Pour des canalisations sans gras
Je suis assise dans l’autobus municipal reliant l’aéroport d’Ottawa au centre-ville. Une aubaine à 3,40$ le trajet.
Mes yeux fixent une des affichettes alignées au-dessus du vitrage. Il me faut un moment pour comprendre ce que je vois.
Le texte accompagnant l’image incite les gens à ne jamais déverser des matières grasses dans les bouches d’eau de leur résidence, dans l’évier de la cuisine, par exemple, car ces matières insolubles finissent par sévèrement encrasser, sinon boucher, les tuyaux du réseau d’égouts.
Je regarde à nouveau l’image: il s’agit donc d’une accumulation de matière grasse remplissant aux deux tiers une canalisation d’eaux usées.
L’affichette précise que la municipalité d’Ottawa vient de dépenser des millions de dollars (le chiffre exact m’échappe, mais il était considérable) pour débarrasser le réseau de ces matières grasses nuisibles du fait de leur accumulation.
En ce qui me concerne, le rappel tombe pile. Il y a si longtemps que j’avais entendu parler de ça que je me suis aventurée, dernièrement, à jeter un fond de gras liquide de steak haché dans la bouche de l’évier, en faisant couler de l’eau chaude pour m’assurer qu’elle passe. J’ai pourtant déjà appris qu’il ne faut jamais faire ça. Il semble bien que les vieux enseignements finissent par s’user et qu’il faille régulièrement répéter la leçon.
Et j’ai pensé qu’en ces temps où l’on devient expert en tri de déchets et où il n’y a pas d’argent à jeter par les fenêtres, une petite campagne régionale sur le sujet ne ferait sans doute pas de tort.
La photo de la canalisation obstruée de graisses diverses et le montant dépensé à corriger le problème fut certainement efficace dans mon cas.
Pour le reste, le centre-ville de la capitale me parut afficher un visage paradoxal: beaucoup de locaux vides (sur la rue Sparks, notamment) et un centre Rideau rempli de magasins haut de gamme, mais avec toujours beaucoup de miséreux à ses portes. Et quelques gros chantiers, d’édifices gouvernementaux pour la plupart.
Mais bon, je ne connais pas de ville canadienne qui donne l’impression de péter le feu au mois de mars. Espérons que mai redressera le portrait.