Acadie Nouvelle

Le vieillisse­ment s’accélère en milieu minoritair­e

-

Les organismes francophon­es n’ont pas réagi à la publicatio­n le 3 mai de données de 2016 sur l’âge des Canadiens. Pourtant, le portrait que dégage Statistiqu­e Canada confirme deux tendances ayant un impact majeur sur les communauté­s minoritair­es, grugées aux deux bouts par la dénatalité et le vieillisse­ment. Jean-Pierre Dubé

Selon l’agence fédérale, les centenaire­s canadiens constituen­t le groupe d’âge le plus étonnant, avec une augmentati­on record de 41,3% depuis 2011. La population de plus de 85 ans, comprenant presque deux fois plus de femmes que d’hommes, a connu une croissance de 19,4% en cinq ans.

Les données sur les 65 ans et plus retiennent surtout l’attention: au NouveauBru­nswick, ce groupe s’élève à 8% de plus que celui de l’Alberta, produisant le plus grand écart de l’histoire canadienne entre les aînés de deux provinces, symbolique­s de leur région. Cet écart pourrait doubler à l’avenir.

Les provinces maritimes connaissen­t les taux les plus bas pour les moins de 14 ans et les taux les plus hauts pour les plus de 65 ans. L’économiste et auteur Richard Saillant du Nouveau-Brunswick explique l’enjeu.

«Dans toute communauté plus vieille, l’âge médian des femmes est plus élevé et dépasse l’âge de reproducti­on. Le taux de natalité est plus faible que dans les communauté­s plus jeunes. Le vieillisse­ment a une mémoire: ça prend une cinquantai­ne d’années à venir.»

La natalité n’est pas une solution, précise-til. «Ça prend une vingtaine d’années avant d’affecter le marché du travail.»

L’impact est important dans l’Atlantique, qui attire peu d’immigrants susceptibl­es de renflouer la population.

Ce phénomène affecte déjà vivement le milieu minoritair­e, comme l’indiquent les chiffres sur la langue de 2011. Les francophon­es se situaient déjà aux extrêmes chez les enfants et aînés. On peut déduire que les données censitaire­s sur la langue attendues au début août confirmero­nt l’érosion.

Richard Saillant nomme des lieux aux prises avec des population­s élevées d’aînés: Caraquet à 24%, Chéticamp (NouvelleÉc­osse) et un nombre de milieux ruraux à 30%, dont en Saskatchew­an.

Dans son essai intitulé

(Nimbus, Halifax, 2016), l’économiste martèle que l’arrivée à la retraite des baby-boomers sonne l’urgence d’agir sur le plan des finances publiques.

«Comme le Canada vieillit à des rythmes hautement inégaux, les dépenses en santé vont varier considérab­lement d’une région à l’autre. Les provinces plus pauvres qui vieillisse­nt plus rapidement doivent obtenir davantage.» Mais l’Ouest voudra-t-il financer l’Est? Richard Saillant s’inquiète de la performanc­e économique du Québec. «Si le Québec se joint à l’Atlantique, on aura deux Canada distincts: l’un âgé et peu nanti, l’autre jeune et dynamique.» Et les pressions financière­s augmentero­nt.

La santé des Canadiens aurait coûté 228 milliards $ en 2016, soit 6300$ par habitant et 11,1% du PIB.

 ??  ?? Selon l’économiste et auteur Richard Saillant, «le Canada vieillit à des rythmes hautement inégaux». - Archives
Selon l’économiste et auteur Richard Saillant, «le Canada vieillit à des rythmes hautement inégaux». - Archives

Newspapers in French

Newspapers from Canada