Hôpital de Bathurst: «Même des médecins nous crient après»
Un nouveau témoignage laisse croire que la culture d’intimidation s’est propagée dans tout l’établissement hospitalier
Des employés de l’Hôpital régional Chaleur de Bathurst persistent et signent. Ils prétendent qu’une culture d’intimidation et de harcèlement s’est installée dans tout l’établissement, et impliquent même des médecins dans leurs allégations.
Depuis une semaine, des membres du personnel du centre hospitalier allèguent qu’ils sont victimes d’abus verbaux et psychologiques de leur supérieur ou de leurs collègues.
La situation semble très critique dans le service de soins prolongés, selon leurs dires, mais ne serait pas propre à cette aile située au quatrième étage ouest.
Une infirmière qui cumule plusieurs décennies de service à l’hôpital de Bathurst réfute la position du président-directeur général du Réseau de santé Vitalité, Gilles Lanteigne, qui indiquait dans nos pages la semaine dernière que tout l’établissement n’était pas gangrené par l’intimidation et le harcèlement.
«Tout n’est peut-être pas rapporté à M. Lanteigne, mais je pourrais vous en raconter des vertes et des pas mûres. L’atmosphère de travail déteint sur les soins donnés aux patients, même si nous ne voulons pas qu’il en soit ainsi. Certains planchers sont tellement centrés sur eux-mêmes qu’il y a bien des fois où nous faisons le travail seul dans un coin sans que personne ne nous parle pendant tout un relais si nous ne sommes pas des réguliers. Quand tu poses des questions, on te répond sarcastiquement ou pas du tout», lance celle qui tient à préserver son identité.
Elle a oeuvré dans plusieurs services et indique que même le personnel médical peut être montré du doigt. Elle affirme avoir dénoncé les situations problématiques, sauf qu’elles sont restées lettre morte selon elle.
«Même des médecins nous crient aussi après. Ça m’est arrivé et à d’autres collègues aussi. J’ai rempli les fameux rapports d’incidents contre des collègues et des médecins, sans aucun suivi. Le formulaire est donné au gestionnaire et les ressources humaines seraient censées faire des rencontres de médiation, mais je n’en ai eu aucune pour régler le problème qui est encore présent à ce jour.»
Le Syndicat canadien de la fonction publique se pose aussi des questions.
«J’en ai entre les mains qui vont être partagées avec la régie. Nous voulons savoir si la plainte a été prise au sérieux, de quelle manière elle a été adressée, si l’employé a été rencontré, si la personne mise en cause a eu l’opportunité de donner sa version des faits. Le malaise est que les employés n’avaient pas de retour de ce qui avait été fait», expose Robert Le Moignan, conseiller syndical.
«Je ne veux pas faire des affirmations gratuites, mais il y a une procédure en place qui doit être respectée et je veux savoir jusqu’où les plaintes se sont rendues. Quand un gestionnaire est au courant, il ne peut pas juste mettre ça dans le tiroir et l’oublier», dit-il.
Gilles Lanteigne réaffirme sa disponibilité à l’endroit de toute personne qui n’a pas eu de réponse aux doléances portées à l’attention de son superviseur. Entre-temps, une enquête a été lancée pour remédier les problèmes.
«Un processus rigoureux a été entamé avec les employés, les gestionnaires, les partenaires et toutes les instances professionnelles concernées de sorte à éradiquer, à l’ensemble du Réseau de santé Vitalité, tous les cas d’intimidation et de harcèlement présents ou futurs», a-t-il exprimé à l’Acadie Nouvelle, mercredi.
«Nous avons l’expertise nécessaire pour y parvenir et j’ai la ferme conviction que ce défi, comme tout autre défi, n’est pas insurmontable. Notre but est d’améliorer chaque jour la qualité des soins prodigués aux patients, et cela ne peut être fait si un employé n’a pas le coeur à la tâche en raison de conflits professionnels», soutient le PDG.
L’infirmière en question est désabusée après tant d’années sans voir de changements.
«Il n’y a rien eu de fait et je ne suis pas certaine que ça va changer, parce que c’est tout l’hôpital. Par où vont-ils commencer? C’est quasiment impossible.»
Au fil du temps, sa santé en a pris un coup. Elle a songé à plusieurs reprises à se réorienter.
«J’ai fait une dépression majeure. J’entre à reculons au travail. Je ressens un stress constant, avec des difficultés à dormir, des céphalées, des nausées et des reflux gastriques. Je dois me médicamenter pour fonctionner au travail.»