Israël: le «processus de paix» est toujours mort
Tout comme ses prédécesseurs, Donald Trump a invité le président palestinien à la Maison-Blanche et lui a affirmé qu’un accord de paix entre Israël et un État palestinien indépendant est «fort probable».
Le président palestinien, Mahmoud Abbas, n’a pas non plus rompu avec la tradition: il a conclu sa visite du 3 mai avec une remarque optimiste: «Monsieur le président, avec vous, nous avons de l’espoir.» Mais le «processus de paix» est toujours mort.
C’est mort depuis 22 ans, soit depuis l’assassinat de Yitzhak Rabin, le premier ministre israélien. Celui-ci a signé les accords d’Oslo en 1993, l’entente de paix qui a entériné la «solution à deux États», l’objectif principal des pourparlers de paix. Cette solution ferait que Israël et la Palestine vivent côte à côte en paix. Mais le fanatique juif qui a tué Rabin en 1995 pour avoir promis aux Palestiniens un État libre a aussi tué les accords d’Oslo.
Pendant l’élection pour remplacer Rabin, le mouvement radical Hamas, qui s’opposait à toute paix de compromis entre les Palestiniens et les Israéliens, a lancé une campagne terroriste majeure en Israël. Le but? Encourager les électeurs de ce pays à se jeter dans les bras du Likoud, parti de droite, qui s’opposait également à l’accord de paix.
Ce fut un succès: Benjamin Netanyahu a remporté l’élection de 1996. Il a été premier ministre pendant la majorité des années subséquentes, et le demeure aujourd’hui. Il a publiquement accepté une seule fois l’idée d’un État palestinien démilitarisé et indépendant dans au moins certains des territoires conquis en 1967 par Israël, soit pendant un discours à l’Université Bar-llan en 2009. Mais il a tout simplement voulu plaire aux États-Unis; il n’a pas été sincère.
En 2015, pendant la dernière campagne électorale en Israël, un intervieweur du site Web de nouvelles NRG a demandé à Netanyahu si c’est vrai qu’une nation palestinienne ne sera jamais formée pendant qu’il occupe le poste de premier ministre. Il a simplement répondu: «Effectivement.»
Netanyahu est habituellement plus prudent que cela; il communique son opinion de la «solution à deux États» en hochant la tête ou en faisant des clins d’oeil. Il doit rassurer les Israéliens qui ont voté pour lui que cet État n’existera jamais. Washington préfère toutefois prétendre que, d’une manière ou d’une autre, un État palestinien demeure une possibilité.
Les ministres du cabinet de Netanyahu ne doivent pas cacher leurs pensées autant que cela, car la majorité de leurs paroles ne sont pas traduites de l’hébreu vers d’autres langues. Mais le journaliste britannique Mehdi Hasan a récemment rassemblé certaines de leurs remarques les plus révélatrices, comme celle du ministre de l’Intérieur, Silvan Shalom, exprimée lors d’un discours donné à des activistes du parti Likoud en 2012: «Nous sommes tous contre un État palestinien, c’est sans aucun doute».
Quant au ministre de l’Agriculture, Uri Ariel, il a affirmé ceci en 2013: «Nous devons exprimer clairement qu’il n’y aura pas d’État palestinien à l’ouest du fleuve Jourdain.»
Et voici la remarque la plus honnête de toutes, de la part du ministre de la Science et de la Technologie, Danny Danon: «C’est assez avec la solution à deux États. L’échange de territoires contre la paix est fini. Nous ne voulons pas un État palestinien».
La vérité difficile à avaler est que la solution à deux États est une chose du passé. L’armée israélienne est devenue tellement puissante que ce pays est la petite superpuissance de la région. Il n’a alors plus besoin d’échanger des territoires contre la paix. Bon nombre des États arabes voisins, préoccupés par de pires menaces à leur sécurité et des guerres civiles, coopèrent silencieusement avec Israël depuis des années.
Israël règne déjà depuis 50 ans sur 4,5 millions de non-citoyens palestiniens. Aucune raison convaincante n’existe pour laquelle ce pays ne continuera pas d’y régner pendant 50 ans de plus, bien qu’une éruption de la résistance palestinienne aura forcément lieu de temps en temps.