Parmi celles-là
Je suis entouré de femmes. Dans ma famille nucléaire, que des femmes: une mère et deux soeurs. Parmi les employés et les personnes impliquées en paroisse, les plus proches sont des femmes. Parmi mes amis, il y a aussi beaucoup de femmes. Parmi celles-là, je me permets aujourd’hui de vous en présenter une.
Nous allons la nommer Marie. Parce que comme plusieurs de son genre, elle préfère la discrétion. Marie et moi avons fait connaissance chez des amis que nous avons en commun à Petit-Rocher. Dès notre première rencontre, j’ai été saisi d’admiration pour sa force de caractère, toute feutrée, qui lui a permis d’accomplir de grandes choses ici et ailleurs.
Nous nous sommes ensuite revus à l’église pour des funérailles à Beresford. Ensuite à Robertville. Depuis quelque temps, elle me partage une correspondance qu’elle entretient avec sa petite-fille. Je suis allé à sa rencontre cette semaine. Je lui ai dit que j’aimerais partager avec vous quelques-unes de ses réflexions. Elle m’a dit «Mais pourquoi pas?»
Sa petite-fille a récemment été envoyée pour travailler en Israël. Elle a été touchée par ce qu’elle a vu dans ce pays: des juifs ultraorthodoxes récitant la Torah, des musulmans se dirigeant en masse vers l’esplanade des mosquées et des chrétiens cherchant à conserver leurs acquis. Elle a été marquée par l’omniprésence de la religion dans le paysage et dans la vie de Jérusalem.
À son retour, elle a écrit à sa grand-mère pour avoir des réponses à ses questions. Lorsque Marie a voulu lui répondre, elle m’a demandé de l’aide pour faire ressortir la valeur des religions et la spécificité de notre foi. Je lui ai écrit que sa petite-fille peut trouver de bons livres sur les religions. Ce qu’elle veut de sa grand-mère, c’est qu’elle lui dise comment la foi l’a soutenue. Cette correspondance entre femmes est pour moi d’une grande valeur.
À sa petite-fille, Marie ne se présente pas comme un modèle de vie chrétienne: elle dit envier la prière des autres parfois. Elle a retenu une prière qu’elle disait pendant sa vie active: «Je veux que chaque respiration de ma journée soit une prière». Avec cela, elle avait le sentiment de prier toute la journée.
Elle dit à sa petite-fille que si les fondamentaux de la religion sont immuables, il y a en revanche des règles humaines qui doivent changer. Si la religion n’est pas pratiquée comme elle l’était autrefois, la loi de l’amour demeure. En aimant, on ne peut qu’être fidèle à tous les commandements de Dieu.
En parlant de Jésus, elle dit admirer sa patience et sa compassion pour tous. Elle ne connaît pas toutes ses paroles et ne saurait comment les interpréter, mais elle a mémorisé quelques phrases qui l’ont frappée. Cela lui suffit.
Sa religion lui donne des ressources qui la soutiennent: son ange gardien, les fruits de l’Esprit-Saint et la prière. Sa prière consiste davantage à demander la force pour traverser les difficultés humaines que demander l’élimination de celles-ci. Pour elle, le bonheur passe par l’acceptation des épreuves inévitables de la vie, au lieu de se rebeller contre elles.
Elle est témoin de miracles au quotidien… à cause du regard qu’elle porte sur ses amitiés, les soins qu’elle reçoit, les voyages qu’elle a faits, cette correspondance entre femmes, etc.
Marie est fière de voir sa petite-fille s’intéresser à la religion. Elle a transmis son héritage religieux à sa descendance… sans toujours récolter les fruits escomptés. Elle dit toutefois voir tant de bonté chez les siens.
Cette semaine, sa petite-fille lui a répondu pour lui exprimer sa reconnaissance. Elle dit que le rythme actuel ne permet pas de s’arrêter pour réfléchir à la vie qu’on mène. Elle assure sa grand-mère que ce qu’elle a écrit dans son âme a maintenant besoin d’être médité.
Avant de la quitter, j’ai voulu qu’elle me parle de sa vision de l’évolution de la situation de la femme, elle dit: «j’ai toujours fait ce que j’ai voulu faire dans la vie. J’ai été tellement heureuse».
Ce soir du 8 mars, j’ai prié avec toutes ces femmes qui se sont réalisées pleinement et qui ont pu aller au bout de leurs rêves parce que ceux-ci correspondaient aux attentes de la société. Avec celles-là, c’est en gratitude que j’ai prié.
J’ai aussi pensé à toutes ces autres dont les aspirations ont été sapées par les institutions et les mentalités. Avec celles-là, c’est dans l’espérance que j’ai prié.