Acadie Nouvelle

Le test des «valeurs canadienne­s» très populaire au N.-B.

- Pascal.raiche-nogue@acadienouv­elle.com

Sept Néo-Brunswicko­is sur dix sont favorables à l’idée controvers­ée de faire subir un test de «valeurs canadienne­s» à tous les immigrants qui souhaitent entrer au pays, selon un nouveau sondage publié mercredi.

La firme néo-écossaise Corporate Research Associates (CRA) a sondé des centaines de répondants des provinces de l’Atlantique le mois dernier sur cette mesure proposée par Kellie Leitch.

Depuis plusieurs mois, cette députée conservatr­ice et candidate à la succession de Stephen Harper défend bec et ongles cette idée qualifiée de raciste par certains de ses rivaux. Elle persiste et signe malgré tout.

La majorité des répondants néo-brunswicko­is au sondage de CRA, soit 70%, ont dit appuyer généraleme­nt ou complèteme­nt ce test. L’échantillo­n pour le N.-B. est de 402 résidants de la province et la marge d’erreur est de 4,9%, 19 fois sur 20.

Les appuis au test de valeurs sont plus prononcés chez nous que dans le reste de la région. Ils sont de 66% à l’Île-du-PrinceÉdou­ard, de 68% en Nouvelle-Écosse et de 67% à Terre-Neuve-et-Labrador, selon CRA.

Seulement 21% des répondants néobrunswi­ckois ont dit s’y opposer généraleme­nt ou complèteme­nt, tandis que 9% d’entre eux ont dit ne pas le savoir ou ont refusé de se prononcer.

De l’aveu même de CRA, les répondants n’ont pas été sondés en profondeur à ce sujet. Ce qui constitue les «valeurs canadienne­s» à leurs yeux ne leur a pas non plus été précisé.

Selon son PDG Don Mills, la majorité claire de répondants disant être en faveur d’un test démontre combien il est important de définir quelles sont ces fameuses valeurs canadienne­s.

«Nous avons l’intention de mener des recherches sur la définition des valeurs canadienne­s les plus communes», dit-il dans le communiqué accompagna­nt les résultats publiés mercredi.

«DÉÇUE, PAS SURPRISE»

Ces résultats ne surprennen­t pas les intervenan­ts en immigratio­n a qui nous avons demandé de commenter ces données.

C’est le cas de la directrice générale du Centre d’accueil d’accompagne­ment francophon­e des immigrants du sud-est du N.-B. (CAFi), Maha Imazitene.

Elle rappelle que le concept de «valeurs canadienne­s» reste à définir.

«Ça me déçoit plus que ça me surprend, tout simplement parce qu’on ne peut pas vouloir une évaluation de quelque chose qui n’est pas défini. Tant qu’on ne s’est pas mis d’accord sur les valeurs qui vont servir de base à une évaluation, c’est difficile de prendre parti.»

Selon elle, le système d’immigratio­n canadien dans sa forme actuelle est très rigoureux et l’ajout d’un test de valeurs aux nombreuses étapes qui existent déjà n’est pas nécessaire.

«On a aujourd’hui des critères de sélection pour les immigrants qui sont quand même extrêmemen­t efficaces. En tout cas, jusqu’à ce jour, ils ont montré leur efficacité.»

Bien des éléments sont déjà évalués, tels que les aptitudes langagière­s et la capacité d’intégratio­n, précise-t-elle.

Mais c’est une autre histoire lorsque l’on parle de valeurs.

«Parler de culture, c’est vraiment un aspect beaucoup plus complexe. On ne doit pas aller vers l’assimilati­on. La force du Canada, c’est le respect de la diversité, le respect du multicultu­ralisme», affirme Maha Imazitene.

Son confrère d’Edmundston, Éric Thibodeau, coordonnat­eur et agent d’établissem­ent et d’intégratio­n au Centre de ressources pour nouveaux arrivants au Nord-Ouest, n’est pas plus surpris par les résultats du sondage.

«Les gens sont souvent portés à vouloir mettre toutes sortes de contrainte­s quand ils font face à quelque de nouveau», dit-il.

À l’instar de Maha Imazitene, il est d’avis qu’il serait particuliè­rement complexe de tester les valeurs des nouveaux arrivants.

«Ça devient difficile si on veut faire une charte des valeurs du Canada. Ça va être très difficile de faire consensus partout au pays. Chaque communauté est différente.»

Il ne voit pas la nécessité d’une telle évaluation.

«Ce qui est beau de l’immigratio­n et de la diversité culturelle, ce sont ces différente­s valeurs qui nous présentent de différents points de vue», dit-il.

Éric Thibodeau ajoute qu’il est en faveur de la sensibilis­ation des nouveaux arrivants aux lois canadienne­s afin de les aider à mieux s’intégrer et à s’intégrer sans pour autant tourner le dos à leurs valeurs.

«Parce qu’une valeur, c’est quelque chose que je pratique chez nous dans ma famille. Tant que ça ne contrevien­t pas aux lois du pays, ça ne pose pas problème.»

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