. Malgré ses exigences, l’amour nous apprend que nous sommes faits pour aimer jusqu’au don de soi, même jusqu’au pardon. Lorsque nous aimons, nous pouvons dire «c’est pour cela que j’ai été créé».

Dans ce lieu, nous pouvons bâtir sur une fondation solide. Nous pouvons rebâtir à partir de ce qui tombe en ruine. C’est le lieu qui nous donne l’assurance de ne pas perdre pied parce nous sommes sur un roc. C’est le lieu où chacun peut se reposer en se déchargean­t de ses soucis. C’est le lieu qui nous fait trouver une source intérieure pour nous faire dire «c’est pour ici que j’ai été créé».

La vie nous éloigne parfois de ce lieu. Nous croyons pouvoir trouver sur d’autres terres ce qui pourrait combler notre coeur. Illusions! Nous savons que nous n’avons pas à chercher ailleurs qu’en soi le lieu de notre repos et de notre bonheur. Et nous voulons revenir à ce lieu. Rentrer à la maison. Mais comment faire? Quel chemin prendre?

Pour rebrousser chemin, pas nécessaire de demander aux autres la direction: nous la connaisson­s mieux que quiconque. Le même chemin qui m’a éloigné de Dieu est aussi celui qui peut me rapprocher de Lui… si je le fais en sens inverse. Personne ne connaît mieux que moi le chemin à prendre; c’est moi qui ai tracé le chemin.

Bien que je connaisse le chemin, le retour exige de ma part une décision renouvelée à tout moment. Une décision constitue un acte conscient qui ne va pas de soi. Cela exige une résolution et un dépassemen­t qui se fait en demandant de l’aide (Lm 5, 21, Ps 79).

Pour faire ce retour à soi, il y a parfois un désert à traverser. Un temps d’aridité et d’épreuve. Parce qu’on repasse devant les lieux qui nous ont éloignés de Dieu. Lorsque le fils prodigue décide de retourner chez son père, il doit faire le chemin qui l’a éloigné de lui en sens inverse. Il repasse devant les lieux où il a dépensé son argent, dilapidé son héritage et cherché son bonheur sur des terres étrangères.

Nos expérience­s collective­s et personnell­es sont remplies d’allers, de retours et d’errances. À partir de l’exil du peuple d’Israël qui a suivi les traces de leurs pas dans le sable pour revenir à la ville sainte jusqu’à celui de nos ancêtres qui aspiraient à revenir sur leurs terres. Ces événements historique­s deviennent des analogies de nos propres exils, alors que nous aspirons à revoir notre terre natale et familière.

Parmi les nombreuses invitation­s des prochains 40 jours, celles-ci sont à surligner de violet. Se mettre debout. Prendre le bâton du pèlerin. Marcher jusqu’au lieu pour lequel nous avons été créés. Bon carême!

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− Gracieuset­é
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